David Gordon Green nous revient donc avec un nouvel Halloween, second opus de la saga entamée en 2018, troisième volet chronologiquement par rapport au premier et douzième film de la franchise (vous suivez ?). La suite de 2018 n'avait pas fait l'unanimité mais avait au moins le mérite de faire repartir la saga sur des bases saines, avec une réalisation plus soignée qu'une grosse majorité de slasher. Les nouvelles fondations posées et le respect de la mythologie clairement affiché, on pouvait décemment espérer que cette suite tenterait de nouvelles choses et ferait avancer la saga vers quelque chose d'un peu plus stimulant. Et...Bon, j'imagine qu'ils ont essayé.


Comme Halloween 2 en son temps, Halloween Kills démarre quelques minutes après la fin du précédent volet, nous faisant directement entrer dans le vif du sujet et poursuivant la nuit d'horreur déjà bien entamée. Alors, quel va être le sujet de ce bien dénommé Kills ?
Eh bien, pas grand chose de consistant, hélas.


En réalité, le film souffre de la nature antagoniste de son script. D'un côté, le film s'affirme avec vigueur comme un épisode de transition ; l'intrigue se contente de prolonger l'action installée par son prédécesseur sans prendre la peine de réintroduire les différents personnages et n'aboutit à aucune conclusion, laissant l'autoroute totalement libre pour le futur volet baptisé Ends.
D'un autre côté, il s'agit d'un épisode extrêmement foisonnant, voir même bordélique ; il y a des flashbacks, du fan-service avec des personnages de l'original, le rôle de Laurie et sa famille, les nombreux meurtres de Michael, le propos sur la contamination du mal, l'histoire de l'acte manqué du flic...
A l'arrivée, cela donne une impression réellement dissonante de voir un film qui essaye de raconter plein de choses et n'aboutit finalement à rien car, de toute manière, tout ceci sera clôturé dans le prochain. Narrativement, le film nous donne ainsi l'impression d'arriver en plein milieu de l'intrigue et c'est hélas cette agaçant ressenti qui domine à la fin ; on est toujours en plein milieu de l'intrigue.


Bref, ce problème de structure pourrait être pardonné si les thématiques abordées étaient intéressantes et novatrices. Malheureusement, l'écriture du film est une catastrophe, empruntant au pire des intrigues outrancières des années 80.


Premièrement, l'idée d'avoir récupéré des actrices du premier film est sans doute une des tentatives les plus ridicules et vaines de fan-service qu'il m'ait été donner de voir ; le premier Halloween est un de mes slashers favoris et je ne ressens aucune excitation à voir revenir ces personnages de seconde zone. A qui ce retour s'adresse-t-il ? Lorsqu'on fait revenir Alan Grant ou Ian Malcolm dans Jurassic World, je comprends évidemment la nostalgie, quand bien même elle est putassière, mais ici, les fans en ont-ils vraiment quelque chose à faire ? Peu probable. Dans le même ordre d'idée, pourquoi encore revenir à la nuit originelle ? Pourquoi rester à ce point accroché au passé ? Difficile de ne pas soupirer face à une saga qui semble constamment avoir le regard vers l'arrière, alors même que le précédent opus affichait déjà une structure très similaire au premier opus.


Deuxièmement, le film lorgne du côté de Stephen King et son ça, faisant de Michael Myers une sorte d'idole du mal qui corromprait lentement mais sûrement la population d'Haddonfield. L'idée n'est pas mauvaise sur le papier, faire de la figure de Myers un nouveau monstre de Frankenstein et le croiser avec une dynamique proche de The Ox-Bow Incident aurait pu renouveler les enjeux. Malheureusement, à l'écran, ce n'est juste pas possible. Outre le jeu très moyen des comédiens, la vitesse à laquelle la population vrille est juste ridicule. De même, comment croire que les gens puissent confondre une seule seconde Michael Myers avec un fou échappé de l'asile qui fait littéralement 1,60m alors que Myers est un géant de 2 mètres ? Le tout est servi par des dialogues souvent pitoyables, la quasi totalité des interactions consistent bêtement à rabâcher les mêmes évidences sur la nature maléfique de Myers.


Et j'en arrive donc au troisième gros point problématique ; le film à beau multiplier les sous-intrigues, il ne dit absolument rien de neuf sur Michael. Pire, il surexplicite ce qu'on savait déjà depuis au moins quarante ans.
Il est hallucinant de voir qu'un film Halloween de 2021 semble n'entrevoir pour son climax rien de plus satisfaisant qu'un monologue expliquant que Myers est invincible et que chaque meurtre le rend plus fort. Waou. Quelle originalité. C'est d'autant plus stupide que Myers est un personnage qui n'a pas besoin de dialogue, il se suffit à lui-même, on voit son corps se déplacer, tuer des gens, et c'est bon, on a compris, c'est pour ça que c'est flippant. Bref, voir 1H40 de slasher pour aboutir à ça est franchement décevant, surtout qu'au final, l'autre parcelle de l'intrigue sur la contamination du mal n'a aucune conclusion.


Bon, le scénario est donc un ratage évident mais n'oublions pas qu'un slasher reste avant tout un divertissement ; le film est-il satisfaisant de ce point de vue ? Bof. Alors certes, Gordon Green n'est pas un tâcheron et il sait parfois façonner des éclairages atmosphériques sympathiques. De même, je mentirais en disant qu'il n'y a pas un ou deux meurtres gores amusants.


Malheureusement, le tout manque souvent d'inventivité, en plus de certaines séquences proches du hors-pistes vis-à-vis de Myers. Savoir que le tueur est increvable est une chose, le montrer démonter une demi-douzaine de pompiers armés sans qu'aucun ne se défendent raisonnablement en est une autre. La scène de meurtre dans la voiture est également symptomatique de ce problème ; on a davantage l'impression de voir des gens stupides qui se défendent très mal que de voir Michael tuer avec savoir-faire. Je ne vais pas ici lister les nombreux choix stupides que les protagonistes opèrent au cours du long-métrage ; il n'empêche qu'ils m'ont régulièrement gâché le plaisir des meurtres et que l'iconisation de Myers en prend un coup.


Je citerais également une scène qui m'a un peu dérangé, en termes de mythologie Halloweenesque. On le sait, le film de John Carpenter est davantage un film de suspens qu'un film gore. Le sentiment horrifique provient plutôt de la méticuleuse observation de Michael que des meurtres en eux-mêmes, souvent simples. Evidemment, cette lente tension et cette simplicité des assassinats ont rapidement laissé la place à du bon gros carnage bien sanglant et ce, dès le second opus de Rick Rosenthal.
Il n'empêche que pour moi, Michael est davantage une force brute qui saisit la bonne occasion pour tuer puis part en quête d'une autre cible plutôt qu'un véritable tueur sadique. Le voir dans Halloween Kills s'acharner à planter une demi-douzaine de couteaux sur un homme déjà mort devant sa bien-aimée égorgée me paraît être une exagération dans la cruauté un peu hors-sujet. Je conçois cependant que ce n'est qu'une considération personnelle.


Tout ceci pour dire que ce Halloween Kills est un petit ratage, trop bâtard dans sa narration pour offrir un prolongement pertinent à la saga et pas assez inspiré et malicieux pour être un bon moment de slasher. C'est une vraie déception pour ma part, j'avais hâte de retrouver Myers pour un nouveau tour de piste.

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le 23 oct. 2021

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