Damn right, I've got the blues !
C'est drôle, il semble que c'est parce qu'il s'agit de l'oeuvre la plus mature du chien fou qu'est Tarantino que beaucoup de ses fans le considèrent comme le bébé un peu relou et trouble-fête du cinéaste. Il n'en est rien. Si, en effet, Jackie Brown est certainement le film où le réalisateur apporte le plus d'épaisseur à ses personnages et le plus d'enjeux (si on excepte Reservoir Dogs), c'est aussi un pur objet de plaisir, funky, hymne à la blaxploitation. Véritable chasse au trésor jouissive, emportée par une bande-originale délicieuse et terriblement cool, où tout le monde trompe tout le monde, devenant ainsi un jeu de masques - encore une fois, comme Reservoir Dogs, jubilatoire, donc le plaisir où Tarantino excelle le plus. Mais au-delà de l'aspect "jouissif de l'instant", le film possède une romance et une nostalgie magnifiques, un chassé-croisé amoureux entre Pam Grier et Robert Forster, grandioses, qui, malgré eux, n'ont plus vingt ans. Quant à cela s'ajoutent la tchatche super cool de Samuel L. Jackson, la ringardise maintenant très symbolique de Robert De Niro, et l'enivrement musicale des Delfonics, il ne reste plus qu'à se taire et à se délecter de chaque instant, car le cinéaste, même si il offre toujours d'excellents films, ne semble plus vouloir revenir à ce style trompeusement classique, en parfait représentant du film noir à l'époque contemporaine.