Jessie
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Jessie

Film de Mike Flanagan (2017)

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Hop, c'est reparti pour la mode des adaptations de Stephen King. Ou peut-être que ça ne s'est jamais arrêté? En tout cas, entre nombre de séries et films (en vue d'exploitation cinématographique ou pas) qui foisonnent de toutes parts, l'auteur semble dans un nouvel âge d'or d'adaptations en tous genres. Âge d'or restant un grand terme sujet à guillemets tant la qualité des œuvres proposées varient de l'excellent au purement médiocre (avec une fâcheuse tendance à frôler trop souvent la seconde catégorie).


Il est vrai que quand on cite aux non-aguerris le nom de Stephen King et son rapport visuel, on a plus souvent tendance à s'entendre nommer "Dreamcatcher" que "Les évadés". Une réputation foutrement solide donc, qui colle à la peau de l'auteur comme la tendance à l'identifier immédiatement dans le genre horrifique là où pourtant ses facettes sont bien plus nombreuses. Preuve en est avec ce Gerald's Game, thriller psychologique où l'horreur ne réside que dans la situation, et moins dans le fond.


En constatant également 1922, nouvelle pourtant assez banale en l'état, qui vient de voir apparaître son adaptation sur la plate-forme Netflix, on se dit que la jeune multinationale tente d'attirer ses productions vers des travaux moins connus et moins habituels de ce à quoi le public est habitué quand on lui cite King. Encore faut-il que la qualité suive. Si 1922 ne brille que par la reproduction assez exacte d'une oeuvre de toute façon trop fade pour susciter un réel intérêt, Gerald's Game est dans un entre-deux traître à souhait.


On ne saurait lui reprocher sa photographie impeccable, sa direction d'acteurs au poil de haut de cuisse, des plans joliment fichus, et une volonté d'esthétisme qui a employé des techniciens hors-pair. Sauf que face à une histoire qui est censée être une plongée dans le viscéral, trop de tout ce qui est cité plus haut rend le tout excessivement lisse. On reste très indifférent des situations parce qu'on ne fait que nous les montrer en surface, et le ressenti reste trop éloigné de toute l'empathie que l'on pourrait ressentir pour Jessie, cette pauvre muse condamnée à vivre ses névroses et les affronter pour survivre.


Et c'est bien dommage, parce que lorsque l'on connait le style de Stephen King, capable en une tournure de phrase de nous donner la nausée des heures entières, le fait de rester de marbre devant les déviances qui nous sont contées est un but difficilement atteint. Si l'on s'en tient aux faits, l'histoire de Gerald's Game est une histoire intense, au final plus commune que l'on ne le pense, qui nous fait réfléchir sur nombre de nos rapports à énormément de principes de vie. Et ici, on ne récupère qu'un seul enjeu, savoir si l'héroïne va s'en sortir, sans jamais réfléchir à ce que l'on nous raconte, nous imaginer en victime ou en tyran, se dire dans quelles proportions cela peut nous arriver, bref, ce qui aurait du réellement se passer. Surtout quand une partie du message fait écho à beaucoup de situations actuelles, un encouragement à parler de ses bourreaux et ne pas considérer qu'être une victime fait de nous une personne complice.... Un message plus qu'important, que le film lui-même, malgré un dénouement pour le coup bien lourd et dispensable, relaie à la seconde zone, nous rappelant bien que tout ce qui compte, c'est de savoir si oui ou non, Jessie va se détacher de son lit et sortir de sa baraque. Plus d'images, on nous laisse dans le concret.


Du coup, sujet de base : dans quelle catégorie peut-on ranger Gerald's Game ? Moins honteux que nombre d'adaptations putassières que l'on a subi au fil des années, ça reste quand même assez moyen, en surface voire juste mauvais tant trois jours après, on a tout simplement oublié ce qu'on a vu. De la grosse consommation d'image sans recul. Un pur produit Netflix, donc ?

ThierryDepinsun
4
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le 12 nov. 2017

Critique lue 1.4K fois

2 j'aime

ThierryDepinsun

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