Une dystopie onirique où les dieux égyptiens interviennent sur la destinée humaine

Immortel (Ad Vitam) est un film de science-fiction dystopique français d'Enki Bilal, sorti au cinéma le 24 mars 2004. Le film est l’adaptation de la BD d'Enki Bilal, La Trilogie Nikopol.


Synopsis


L'histoire est censée se situer en 2095, dans un New York futuriste et sinistré, peuplé d'humains normaux et d'autres génétiquement modifiés et de mutants. La ville subit le joug d'une dictature et, telle Metropolis, est divisée en trois zones stratifiées qui ne sont pas censées communiquer entre elles (on retrouve cette opposition de mondes dans le film Upside down).


Les conditions ambiantes dans Central Park ne sont plus compatibles avec la vie d'un mortel et le parc a été déclaré « zone interdite ». Au-dessus du parc stationne une énorme pyramide mystérieuse. À l'intérieur, les dieux égyptiens jugent l'un des leurs, Horus d'Iraknopolis et le condamnent à perdre son immortalité. Comme dernière volonté, il lui est cependant accordé de passer sept jours sur la Terre des Hommes, qu'il a contribué à construire. Horus va mettre ces sept jours à profit pour se donner une descendance, en fécondant une mutante, Jill (Linda Hardy) en investissant le corps d'un humain du nom d'Alcide Nikopol, le héros récurrent d’Enki Bilal, qui est en quelque sorte son alter ego dessiné (interprété dans le film par Thomas Kretschmann).


Au début du film, un groupe de mutants est arrêté, parmi lesquels se trouve Jill. Malgré son apparence anthropomorphe, Jill est une mutante qui possède aussi des écailles bioélectriques sur la tête et des organes internes déformés ; après sa mue, ses cheveux deviennent bleus. Biologiquement , Jill, à qui on donnerait une 20e d’années, est biologiquement très jeune. Elle possède certaines capacités surnaturelles qu'elle ne connaît qu'en partie. Sa condition de mutante en fait un des rares êtres capables qui puisse engendrer la descendance d'Horus.


Jill se soustrait à l'emprise d'Eugenics Corporation, une multinationale pharmaceutique, dirigée par Elma (Charlotte Rampling, toujours aussi inquiétante), violemment contestée pour ses activités et son lobbying. Le principal soutien de la jeune femme est John, qui enclenche le processus de sa naturalisation comme humaine.


Le dieu Horus recherche Jill pour s'accoupler avec elle avant que son immortalité ne lui soit retirée. Pour ce faire, il doit investir un corps masculin qui n’a pas subi les modifications génétiques pratiquées par Eugenics Corp. sur presque toute la population humaine.


Il jette son dévolu sur Nikopol, un détenu politique qui a passé les 30 dernières années de sa vie en apesanteur cryogénique pour s’être opposé au dictateur Choublanc. Il avait été condamné pour avoir pris la tête de la rébellion contre les Aparthéïdes et pour avoir dénoncé la collusion entre Eugenics et le gouverneur mafieux. Horus prend possession du corps de Nikopol pour inséminer Jill.


Lorsque Horus/Nikopol rencontre Jill, ils sont entraînés dans un enchaînement de meurtres et d'intrigues en rapport avec Eugenics. En fin de compte les protagonistes se retrouvent dans le quartier interdit de Central Park. John disparaît et Horus se sépare du corps de Nikopol. Celui-ci est arrêté et finit de purger sa peine, pendant que Jill part à Paris où Nikopol la rejoint une année plus tard. Elle a donné naissance à l'enfant hybride d'Horus, mais elle a perdu tout souvenir de son géniteur.


Mon opinion


Je suis un grand fan des dessins de Bilal et de son univers envoûtant, qui se déroule dans un futur post-apocalyptique où ses héros se battent contre un ordre totalitaire.


Enki Bilal est né en République fédérative socialiste de Yougoslavie, d'un père bosniaque et d'une mère slovaque. Son patronyme, Bilal, est d'origine ottomane. Son père était maître-tailleur et s'occupait personnellement de la garde-robe de Tito, qu'il avait connu dans la résistance et avec qui il avait sympathisé.


Le film est sombre, très sombre, mais il colle parfaitement à l'univers habituel de Bilal. C'est un film qui ne laisse pas indifférent : soit on adore (comme moi), soit on déteste (et hélas, c'est ce qu'a fait une grande partie du public).


Enki Bilal n'a pas eu de chance avec les adaptations de ses livres. Comme le précédent, Tyko Moon, celui-ci été un échec commercial. Mais, même si je n'aime pas tout dans ce film (loin de là !), je suis sensible à l’atmosphère onirique de l'univers d'Enki Bilal. Si l'on sait voir plus loin, on se rend compte que ce film traite avant tout de la liberté, qu'incarne Nikopol, autrement dit Bila lui-même (l'acteur qui en joue le rôle du héros, Thomas Kretschmann, est parfait et je regrette qu'on ne le voie pas davantage), en lutte contre la corruption (dans tous les sens du terme). Je suis très sensible à cela et, pour moi, outre le côté glacé de l'univers « bilalien », c'est le plus important.


Le dieu Horus, lui aussi, est à la recherche de la liberté. Il veut s'affranchir de sa condition de dieu immortel (mais condamné à perdre son immortalité par ses pairs) en se reproduisant, à travers Nikopol. Mais, comme il est un dieu, il n'a aucun sentiment humain et ne voit en l'humain que le véhicule de sa survie. La musique de la BO est magnifique. Elle m'a permis de découvrir un groupe que je ne connaissais pas, Venus et sa chanson "Beautiful days".

Créée

le 7 oct. 2018

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Roland Comte

Écrit par

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