Lundi 22 juin 2020, réouverture des salles de cinéma après l'épisode confinement . Je décides d'aller soutenir mon cinéma et de m'offrir un retour aux sources avec une petite séance sur grand écran. Pas de bol, avec l'occupation des salles à 50% de leurs capacités le film que j'avais choisi affiche complet et il me reste alors trois alternative ; rentrer chez moi, aller voir De Gaulle ou Filles de Joie ….. Plus par défaut que par envie je décides d'aller voir le film de Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich dont j'ai vaguement entendu parler et dont le sujet me titille un peu plus que le biopic d'un vieux général.


Filles de Joie raconte l'histoire de trois femmes qui vivent dans une triste banlieue frontalière avec la Belgique. Afin d'assurer la survie financière de leurs foyers respectifs les trois femme passent régulièrement la frontière pour partir travailler dans une maison close en Belgique.


Malgré son titre on va vite se rendre compte que le film de Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich est loin de respirer la joie de vivre. Certes le sujet ne prête pas forcément à la gaudriole et la légèreté mais on sent chez les deux réalisateur une envie d'inscrire leur récit dans une forme de pathos misérabiliste qui finit par rendre le film assez désagréablement caricaturale. On sent que si une fleur poussait sur le bitume de cette triste banlieue les réalisateurs refuseraient de la filmer pour ne pas apporter une touche de couleur et d'optimisme à leur récit, car même si le film est traversé de quelques moments plus léger on sent bien que c'est de montrer la détresse sociale comme moteur de la prostitution qui intéresse surtout Fonteyne et Paulicevich. On nous explique alors que si ces trois femmes se prostituent c'est soit pour payer les factures, retrouver de la tendresse loin d'une famille dans laquelle elle se étrangère ou échapper à une condition qui nous condamne à devenir femme de ménage.... On a alors la sensation d'une volonté de montrer que la prostitution est le fruit d'une oppression sociale faites aux femmes alors qu'elle peut être parfois aussi un choix de vie parfaitement assumé et un peu plus joyeux Mettant en avant trois femmes courageuses et combatives, le film contrebalance avec une galerie assez appuyée de personnages masculins allant de l'ex mari violent et possessif au conjoint bedonnant et bande mou en passant par un séducteur manipulateur abject et adultère qui traite les femmes comme au marché aux esclaves. Filles de Joie ne fait pas vraiment dans la dentelle dans la caractérisation de ses personnages qui sont soit des saintes qui y touchent ou des beaux salauds. Le film reste sans doute le reflet d'une réalité sociale forte mais comme dans toutes choses c'est souvent la nuance qui apporte la pertinence et la finesse de l'analyse.


Le film reste toutefois porté à bout de bras par son très bon trio de comédienne avec Sara Forestier , Noémie Lvovsky et la jeune révélation Annabelle Lengronne. Les trois actrices parviennent à tenir le film sur une fragile et sensible corde raide qui fait que malgré toutes les facilités de son script un peu lourd on s'attache tout de même à ses trois personnages et surtout à leur tendre complicité de galère. C'est peut être Noémie Lvovsky qui incarne le personnage le plus émouvant de par son expérience, son détachement et sa détermination tout aussi radicale que bienveillante à protéger les autres filles. Sara Forestier reste sur un registre assez convenu au regard de ses précédents films et Annabelle Lengronne est un jolie découverte même si son personnage est lui aussi relativement caricaturale.


J'aurai vraiment adoré me sentir plus proche, plus touché , plus ému par le singulier destin de ses trois travailleuses du sexe, mais le film ne m'emporte jamais et me laisse le plus souvent dans un sentiment inconfortable d'ennui poli.

freddyK
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le 22 juin 2020

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