Dunkirk
Dunkirk

Documentaire TV de Alex Holmes (2004)

Pour faire écho au film de Nolan

Visionné dans la foulée du film de Nolan ce documentaire précis et soigné donne des détails qui s'imbriquent bien avec l'impression laissée par le film. En 3 parties d'une heure: la retraite, l'évacuation, la délivrance, mêlant images d'archives et scènes de fiction s'attachant scrupuleusement à restituer des tranches de vie de personnages réels, nous suivons, jour par jour, heure par heure le déroulement de cet effroyable fiasco et le sauvetage incertain des troupes acculées au cours de cette opération appelée Dynamo. Tant du point de vue du gouvernement(Churchill), que des différents chefs des armées sur le terrain et de simples soldats ou des civils happés par les évènements, tout est clairement et méthodiquement expliqué ce qui donne une vision élargie des événements et comblera bien des vides: notamment les blessés, les morts, la souffrance (étrangement gommée dans le film), les prisonniers, la boucherie, innommable chaos qu'était cette plage bombardée sans répit, noire de fumée, et ceux restés en arrière pour défendre ce dernier coin de plage, résolus au sacrifice. On y verra parallèlement au film(qui ne relate pas l'histoire mais nous plonge dans un état de stress par sa construction habile et grandiose manipulant nos émotions) toute la matière humaine, un grouillement dense de vies et les actions se succédant dans l'urgence: les décisions politiques, les manquements aux ordres de certains généraux, la retraite et les combats pour maintenir la position sur la plage tandis que tout l'arsenal militaire git éparpillé en arrière, les bombardements incessants, le feu, les fumées qui contrairement aux images lumineuses du film masquent la vision, les blessés sacrifiés, les prisonniers abattus, la soif terrassant ces milliers d'hommes acculés, puis on posera des chiffres: 26 destroyers coulés dans la journée, 75 000 britanniques ramenés sur le sol anglais le 1er jour... 200 000 soldats français sans"grande valeur" encerclés sur la plage, un homme sur un brancard prend la place de plusieurs hommes valides... Les sauvera-t-on?
Vision d'ensemble, images d'archives frappantes et visions plus subjectives, centrée sur le vécu de ceux qui étaient là: le général contraint à des choix impossibles, le soldat survivant, le marin-pêcheur prenant la décision de conduire lui-même son bateau réquisitionné pour le sauvetage, le chirurgien impuissant... C'est terrifiant, saisissant et non sans similitude avec le film(l'ambiance musicale ainsi que les tranches de vie empruntées à l'Histoire, certaines images du documentaire comme les tracts allemands au début se retrouvent dans le film, l'hommage posthume aux marins civils qui ont péri, la vision des armes et équipements abandonnés, jonchant les routes désertes trouve un écho dans celle des casques jonchant la plage à la fin du film, sans oublier le discours de Churchill en voix off clôturant la trilogie, à tel point que je me demande si Nolan n'a pas vu les 3 parties du documentaire pour concevoir sa désarticulation des 3 temporalités).
Et on réalise que la réalité des faits est bien plus insoutenable, car dénuée du lyrisme esthétique d'une mise en scène, il n'y a qu'explosions, brouhaha, fumée des brasiers, chaos(la panique qui pousse aux pires actes autant qu'à l’héroïsme)... et la pression insupportable d'une totale défaite, de pertes énormes ainsi que l'humiliation(car l'Angleterre a bien failli capituler dans cette bataille).
Sorti en même temps que le film avec sous-titrages français, c'est une bonne idée de voir ce documentaire avant ou dans le prolongement du film, ils se font écho mutuellement, se complètent et s'enrichissent chacun de ce que l'autre ne peut rendre compte: soit l'étreinte viscérale de l'émotion générée par l'art et le savoir-faire visuel, soit la relation claire et précise des faits à travers l'évocation de ceux qui l'ont vécu, bouleversant!

boomba
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le 4 janv. 2018

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