Un chef d'oeuvre absolu qui - à partir d'une douzaine de plans-séquences d'une précision technique impressionnante - traduit le malaise de toute une époque. Dans un registre lyrique, parfois faussement insouciant mais toujours émouvant et intelligent Paul Vecchiali réalise le premier film important sur les sinistres années SIDA ; se revendiquant de Jean-Luc Godard et de Jacques Demy ( principalement pour les intermèdes musicaux, savoureux et inattendus ) le cinéaste explore la décade prodigieuse et pathétique d'un homme aux tendances sexuelles d'abord imprécises, confirmées par la suite : le parcours de ce quadragénaire à la séduisante moustache et aux yeux de mari jaloux saisit littéralement aux tripes, fourmillant d'idées de mise en scène et remarquablement interprété par l'ensemble des comédiens et des comédiennes.


Dans l'intimité d'une chambre conjugale, dans une rame de métro, au coeur d'une boîte de nuit ou dans l'espace illimité d'une plage normande Vecchiali réalise des moments de vie parfois déterminants, parfois de moindre importance, avec ce souci permanent de montrer la fragilité d'une existence et l'inéluctabilité du temps qui passe. Once More parvient, avec une homogénéité sidérante, à témoigner des aspects les plus tragiques d'une vie humaine, sans pour autant sombrer dans la complaisance ou délaisser les instants de bonheur... Ce travail d'orfèvre touche vraisemblablement à quelque chose d'essentiel et d’éminemment cinématographique : mettre en images le passage du temps dans une quotidienneté profondément incarnée et touchante.


On pense également à l'esthétique des films de Fassbinder, tant Vecchiali en emprunte la saveur à la fois décadente et poétique : son Once More est un conte du monde contemporain, sans princes ni princesses, mais cruellement émouvant. Un cinéma qu'il s'agirait de réhabiliter au plus vite, comme une espèce rare en voie de disparition. Magnifique.

stebbins
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le 14 avr. 2021

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