Quelle galère pour trouver ce film. Pourtant j'habite à Strasbourg - OK, c'est pas Paris, mais c'est pas tout petit non plus. Et pourtant, une seule salle le diffuse.
Bref, je me suis rendu à cette séance en en sachant très peu sur le film. Il a été une surprise tout du long, ce qui est d'autant plus appréciable.
OK, alors High-Rise est un film de Ben Wheatley avec Tom Hiddleston (Thor, The Avengers, Only Lovers Left Alive, Crimson Peak...) en tête d'affiche. Il raconte l'histoire du Dr Laing qui emménage dans un appart au 25e étage d'une tour en comprenant 40. Les étages du bas sont réservés aux classes modestes, et plus on monte, plus on trouve des "nantis".
Vous l'aurez sans doute deviné, ce scénario va servir à illustrer la lutte des classes, et d'autres travers de notre société, car la situation ne va pas longtemps rester aussi pépère que dans la petite copro de ta mamie avec le voisin du dessus qui lui apporte le journal tous les matins. Non, non, non.
Il faut avouer que High-Rise arrive à brasser un paquet de thématiques sans que caser telle ou telle critique de nos modes de vie ne semble forcé. Au final, le film parle pêle-mêle de lutte des classes, du capitalisme, du consumérisme, de la place de la femme dans la société, entre autres. Là où c'est encore plus appréciable, c'est que l'on échappe à un manichéisme de bas étage dans lequel il aurait été facile (et idiot) de plonger à grands coups de "Oui mais les riches ils piquent l'argent des pauvres, et les pauvres ils ont froid l'hiver et pas de quoi se payer un édredon".
Petit à petit, les scènes sont de plus en plus fortes, surréalistes, et la dystopie est totale. Les personnages ont des psychologies relativement étudiées et toujours plutôt cohérentes. Cependant, parfois, une petite impression de gratuité vient nous faire un petit pincement au cœur. De plus, le film aurait pu être amputé d'un bon quart d'heure avant la fin, à un moment où la conclusion se fait attendre et où l'on se dit que l'on a déjà bien fait le tour.
Cependant, le film fourmille de bonnes idées de plans, de cadrages et de mise en scène, notamment des utilisations plutôt sympathiques de focales longues / courtes pour donner tantôt une sensation d'étouffement, tantôt de vide et de vertige lorsque l'on aperçoit les tours. Beaucoup de plans ont une réelle symbolique. Parfois, un bel éclairage et une luminosité bien trouvée ajoute, de par les couleurs, les ombres, une dimension supplémentaire.
Un autre point intéressant se trouve dans la bande son, extrêmement hétéroclite mais cohérente dans son ensemble. Le travail est remarquable puisqu'un morceau qui semble tout à fait inapproprié permet tout de même, de par sa mélodie et son décalage, à instaurer un malaise.
Le film distille à merveille cette sensation d'oppression, renforcé par les jeux convaincants des acteurs.
Au final, malgré une fin un peu longue, qui donne parfois une impression de gratuité, High-Rise est un film fort, porteur de sens, piochant allégrement dans différents genres, tantôt burlesque, tantôt stressant, souvent surprenant, et très bien réalisé.
Et je rage.
Je rage de voir qu'entre les Visiteurs 3, un autre Divergente pour plaire au teens avec une dystopie faussement profonde, et un énième film de super héros, dont la suite nous sera probablement injectée directement en intraveineuse par les studios, il y ait de bons films, intéressants et faisant passer un message, comme High-Rise, qui soient si mal diffusés et qui sortent dans le quasi anonymat.
Ne restez pas à la botte des studios qui pensent à votre place, ne consommez pas les conneries que l'on veut vous forcer à aimer. Que ce soit High-Rise ou un autre, que vous ayez aimé ce film ou non, l'essentiel reste de vous faire votre propre cinéma, votre propre sélection, fouinez, cherchez, il y a d'excellents films qui méritent d'être vus mais restent ignorés du public parce qu'on a décidé à votre place que ça n'était pas pour vous.
C'est important. Pour que le cinéma ne devienne pas qu'une collection de block busters interchangeables. Resistez à tout ça. S'il-vous-plait. Résistez.