La note minimale s'impose quand l'effort est lui-même minimal et qu'on essaye de le cacher. Ce qui est désarmant face à ce film est que tout dans le propos et dans la construction en font une sorte de cache-misère d'une psychologie paresseuse. Celle des réalisateurs, mais qui ne sont qu'un certain reflet de leur temps.
Outre le fait que tout est à l'avenant dans le film, du jeu des acteurs à la façon de filmer les scènes d'action (parmi les moins engageantes de l'histoire tant elles sont distanciées du spectateur), ce qui saute aux yeux c'est le mythe de fond qui sous-tend l'histoire : le mythe du mérite et de l'intégrité érigé en masque de la réalité sociale.
J'explique : dans une Amérique contemporaine, ce qui compte c'est d'être méritant, même si on ne fait que laver des chiottes. Il faut le faire bien, et honnêtement. Il ne faut pas rêver d'une vie plus grande, ce serait rentrer dans le jeu des politiques de ce monde qui nous sont aliénés, et finissent par nous aliéner nous-même. Ainsi la fiction est-elle instrumentalisée pour mettre en scène des relations stéréotypiques de personnes dont les motivations reprennent l'ABC de la psychologie tragique : altruiste, égoïste ? Loyal, traître ? Mmmmh, que de tension ! Ce nœud de relations sans intérêt est lui-même le lieu d'un discours sur les valeurs fondamentales qu'il faut avoir pour être heureux et conserver l'ordre social.
Ainsi, le film fait le jeu de la domination en nous montrant qu'être exploité, c'est être juste et vrai. Et que ces valeurs seules seront la cause de la chute des pourris au pouvoir. Les luttes sociales ou politiques n'ont aucun intérêt.
Oui oui, vous allez crier à la sur-analyse tout ça tout ça, mais dans le fond le film est une espèce de gros mollard de propagande qui veut imprimer la psychologie du spectateur à son image. Celle d'une disposition à accepter l'ordre des choses en se reportant sur la satisfaction du dominé d'avoir des valeurs, et la croyance que ces valeurs seules seront son salut, ce que toute l'histoire des progrès sociaux, y compris aux USA, contredit.
Et en plus c'est terriblement chiant comme film.