Le nouveau bijou du réalisateur de Seven et Fight Club raconte l’histoire de Nick (Ben Affleck) et Amy Dunne (Rosamund Pike), un couple sur le point de fêter ses cinq ans de mariage.
Seulement, le jour de ces fameuses noces de bois, Amy disparaît sans laisser de traces évidentes, en tout cas, en apparences…

Et d’apparences il en est plus que jamais question puisque c’est aussi le titre français du roman adapté à l’écran, un livre de Gillian Flynn qui s’est d'ailleurs elle-même chargée de scénariser le film et a jeté son dévolu sur l’indomptable David Fincher pour le mettre en scène.

Indomptable?
Il y a quelques années certainement, mais force est de constater que l’enfant terrible d’Hollywood a beaucoup mûri formellement parlant, en témoignent ses dernières œuvres (The Social Network et Millénium) dont le point commun est une précision chirurgicale dans les cadrages et le montage. Une méticulosité déjà présente à ses débuts mais qui irradie de plus en plus l’écran et influence directement le rythme de ses films, qui en bénéficient grandement.

Et Gone Girl ne déroge pas à cette progression, puisqu’il se pose sans nul doute comme étant le film de la maturité pour le cinéaste, conservant une fluidité hors pair tout en restant très tranchant dans les dialogues.
L’œuvre est ludique, jouissive mais dure pour le spectateur.

En effet, le maître du thriller noir ne fait aucune concession en traitant son sujet puisque comme il l’a toujours dit : «l’humain est un être naturellement pervers».
Il s’en donne donc ici à cœur joie pour dépeindre ce monde où l’image publique remporte toujours plus de victoires sur la vérité ; satire des médias, qui se ruent sur l’affaire de la disparition d’Amy comme sur une proie facile qu’il suffira d’achever avec une présentatrice à la langue bien pendue et pas si clichée (il en existe de bien pires encore sur nos chaînes télévisées), mais aussi portrait peu glorieux du mariage...où les pièges sont si nombreux qu’il paraît presque inéluctable d’y tomber, Gone Girl est un film Hitchcockien dans cette vision pessimiste de la réalité mais également dans l’emploi de la blonde bien sous tous rapports dont le visage d’ange suscite autant d’attirance que de méfiance.

A ce titre, Rosamund Pike tient ici le rôle qui devrait marquer un tournant dans sa carrière jusqu’ici bien fade ; l’actrice livre une performance mémorable qui risque de nous hanter un long moment, une prestation sur laquelle il est malheureusement impossible de s’attarder sans gâcher les multiples surprises du film.

Des retournements de situations qui, malgré leur caractère parfois prévisible, sont distillés à la perfection. Fincher a bien saisi que surprendre un spectateur est devenu tellement compliqué de nos jours qu’il vaut mieux tout miser sur l'art de construire et de raconter les rebondissements, qui contribuent alors à relancer le long-métrage dès sa moitié pour ensuite ne plus nous lâcher jusqu’à son terme.

Difficile d’aborder Gone Girl sans parler de son personnage principal, campé par un Ben Affleck qui ne fera pas taire les critiques avec ce rôle puisqu’il s’avère toujours aussi peu expressif et attachant. Pourtant, ce rôle de Monsieur-tout-le-monde lui va comme un gant mais il lui manque cette étincelle dans le regard qu’ont les grands acteurs et il restera dès lors le maillon faible de ce thriller rondement mené par ses partenaires qui ne cessent de lui voler la vedette.
Néanmoins, la place de ce mari paumé dans l’enquête est plutôt intéressante ; tour à tour victime, puis suspect et enfin coupable tout désigné uniquement parce que la pression de l’opinion publique l’emporte et fait plier un système judiciaire à la ramasse, ce personnage reste le vecteur du suspense et sa sœur, magistralement incarnée par Carrie Coon, fera office de conscience, de repère dans ce tourbillon médiatico-judiciaire qui emporterait tout sur son passage sans sa présence. Elle est l’autre figure féminine forte de Gone Girl.

Outre un Affleck un peu juste pour porter le film sur ses épaules, j’ajouterai un léger bémol pour la musique un poil trop présente dans le dernier acte, qui pourrait distraire quelque peu alors qu’elle participait à merveille à l’ambiance claustrophobique de l’œuvre jusque là.

N’y aurait-il donc aucune échappatoire à cet espace confiné qu’est visiblement le mariage ?
Heureusement, David Fincher n’impose pas une vision définitive des choses, il propose là un miroir à peine déformant, nous renvoyant l’image des monstres que nous pourrions être si nous nous laissions dévorer par cette société sur laquelle les apparences et l’hypocrisie règnent. Un miroir impitoyable, grinçant mais juste et au fond…bienveillant.

Parce que vous non plus, vous n’aurez pas envie d’être « ce genre de couple ».
christophe1986
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le 19 déc. 2014

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