En dépit d’une Diane Kruger en état de grâce dans un rôle en or, In the Fade laisse perplexe face à une morale douteuse.


Présenté à Cannes dans un contexte compliqué (avec les attentats à Manchester et en Egypte), In the Fade aborde la question du terrorisme sous l’angle des familles de victimes. Là, en l’occurrence, Katja, qui perd son mari et son fils dans un attentat à la bombe dans le quartier turc d’Hambourg. Un sujet délicat inspiré d’attentats commis contre des immigrés, en Allemagne, entre 2000 et 2007, par le groupe néo-nazi de la NSU. Si avec ce film, Fatih Akin, réalisateur germano-turque de Head-On, The Cut ou encore De l’autre côté, offre à son actrice principale, Diane Kruger, un rôle en or, et se montre capable de moments parfois grandioses, il perd malheureusement pied sur la durée, jusqu’à un final moralement très contestable.


In the FaceIn the Fade se construit en trois actes distincts, qui permettent également au réalisateur d’aborder trois genres du cinéma ; le drame, le film de procès et le film de vengeance. Une approche intéressante, mais qui trouve vite ses limites. Dans la première, Fatih Akin touche à la perfection pour faire vivre la terrible tragédie vécue par Katja – tout en y distillant des détails qui auront leur utilité par la suite. Sous une pluie qui n’en finit plus, Diane Kruger, absolument sensationnelle, se morfond petit à petit. L’actrice réalise là une de ses meilleures performances, déchirante et criante de vérité tandis qu’elle hurle sa douleur, avant de l’intérioriser, et tentant par divers moyens de la stopper.


Excellent jusque-là, In the Fade enchaîne par la suite les maladresses, notamment dans la mise en scène parfois trop appuyée de Fatih Akin – cette image très symbolique de Kruger dans son bain. Et passé une partie autour du procès, en soi pas inintéressante – Akin pointant du doigt les limites de la justice -, mais tout de même assez plate, In the Fade perd toute crédibilité à l’amorce du dernier acte, autour de la vengeance. Tombant dans la facilité scénaristique, avant un final extrêmement dérangeant, par lequel, malheureusement, tout le film bascule. Ou comment Akin semble dire que les pires horreurs vécues, pourraient faire de qui que ce soit un meurtrier potentiel. Une vision presque irresponsable de la part du réalisateur qui rend ainsi schizophrène face à un film qu’on voudrait tant saluer pour son actrice, mais qu’on ne peut cautionner sur son message.


Par Pierre Siclier pour Le Blog du Cinéma

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le 5 juin 2017

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