Farce au canard
8.1
Farce au canard

Court-métrage de Chuck Jones (1953)

« Des shows publics de Winsor McKay dans les années 10 pour introduire son film Gertie le dinosaure à l’apogée moderne du CGI, en passant par le triomphe de Qui veut la peau de Roger Rabbit ?, le cinéma d’animation a toujours été tenté de mettre en relation le monde animé et le monde réel. Parmi ces interactions, un geste se démarque toutefois des autres : celui de la main qui dessine. Dès 1908, Emile Cohl, le père du cinéma d’animation, utilise sa main pour introduire son chef d’œuvre Fantasmagorie. Quelques années plus tard, les frères Fleischer, avec leur série Out of the Inkwell, contribuent encore un peu plus à faire de l’acte du dessin une introduction à part entière d’un personnage animé. Près de 40 ans plus tard, Chuck Jones, avec Duck Amuck, fidèle à ces modèles, perpétue l’utilisation du geste, le second degré en plus.


Au premier abord, Duck Amuck est pourtant un cartoon tout ce qu’il y a de plus classique : générique, crédit, décors peints, personnages clairement identifiable… Rien de renversant. Il convient en effet de rappeler que le genre, bien que truffé de personnages excentriques et irrévérencieux (devant et derrière la caméra), demeure toutefois très ancré dans le système des studios de l’âge d’or hollywoodien, et on y retrouve donc, de ce fait, un certain nombre de règles à respecter au niveau du cahier des charges. La surprise arrive lorsque Chuck Jones, qui a déjà plus de 20 ans de bouteille dans le milieu à l’époque, décide avec Duck Amuck de pervertir les règles qu’il a contribué à instaurer pour bouleverser l’ordre établi et manipuler l’esprit du spectateur et de son personnage. Daffy, déguisé en mousquetaire, entame dès lors son mouvement dans l’espace. Alors que ce dernier se trouvait dans un décor moyenâgeux, il sort finalement du cadre pour se retrouver devant un écran blanc. Si une référence à l’œuvre de Tex Avery, dont Jones fut l’un des collaborateurs, s’avère ici tentante sur le papier (on pense notamment à Dumb Hounded ou bien encore aux films du « Screwball Squirrel » dans lesquels les personnages sortent du cadre lors de courses-poursuites), les deux optiques sont cependant opposées. Alors que ce sont les personnages, frénétiques, qui dynamitent le cadre et l’espace chez Tex Avery, chez Chuck Jones, la diégèse est uniquement pervertie par l’intervention du créateur. Ce créateur diabolique n’aura dès lors de cesse de détourner les règles de son œuvre (...) »


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le 1 août 2017

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