Une jeune femme vit dans l'ombre de son père, star de la voix off de bandes-annonces. Elle va vouloir elle aussi en faire son métier et tenter de décrocher l'offre pour une série de bandes-annonces à la barbe des hommes, dont son père.
Lake Bell est une femme quasiment inconnue en France : quelques seconds rôles dans des comédies, et son fait notable était d'être l'un des personnages principaux de la série How to make it in America.
Pour son premier film, qu'elle a écrit, produit, et qui incarne le rôle principal, elle s'attaque à un sujet très audacieux, inexistant en France ; faire des voix-off pour des bandes annonces.
Pour expliquer le titre du film, je reviens à son créateur, Don Lafontaine. Ce dernier a été le roi américain de la bande-annonce, avec plus de 4 000 voix (!) à son actif, souvent introduites par le fameux "In a world...". Décédé en 2008, il a laissé une trace dans le marketing des films par sa voix grave reconnaissable entre toutes, pourvu qu'on ait déjà vu des bandes-annonces américaines, et par son gimmick qui le rendra incontournable.
Dans le film de Lake Bell, qui est un véritable hommage à Lafontaine (où on le voit en archives au début), la bataille pour décrocher la voix-off de cette bande-annonce d'une saga d'héroic-fantasy à tendance féministe doit commencer par "In a world...". Or, cette expression appartenait en quelque sorte à Don Lafontaine, mais le studio qui veut décrocher la voix désire réintroduire ce gimmick qui sonne comme un trophée chez ces artisans de la voix off. Il y a là une symbolique que je trouve touchante, comme pour récupérer un passage du flambeau.
Bien que le sujet soit sensiblement américain (un tél métier n'existe pas en France, et il est différent des comédiens de doublage), le film reste dans le domaine du didactique à travers les aventures de cette jeune femme, très bien jouée par Lake Bell, dont on sent qu'elle choisit cette voie (au départ, elle est coach vocale) pour s'affranchir de son père, un peu sexiste et égocentrique sur les bords. Ensuite, ce geste aura une portée bien plus grande, du domaine du féminisme.
Les personnages du film paraissent tous sympathiques, y compris ce père qui fait emménager chez lui sa copine plus jeune que sa propre fille, un concurrent de la voix off assez marrant avec son slip, et un directeur de casting qui a le casting pour Lake Bell, mais qui est très timide devant elle, sauf au travail.
On y voit aussi comment se préparent ces voix-off, avec les gens qui se chauffent la voix ou qui font des exercices avec leur langue avant de commencer, et on voit que c'est un instrument de travail dont ils savent que le moindre éraillement peut être fatal, car c'est un métier avec très peu de place disponible (ça se compte sur les doigts d'une main).
Le film propose aussi quelques caméo ; Eva Longoria avec un bouchon dans la bouche (il faudra voir le film pour en savoir plus), Cameron Diaz (là, il vous faut des yeux d'aigle car ça dure une seconde), et surtout Geena Davis qui est quelque sorte le personnage représentant la conclusion de l'histoire.
Même si il n'est pas parfait (bien que Lake Bell soit très belle, elle prend beaucoup de place devant la caméra), In a world reste une très belle découverte sur un métier totalement inconnu à mes yeux dans le cinéma, et une révélation qui vient de naitre.
A noter que si le film a connu un gros succès critique (en plus d'un prix à Sundance), le sujet du film l'a empêché d'avoir une sortie salles et dvd en France, le condamnant à la V.O.D.