Un rêve étrange et pénétrant.
J'ai donc attendu 15 ans avant de voir ce film. Je l'avais pourtant enregistré lors de son premier passage à la télévision sur une K7 vidéo (!) mais je n'ai jamais pris le temps de le regarder, me demandant ce qu'il valait.
Après coup, mieux vaut tard que jamais car j'ai vraiment apprécié ce film un peu hors normes. Bon, j'ai de mémoire vu bien peu de films de Kubrick (Orange mécanique et 2001 L'odyssée de l'espace) mais j'ai soit adoré soit détesté.
Eyes Wide Shut entre dans la première catégorie.
Pourtant, dans la première moitié du film, je me suis demandé ce que c'était que cet ovni cinématographique et où le réalisateur voulait nous emmener. Et puis, touche après touche, par paliers subtils, il nous suggère que les pensées du docteur Bill quant au rêve de sa femme le conduit dans une direction totalement obsessionnelle. Les conséquences dans la vie réelle semblent avérées, même si le voile diurne change tout. C'est une façon intéressante de considérer la psyché humaine et sa complexité. Comment, à partir de certaines révélations, chacun peut se faire des constructions mentales et parvenir peu à peu aux frontières de la folie où le mensonge, la dissimulation, le fantasme se mêlent dans un tourbillon de pensées éparses.
Le docteur Bill a finalement bien de la chance (je m'attendais à un destin bien pire pour sa famille). Ce film en aura moins porté au couple de stars qui se sépareront juste après ce tournage. Tom Cruise et Nicole Kidman jouent vraiment bien dans leurs registres respectifs. Tom un peu à contre emploi (et sur talonnettes - il faut bien qu'on ne voit pas trop qu'il est beaucoup plus petit que sa femme - son complexe) et Nicole fort dévêtue qui montre assez largement son incroyable plastique (encore naturelle à l’époque) mais également son regard étonnement expressif.
Du nu, ce film n'en manque pas et exhibe nombre de femmes dans le plus simple appareil (quoique avec un masque c'est bien plus classe). On est parfois limite dans un film porno lors des scènes au sein du château des plaisirs charnels. Heureusement, c'est de l'Art pétri de sensualité et l'intrigue qui se resserre autour du cou du principal protagoniste prend le dessus sur l’exhibition. Le spectateur est alors happé par les questionnements qui se bousculent dans la tête du trop imprudent docteur.
Un film vraiment troublant qui questionne la notion du mariage, de la fidélité en amour, de l'utilisation du mensonge et des pulsions sexuelles qui habitent hommes et femmes. Une oeuvre dont la perception doit changer en fonction de l'âge auquel on le regarde mais qui demeure puissante.