Si l'on m'avait proposé Greenland durant une année cinématographique dite "normale", j'aurais feulé comme une panthère longibande furibarde face à un groupe de vils braconniers. Il faut dire que le distributeur du film n'avait vraiment pas mis toutes les chances de son côté: bande-annonce dévoilant des effets spéciaux plus que douteux, affiche certes sympathique mais mettant en avant un producteur de films qui n'ont vraiment, mais alors VRAIMENT aucun rapport avec un film de comète tueuse (la saga John Wick, Le choc des Titans et The Town, cherchez le lien) et finalement un casting plat. Et pourtant ce cher Coronavirus, dans son immense fourberie, s'est permis de donner un bon coup de pied dans les balloches de l'industrie filmique, faisant de Greenland le seul vrai blockbuster à ma portée cet été (bien avant qu'un certain Tenet ait pointé le bout de son nez un peu plus tard). Mais j'ai pu constater avec grand surprise que ce "pays vert", ce produit de studio d'apparence insignifiante, est une oeuvre étrangement actuelle et donc pertinente.


Autant le mentionner tout de suite, ce qui fait la force de Greenland n'est pas le genre auquel il appartient (le genre "catastrophe donc). Si vous voulez voir des cités entières détruites par des astéroides, météores, comètes et autres saloperies rocailleuses, tournez-vous plutôt vers Armagedon ou autre Deep Impact. Greenland utilise la surenchère avec parcimoinie, minimisant au maximum les scènes de destruction massive, probablement une conséquence du budget RIDICULE du film (environ 30 millions de $, pitoyable mais admirable). Le peu d'action permet néanmoins de mieux savourer les scènes où les méchantes pierres tentent d'écraser nos vaillants héros, à l'image d'un Kinder Bueno qu'on s'accorderait une fois par semaine (moins y'a, plus on apprend à apprécier). Les effets spéciaux sont au passage loin d'être aussi médiocres que le budget pourrait laisser penser et les explosions dites "réelles" rendent l'ensemble très crédible. Mais je tiens tout de même à féliciter le réalisateur qui a vainement tenté de me faire croire que le final a été tourné entièrement au Groenland et non pas devant un fond vert dégueulasse.
La destruction n'est donc pas ce qui sauve ce film. Il s'agit davantage d'une roue de secours, une bonne roue de secours. Non le salut de Greenland, c'est le facteur humain. Je ne parle là pas des personnages principaux qui sont des clichés passables (sérieusement le couple divorcé ou qui s'entend mal dans un film catastrophe, ça devient vraiment ridicule). Butler fait plutôt bien son job, mais c'est un peu à l'image d'une feuille de papier: c'est très neutre mais ça rempli bien sa mission. Baccarin est de son côté vraiment passable, allant même jusqu'à être insupportable (la VF n'a pas aidé). Cependant, la progression de ces 2 personnages sans saveur se promener dans un monde chaotique où le voisin de tous les jours peut devenir un psychopathe est plutôt impressionnante et même réaliste. Les moments de tensions et d'émotions fortes sont bien là, et ça fonctionne à merveille.
Ce qui est surtout intéressant avec Greenland, c'est de pouvoir assister à la dégradation de l'humain. Voir comment il se comporte lors d'une situation de fin, lorsqu'il n'y a quasiment plus d'échappatoire. Le film en fait une véritable bête. Le désespoir des personnes normales les poussent à devenir des kidnappeurs ou des tueurs rien que pour pouvoir sauver leur propre peau. Les magasins sont pillés, les autoroutes saturées, les avions abordés, et ça jubile du côté des Eglises. C'est le chaos absolu du côté des humains, et rares sont les films catastrophes à le montrer aussi bien. Et au final, cette situation que vivent nos héros incongrus n'est pas si différente que celle que nous vivons en 2020 (à la différence que les individus de Greenland se battent surtout pour des bracelets et non des rouleaux de PQ). Assister à ça dans une salle obscure avec un masque attaché sur la tronche, ça ne laisse pas indifférent.


Malgré son budget microscopique, ses dialogues cringes à base de crottin de cheval et de kilt écossais, ses personnages plats et son climax composé d'images statiques et de fonds verts moches, Greenland est un divertissement tout à fait sympathique qui m'aura bien étonné. Il n'a certes pas l'étoffe d'un 2012 ou d'un Twister mais a quand même le mérite de tirer son épingle du jeu pendant une période de merde. Pas mal du tout pour un film "catastrophe" !

MonsieurNuss
8
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le 7 oct. 2020

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MonsieurNuss

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