Frankenweenie... et Burton revint d'entres les morts
On ne savait plus vraiment où il était... Entre inspiration personnelle globalement affadie par de grosses productions à la pelle et génie planqué dans sa lampe rouillée. Comme un fantôme qui se ballade entre nous de films en films depuis une dizaine d'années. Pourtant, Tim Burton n'en est pas moins un des plus grands conteurs de notre génération, particulièrement lorsqu'il s'exerce à une de ses plus grandes passions: le dessin. Et lorsqu'il l'anime, lui-même se réanime de plus belle.
Car "Frankenweenie", tout droit sorti de l'inspiration du court-métrage du même nom et tourné en 1984, nous rappelle miraculeusement les oeuvres originelles - et originales - du Burton "1985-1994" : soit de "Pee-Wee Big Adventures' à "L'étrange Noël de Monsieur Jack". Le must, en somme! Et même si, évidemment, l'histoire nous paraîtra ressassée, donc banale, chez le réalisateur au grain de folie aussi hirsute que sa touffe de cheveux. Mais, bon, penchons-nous un peu dessus quand même!
Ici, il s'agit de Victor. Garçon solitaire, à la mélancolie toute gothique, habitant avec ses parents dans une résidence pavillonnaire américaine, dans les années 50. Amérique de la réussite individuelle, du tout consommable, des matchs de baseball. Il n'est donc pas dans son monde. Il se rêve scientifique et se réfugie dans son grenier pour des expériences diverses et variées. C'est l'amour pour son chien Sparky qui le fait tenir, aussi. Et lorsque celui-ci meurt renversé par une voiture, tout s'effondre. Reste les idées un peu folles de son prof de sciences, sorte de Dali tout aussi azimuté, dont les lois sur l'électricité font fonctionner le corps des être vivants. Quoi de mieux que de le ressusciter en somme! Sans se douter un seul instant des conséquences que cela provoquerait dans son entourage et dans une ville aussi conformiste que New Holland...
Victor, encore. Une ville américaine aseptisée, de nouveau. Des morts, du glauque, du cynisme à tout va. A quoi bon... Pourtant, Burton distille une poésie et une fraîcheur - sans mauvais jeu de mots, dans ce contexte - qui ne tiennent qu'à lui mais qu'on ne lui connaissait plus surtout! Cet humour si particulier, qui nous fait oublier le côté morbide d'un dessin animé décidément pas destiné à tout enfant normalement constitué. D'ailleurs, l'on n'arrive pas à se lasser de cette vision si contrastée de l'enfance, entre désoeuvrement, repli sur soi et folie douce. De l'amour qu'il insuffle à tous ces êtres vivants. Et ces hommages aux films de SF de son enfance, japonais comme américain. Ces monstres géants qui envahissent notre monde et détruisent tout sur leur passage. Ces vampires et mort-vivants qu'on a toujours peur de voir surgir des entrailles de la Terre. Cet hommage à lui-même surtout, émouvant mais ne manquant surtout pas d'humilité. Car tout, de "Batman", "Edward..." ou encore "Les Noces funèbres" sont ici. Et, enfin, cette technicité, cette qualité des dessins, ces corps cabossés, déformés, mouvants, inimitables. A l'image de notre société contemporaine, pas si éloignée de celle qu'il décrit.
Ne vous en privez pas de le recroiser encore une fois. Le phénix Burton sait encore raviver ses cendres. Espérons que le vent ne les emporte pas de nouveau !
Une critique par Vinçou T, du blog Format 35
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