Coqueluche d'un nouveau cinéma comique décomplexé, Taika Waititi ne m'a pas encore convaincu. Ses Vampires en toute intimité n'avaient pas vraiment de récit soutenu, Thor Ragnarok a lui aussi un acte II en bois... Et même s'il me fait rire de temps en temps, il lui manque pour l'instant la marque des grands auteurs : un scénario soigné.


Avec Jojo Rabbit il entend augmenter son game, car il adapte un bouquin et va se l'approprier de la façon la plus percutante : c'est lui qui joue Adolf, ami imaginaire de Jojo, calqué sur le célèbre Homme d'État.


L'humour singulier qui l'a fait connaitre est au rendez-vous, mais ce film marquera plus les mémoires pour ses scènes émouvantes. Tous les segments de "découverte de l'autre" entre Roman Griffin Davis et la brillante Thomasin McKenzie ( Leave no Trace ) font preuve d'une grande subtilité et de retenue.


La scène où Scarlet Johansson imite le père de Jojo, également, alors qu'elle a pour point de départ une sorte de caricature. C'est très bien fait.




La découverte tétanisante de ses souliers pour montrer son funeste destin restera assurément un des grands chocs de l'année.




Mais à côté de ça, Taika laisse libre court à du grand-guignol sans commune mesure, qui vient étouffer ce qu'il y avait de plus précieux dans son film. Par exemple, la raison pour laquelle Sam Rockwell décide de taire le secret de Jojo auprès de la Gestapo est intelligente, menée avec humour ( son dessin de costume est hilarant... ) mais alors pourquoi le mettre en scène dans un costume qui n'est ni le costume de son dessin ni un costume qu'on porte à la guerre ? Le public avait parfaitement compris, c'était plus la peine d'en remettre une couche...


Voilà le genre de détails qui retiennent Jojo Rabbit de briller.


Egalement, un problème de scénario m'a turlupiné toute la projection. Quand dans un film le héros n'a pas un but-personnel partagé par le spectateur, il lui faut un but-destination valable. Or le but-destination il est évident depuis la première minute : Jojo doit se débarrasser du décorum Nazi, et devenir un homme, un vrai. En revanche il n'a pas de but-personnel qui soit franchement suivi.


Il commence par vouloir être le parfait petit Nazi. Bon bah c'est fait dès l'intro... Alors un obstacle ; il se fait sauter une grenade à la gueule, mais sa volonté d'être un parfait petit Nazi n'est pas entachée du coup ça n'est qu'un obstacle cosmétique... Alors il se dit qu'il peut écrire un livre sur les Juifs, mais là, pareil, il n'y a pas d'obstacle particulier, ça n'est qu'un but-personnel de circonstances...


Je suis persuadé que s'il y avait dans le scénario un but-personnel mieux défini et beaucoup plus en contradiction avec son but-destination, tout l'acte II en aurait été grandit.
Cependant ça reste du bel ouvrage, offrant de solides performances et de bons gags.

mikeopuvty
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le 16 mars 2020

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Mike Öpuvty

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