"Expendables", c'est un peu la franchise de l'impossible. En fait, c'est du rétro-cinéma. Comme ce mouvement de rétro-gaming qui pousse certains d'entre nous, dans le début de la trentaine, à se lancer à corps et à cri dans d'anciens jeux en hurlant sauvagement "C’ÉTAIT MIEUX AVANT", "Expendables" surfe allègrement sur la vague du film "à l'ancienne", avec des acteurs bien d'autrefois, assumant le côté has-been d'une partie de son casting. Casting qui fait d'ailleurs le propos du long-métrage : il suffit de voir l'affiche de ce troisième opus ! C'est plus un film, c'est une réunion d'anciens. Ils sont tous revenus boire une bière, se tapoter l'épaule et tirer quelques balles avant de repartir siroter des cocktails tous ensemble sous les tropiques. Bon, pour en revenir au film en lui-même : Stallone est lancé sur une mission de vengeance vengeuse, puisque la cible qu'on le paie pour traîner n'est autre que Mel Gibson, ancien Expendable revenu d'entre les morts pour pratiquer un peu la vente d'armes auprès de gens peu recommandables ! Alors là, ni une, ni deux, Stallone vire son ancienne équipe dont il a peur qu'elle morfle (sans rire ?) et en embauche une autre, plus jeune, pour aller casser les os à Martin Riggs. Parce qu'Expendables, c'est un peu la croisée des chemins entre les anciens briscards et les jeunes dodus.
Bim, dès le début, ça envoie des petites paillettes avec une séquence d'action toute droit héritée des actioners de "ces années-là", où la fine équipe libère le personnage de Wesley Snipes (parce que zut, c'était un ancien Expendable quand même !). Pis ensuite, on voit l'opération qui amène nos mercenaires sur le terrain, apercevant du coin de l'oeil un Mel Gibson qui a l'air de s'amuser énormément. Pour l'instant, même si les scènes d'action donnent l'impression d'alterner le bon et le moins bon, rien à dire, c'est plutôt la came qu'on était venue voir, donc autant dire qu'on est passablement servi. Et pis là, le film se targue soudainement de se lancer dans l'horrible instant du recrutement. Ouais. Stallone découvre que mercenaire, c'est quand même un boulot dangereux et ne veut plus que son équipe s'expose, du coup, hop, il licencie tout le monde et décide d'engager des jeunes, parce que c'est bien connu, le jeune est plus que sacrifiable, dans le milieu du travail. Au passage, faites coucou à Harrison Ford qui a à peine le temps de poser les valises qu'il se voit obligé de cabotiner un poil pour meubler (c'est ce qui arrive quand on te laisse pas lire le script en entier !).
Voilà, petit souci : va falloir choisir. Les précédents opus l'avaient fait, pour le meilleur comme pour le pire : on tenait des buddy movies à dix, ,où les personnages s'échangeaient quelques blagues viriles, quelques anecdotes frappadingues pour montrer qu'ils s'étaient pratiqués sur le long terme et ensuite, action, blague potache, action, etc... Ici, Stallone, qui est toujours à l'écriture, a sans doute voulu agrémenter la sauce et la relever d'un peu d'originalité - par rapport aux précédents volumes. Résultat, bim, plutôt que de choisir l'action à tout-va, le film se perd dans le long passage du recrutement. Et pas des moindres puisqu'on y voit même l'horrible acteur qui jouait Hercule y a pas si longtemps et se retrouve donc propulser "héritier" de Stallone. L'horreur. Mais le pire, c'est que ce ventre mou en mode RH ne fait pas beaucoup illusion : on sait de toute manière que les seniors vont revenir au terme d'une pirouette de l'enfer.
Mouais, j'avoue, c'est pas terrible. La séquence finale où les vieux vont faire équipe avec les jeunes dans un espèce de long instant de faire-valoir n'est pas très convaincante. Retour au décor d'Europe de l'Est dans une République "Noname", avec des ruines urbaines en guise de décor et énormément de méchants qui débarquent uniquement pour se faire pulvériser. Certains donnent même l'impression d'attendre patiemment de prendre leurs décharges de chevrotine. Pénard. Dans tout ça, les personnages ont l'air très concentré mais avouons quand même que tout cela manque un peu de conviction. Les nouveaux venus n'ont pas l'air très enthousiaste mais le pire reste... Antonio Banderas, en roue libre complète, qui parle en permanence. En permanence. Un espèce de ressors comique vivant et très embarrassant. Très très embarrassant. Là dedans, comme d'hab', mon petit favori restera le méchant, comme dans le précédent opus. Mel Gibson est juste trop classe et on ne comprend pas du tout pourquoi le bougre ne joue pas plus au cinéma tant il a encore en lui cette folie déployée depuis l'Arme Fatale. Un petit coup de coeur aussi pour Statham que j'apprécie toujours autant, même si on le voit moins ici. Les autres font plus de la figuration, comme par exemple Ford, en pilote d'hélicoptère, dans des courses poursuite aériennes très laide en CGI pas terribles.
Pas du grand art, ça non. Le concept commence quand même à s'épuiser. Je n'ai pas arrêté de me dire que je préférerai quand même voir chacun de ces acteurs que j'apprécie dans un film où ils seraient les protagonistes, plutôt que de les voir surnager à l'écran autour de Stallone (qui se refait une séquence de course à pied où il a l'air de mourir !). Du coup, c'est ennuyeux, j'ai un peu d'affection pour le métrage - mais cela ressemble plus au sentiment que j'aurais eu à retrouver des amis dont j'aurais été séparé depuis longtemps. Cela nécessite-t-il réellement un film ? Rien n'est moins sûr...