Un souvenir embelli par le temps

"Dumbo" est pour moi un film surtout nostalgique. Je préfère d'ailleurs les doublages français de 1947, les plus récents me vrillent les oreilles. Il paraît qu'il y avait quelques problèmes de synchronisation avec ceux d'origine, mais honnêtement je n'ai jamais rien remarqué de dérangeant.

Regarder "Dumbo" avec mon regard d'aujourd'hui me pose quelques soucis. Déjà, les animaux de cirque, qui me font plus de peine qu'autre chose. Tous ces animaux sauvages vivant à l'étroit, obligés de travailler et de se produire devant des humains en faisant des tours ridicules, de subir des coups de fouet lorsqu'ils cherchent à défendre leur bébé... C'est un film, c'est une autre époque, certes, mais il y a quelque chose qui me met mal à l'aise maintenant.

Il s'agit d'une belle histoire néanmoins sur la cruauté du monde par rapport à la différence, la force de l'amour maternel, de l'amitié (et la souris Timothy est une bien meilleure conscience pour Dumbo que Jiminy Cricket pour Pinocchio), et qu'il y a de la valeur dans nos particularités, quand on apprend à les voir différemment. Dommage qu'on ne soit respecté qu'une fois que ces différences soient rentables, par contre...

Comme dans Pinocchio, le film montre les dangers de l'alcool (bien qu'il soit préférable d'avoir des hallucinations plutôt que de se transformer en âne), à travers une séquence digne d'un segment de "Fantasia" tant pour sa musicalité que pour son côté complètement libéré par rapport au reste du film. Un message qui se perd un peu dans la narration, vu qu'à un jeune âge, on n'est pas sûr de ce qui arrive à Dumbo. En tout cas, c'est un rêve éthylique qui reste dans les mémoires. On apprend aussi à se méfier des clowns, et ça explique peut-être le dégoût et la peur que ces "comiques" inspirent peut-être à certain.es d'entre nous.

Avec le recul, "Dumbo" m'apparaît comme un film un peu mineur, qui a souffert de quelques soucis de production à l'époque et ça s'en ressent, rien que sur sa durée, réduite à 63 minutes. Son final est d'ailleurs particulièrement précipité, entre le moment où il se réveille dans l'arbre et où tout va bien pour le meilleur des mondes après avoir pris sa petite revanche et retrouvé sa mère, sans transition ou volonté de nous laisser nous imprégner de ce moment.

Il en reste un joli film avec toujours des scènes mémorables (surtout parce qu'elles nous sont imprimées dans notre conscience dès l'enfance), mais rien qui ne compare à un niveau technique, émotionnel ou musical à d'autres poids lourds du studio. Un morceau d'histoire à voir mais pas forcément à revoir.