Depuis une bonne décennie maintenant, le duo formé par Eric Toledano et Olivier Nakache a marqué le paysage cinématographique français notamment grâce au succès immense du film Intouchables. Et dans un sens, quand on cite le duo, c'est nécessairement ce film qui ressort ce qui est logique mais pas forcément justifié car le duo a vraiment une belle filmographie. On peut citer aussi, Le Sens de la Fête, Nos Jours Heureux qui sont deux films particulièrement réussis. Cette décennie a également constitué le cinéma des deux réalisateurs: ils font généralement des comédies très drôle, touchante, parlant de sujet social. Ici, avec Hors Normes, on oublie le côté drôle pour vraiment se concentrer sur le sujet du film: l'autisme.


Pour ne rien cacher, je ne connais pas grand chose au sujet de ce trouble. Je sais qu'il en existe plusieurs degrés, et que certains sont particulièrement dangereux et violent pour nous mais surtout pour la personne atteinte par ce trouble. C'est donc avec aucune idée reçue que j'ai découvert ce film qui m'a vraiment bouleversé: ce film est important. C'est une film qui doit être vu par le plus grand nombre pour vraiment comprendre au mieux le trouble et la manière dont on peut aider les personnes qui sont atteintes de ce trouble au quotidien. J'ai même eu l'impression de voir un documentaire par moment.


Le film ne cherche pas à instrumentaliser les autistes. Il y a une polémique qui court les rues autour de cette idée mais c'est clairement une rumeur ridicule. Bien au contraire, le film ne cherche pas à se cacher derrière l'autisme en dénonçant un ministère de la santé à la rue et un mauvais traitement des cas les plus graves. Le film nous montre l'autisme dans sa pureté la plus riche et la plus dure. Ce qui est vraiment surprenant dans ce film, c'est de voir à quel point le duo ne cache rien. Le film est violent mais pas dans le sens où on l'entend: il touche vraiment au plus profond de l'âme et nous montre des séquences chocs causées par ce trouble. Mais, à côté de ces séquences chocs, le film prend le temps de montrer aussi les progrès, le but des associations et le fait qu'un éducateur fasse avancer un autiste autant que ce dernier le fasse avancer. C'est un échange constant entre deux êtres qui se guident pour mieux faire face au monde réel.


Le film nous montre également l'investissement nécessaire pour pouvoir accompagner ces jeunes. Et pour cela, deux personnages sont particulièrement bien traités: il s'agit du duo d'inspecteur qui doit évaluer l'association et les risques. La force du duo est de parvenir à ne presque jamais mettre les deux inspecteurs dans le même plan que la personne interrogé: par ce procédé, le duo implique directement le spectateur, comme si les personnages joués par Reda Kateb ou Vincent Cassel parlaient directement aux spectateurs et nous mettaient face à une réalité qui fait peur. Car oui, autre point qui est vraiment bien traité dans le film, c'est la peur voir le dégoût que peut éprouver les passants à la vue de certains incidents: pour cela, les 4 gus de la SNCF sont le parfait exemple. Donc, le film implique le spectateur dans le débat autour de la sauvegarde de l'association menée par le personnage joué par Vincent Cassel.


Alors oui, le film reste une fiction et le film a la tendance à attendrir ses personnages pour qu'on s'attache plus facilement à eux. C'est un passage obligé dans sens et c'est ce qui différencie ce film d'un documentaire sur l'autisme. Cette part de fiction permet également de maintenir une tension constante qui anime les personnages du film. Une séquence est particulièrement éprouvante, c'est la séquence qui se déroule dans tout Paris et qui se termine sur le périph: cela montre aussi une certaine évolution dans la mise en scène de Toledano et Nakache qui prennent plus de risque que jamais sur ce film. Des choix ambitieux qui rendent le film vraiment prenant. Au final, c'est comme si le film attrapait le spectateur sans jamais le lâcher.


Hors Normes est donc un film qui va probablement faire parler. Il n'aura pas le succès qu'à pu avoir Intouchables mais, il est pourtant nettement plus important. Le film fait office de témoin fictionnel d'une situation réelle, des associations qui se battent nuit et jour pour aider des jeunes, des moins jeunes à ne pas finir cloîtré entre 4 murs. C'est un film qui fait réfléchir et qui donne envie d'aider son prochain. Fictionnel oui, mais surtout, humain et réaliste.

Bastien_Rae
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le 31 oct. 2019

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Bastien Rae

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