Femme de feu
6.6
Femme de feu

Film de André De Toth (1947)



  • Et si je disais que je regrette ? Que je regrette terriblement ?

  • On a toujours recours à ces mots : " Je regrette. "

  • Ce qui compte, c'est notre bonheur. Notre liberté, notre vie.

  • Pas nous, Connie. Rien que vous, seule.

  • Je n'en veux pas, seule.

  • Vous n'en voulez pas seule ? Alors tout est dit.



Au départ pressenti pour réaliser Femme de feu, John Ford refusa la proposition pour le tournage de La Poursuite infernale. Il proposa aux producteurs la réalisation à André De Toth encore novice dans le domaine du western. Le cinéaste propose un western étonnamment cynique et brutal dans une mouvance de film noir reprenant quelques-uns de ses codes, comme sa noirceur, son ambiance, ou encore son approche amère. Une présentation de l'intrigue adulte, mais qui souffre d'une introduction compliquée à suivre. Dès les premières minutes, le récit présente trop d'informations dans les dialogues, envoyant une multitude de noms qu'on ne connaît pas, et une histoire qui semble déjà bien avancée. De quoi être troublé. Il m'a fallu revenir dessus pour tout saisir, pourtant l'intrigue n'a rien de bien compliqué une fois qu'on l'a saisie, seulement le scénario au départ est très confus et brouillé.


Femme de feu est une oeuvre techniquement travaillée, composée d'une photographie de Russell Harlan soignée, présentant de beaux extérieurs de l'Utah. Belle surprise du côté de la mise en scène, qui présente des mouvements de caméra pertinents, avec des effets de styles réfléchis, amenant sur certains plans de la profondeur, avec des angles de vues nuancés, dont un contraste sur les séquences de nuit éclaircie réussi. Des étonnantes séquences sont à remonter, comme l'utilisation du premier plan, qui confère une véritable figure de style avec son cadrage très rapproché, comme avec la séquence du rouage de coup de poing, ou encore le duel final. Une manière de filmer très caractéristique de la part d'André De Toth qui prouve qu'il a la capacité de réaliser un western. La musique signée d'Adolph Deutsch est intéressante et quelquefois stressante. Le rythme est lent, les actions pas trop mal, avec des scènes un peu violentes, et un duel final appréciable " Fusil contre Colt ". Ironiquement le personnage de Dave Nash aurait beaucoup à apprendre au comédien Gian Maria Volonté, qui contre Clint Eastwood avait perdu son duel du fusil contre le colt.


Le récit ce centre avant tout sur le relationnel entre les différents individus, c'est pourquoi ils sont complexes, réfléchis et ambigus. Cela offre des rapports intéressants et nuancés, souvent un peu trop intériorisés. Les personnages sont tiraillés entre amours, amitiés, profit personnel et mensonges. Une manière de procéder assez subtile, si seulement le héros avait été plus intéressant à suivre. Joel McCrea incarne le contremaître Dave Nash un personnage principal apparemment alcoolique (on le voit pas une fois saoul mais on nous dit tout du long qu'il est un alcoolo) assez inintéressant, ne parlant quasiment jamais, se contentant de subir tout du long. Il n'est pas mauvais, mais paraît trop paresseux. Preston Foster sous les traits du méchant Frank Ivey s'en sort un peu mieux. Don De Fore est une bonne surprise, se débrouillant bien dans son rôle aux multiple facettes. Donald Crisp en shérif est réaliste dans son approche.


Veronica Lake, (étonnament critiquée pour ce rôle) est le maillon fort du casting. Elle incarne une femme fatale opportuniste et impitoyable. Elle est le centre du conflit, refusant de céder ses pâturages à Ivey. Gagner est pour elle une obsession, quitte à sacrifier des innocents, ne reculant devant rien pour atteindre ses objectifs, usant ses charmes pour obtenir gain de cause. Une femme sensuelle, magnifique et énigmatique, qui n'est pas qu'impitoyable, vu qu'elle se retrouve souvent troublée par ses actes, faisant comprendre qu'elle est dotée d'une conscience. Cela en fait un personnage riche et intrigant, qui malheureusement ne brille pas suffisamment longtemps à l'écran pour être resplendissant. Un joli feu de braise.


CONCLUSION :


Femme de feu est un film en noir et blanc d'André De Toth qui propose un mélange intéressant entre le western et le film noir, doté d'une technicité ingénieuse. Dans un premier temps confus dans son intrigue, l'histoire prend ensuite un autre essor plus positif, présentant une multitude de personnages travaillé, dont un héros malheureusement pas à la hauteur du film. En ressort un western dans l'ensemble positif, qui se perd un peu dans la monotonie. Je garderai en tête le duel final, ainsi que la seule et unique participation dans un western de la superbe comédienne Veronica Lake.


L'esclave fait son orgueil de la braise du maître.

Créée

le 28 mars 2020

Critique lue 588 fois

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