Freddy - Les Griffes de la nuit par TheScreenAddict
Décidément, 2010 n'est pas une bonne année pour les remakes. Après le désastre colossal du Choc des titans, c'est au tour d'un autre film culte de voir son mythe sabordé par des mains peu scrupuleuses : Les Griffes de la nuit, de Wes Craven (1984). Autant l'original peut encore se targuer d'avoir donné un visage nouveau au cinéma d'horreur, sans parler de ses personnages attachants (dont un tout jeune Johnny Depp) et de son atmosphère onirique à la fois très belle et effrayante, autant le remake patauge avec paresse dans le déjà-vu, à travers des effets horrifiques tellement éculés qu'ils ne surprennent plus. Pourtant très ancré dans les années 80, le film de Wes Craven traverse les décennies en conservant une certaine puissance d'évocation, une imagerie des peurs primaires qui garde encore tout son sens car jouant à fond la carte de la suggestion et du fulgurant.
La reprise du mythe de Freddy Krueger par Samuel Bayer bourrine à qui mieux mieux dans la démonstration crétine, ne suggérant rien, à tel point que le tueur aux griffes métalliques devient trop familier, puis tristement banal et finalement insupportable de cabotinage : son visage mutilé est montré en gros plan, à chaque apparition, sous toutes ses brûlures. Si Craven le représentait avec une efficace parcimonie, Bayer l'expose jusqu'au grotesque. Rien de tel pour désamorcer irrémédiablement tout effet de terreur. Pire : le réalisateur cherche à faire peur (en vain) en reprenant un à un tous les ingrédients du genre, mais sans jamais les renouveler. Surgissements du tueur accompagnés d'explosions acoustiques systématiques, scène du miroir, scène de la penderie... Rien ne nous est épargné, tout est réchauffé, sans la moindre inventivité visuelle à l'horizon. Et lorsque le film a finalement épuisé tous les clichés possibles, que reste-t-il ? Le gore bien sûr ! La bonne vieille hémoglobine bien épaisse. Les griffes du méchant Freddy tailladent tout ce qui bouge, transformant les corps juvéniles d'adolescents amnésiques sur leur propre enfance (ça y est, l'Everest du ridicule hollywoodien a été atteint...), faisant couler à flots des hectolitres de pixels censés représenter du sang.
Encore plus marrant (ou consternant) : les lames du tueur projettent autant d'étincelles qu'un réacteur de fusée lorsqu'elles raclent les murs ! Comble de l'incroyable, on a même droit à une scène, gratuite et inutile, narrant le triste sort de Krueger, ou encore un cours improvisé par l'un des jeunots sur les méfaits physiologiques et mentaux de l'insomnie sur le long terme. Brillants comme du mauvais cirage ces jeunes. Autant dire qu'on ne croit pas une seule seconde à leurs soi-disant cauchemars. Comment voulez-vous frémir avec un casting de bimbos (choisies pour la taille de leurs nibards), dont les cernes grandissants sont grossièrement dessinés au feutre noir, et des crétins dans une forme olympique après avoir passé une semaine sans dormir (ils ont beau se bourrer l'estomac d'excitants, on reste incrédule face à tant d'absurdités). Pour qu'un film soit un minimum éprouvant, il faut respecter un minimum de crédibilité. Pour qu'un film soit bon, il doit susciter un minimum d'intérêt. Le Freddy nouveau vient de s'ouvrir les veines dans une baignoire d'oubli...