Si « The Last Face » en a irrité plus d'un, et à raison, son auteur revient sur la Croisette avec l'intention de se racheter, tout en lançant sa fille dans ce monde qui semble rejeter tout espoir de réussite. Il y a donc de la place pour que l'acteur-réalisateur, Sean Penn, saisisse l'opportunité de recoller les morceaux dans ce mélodrame familial. Inspiré de l'ouvrage autobiographie d'une journaliste à l'enfance tourmentée, il dédie chaque plan et chaque intention à la génération qui lui succédera. Mais c'est avec une terrible confusion et une maladresse affligeante qu'il tombe de nouveau de haut. Ce sera cette fois-ci sans hurler au scandale. Au contraire, il serait plus judicieux de taire l'ultime chapitre de celui qui nous aura toutefois ébloui avec « The Indian Runner » et « Into The Wild ».


La famille Vogel est en suspension, au-dessus des nuages, au-delà de toutes les frontières du Minnesota. Elle célèbre autant la vie que ce jour mémorable, où le drapeau rayé et étoilé est né, tout comme la figure paternelle de l'intrigue. Mais du point de vue la petite Jennifer Vogel, que l'on découvrira sous les traits de Dylan Penn à l'âge adulte, tout n'est pas aussi rose, tout paraît de plus en plus cru et sauvage. Ce lien, qui l'unit à son père, sera l'unique référence de son parcours atypique, car on manquera souvent de brosser le portrait des années 80 et 90. Ces instants de tendresse, toujours sincères, en résonnance avec la fin de carrière de Penn qui vacille, soulignent de l’hésitation dans la narration, qui feint et échoue à tutoyer la maîtrise d'un Terrence Malick.


La voix-off ne transcende pas l'image et cette dernière se révèle terriblement générique. Étonnant pour une œuvre qui cherche à sonder la personnalité d'un père, qui survit mal au faux rêve américain, laissant femme et enfants derrière lui pour la magouille et autres coups foireux. Dans cette même démarche, Jennifer bascule dans une sorte de gouffre avant de rapidement en sortir, jusqu'à ce que le journalisme lui ouvre ses portes. Elle, qui se trouve finalement sur le chemin de multinationales dans le déni, fait face à celui de son père en arrière-plan de sa vie. Entre ces deux têtes de linotte, la sauvegarde de la morale est préservée, mais ce ne sera jamais mis au service du reste du récit, qui ponctue sagement les points clé de la famille Vogel.


Nous sommes donc loin de cette fameuse réconciliation que l’on aurait souhaitée, quand bien même le sujet apportait son lot de potentiels. « Flag Day » n’est donc rien d’autre qu’une illusion perdue pour son auteur, en quête de rédemption, qu’il ne parvient pas à retranscrire à l’écran. Connaissant la rage et la fugacité du cinéaste, l’histoire de famille aux côtés de ses enfants Dylan et Hopper ne tient que sur un fil et un pendentif. C’est beaucoup trop juste pour convaincre et c’est trop peu de justesse dans la direction des comédiens pour ôter cette graine de l’ennui sur nos visages éteints. Quelque chose a encore dépassé Penn, qui ne l’enterra pas entièrement, mais qui ne laissera qu’une pousse afin que germe de nouveau l’inspiration et la générosité d’un ex bad-boy d’Hollywood.

Cinememories
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le 20 sept. 2021

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