Le vrai casting de Cléopâtre est celui de Black Panther?...

...car "l’Égypte antique était peuplée d’Africains noirs".
Ce documentaire sur TV 5 Monde me fait découvrir un passionnant intellectuel contesté par ses pairs à l'époque puis saboté et sous-payé, si j'ai bien compris.
Cet auteur est déjà sur la base de données de SC: Cheikh Anta Diop
Il faut s'accrocher car le son n'est pas toujours très bon.
...égyptologue, chimiste, essayiste, engagé
"Les Egyptiens étaient noirs".
Je regarderai plus Cléopâtre de la même manière...ni Black Panther
Passionné d'étude au carbone 14: à l'origine de l'installation de labo CNRS au Sénégal et en France.



"A la fois physicien, paléontologue, historien, anthropologue, historien et linguiste, le savant sénégalais a démontré que l'Afrique était bien la première civilisation au monde. Un point de vue qui lui a valu de vives critiques en Occident et en Afrique".
(selon L'égyptologue congolais Théophile Obenga,un des derniers disciples de Cheikh Anta Diop).



Fondateur ou Parrain de labo de Dakar?:



"L'idée de créer le laboratoire, c'est lui qui l'a eu; cette spécialisation qu'il avait faite dans le domaine du nucléaire au laboratoire de Joliot Curie dans les années 50; il a pu la mettre à profit pour concrétiser cette idée là; il en a fait les plans et en à assurer la construction sur place à Dakar
et il y a eu ensuite une commission d'homologation de l'installation au niveau international"
dit son fils dans le doc son fils ainé Cheikh Mbacké Diop
mais le site du labo qui porte son nom "I.F.A.N CHEIKH ANTA DIOP" ne parle que de "Parrain"
(désormais "CEA CNRS UVSQ désormais LSCE laboratoires des sciences du climat et de l'environnement https://www.ovsq.uvsq.fr/lsce-1 )



RFI le dit mieux que moi (texte par Sabine Cessou):



"" Le cinéaste sénégalais Ousmane William Mbaye a réalisé Kemtiyu, un documentaire sur Cheikh Anta Diop, l’auteur du célèbre "Nations nègres et culture".
Le film a été projeté à l’université de Dakar, qui porte le nom de ce savant qui a marqué son époque, de 1923 à 1986, mais qui reste méconnu.
Produit avec le soutien de TV5 Monde, Kemtiyu a été traduit en 30 langues.
Intitulé Kemtiyu (ou « Négritie, pays des Noirs », le nom que les Egyptiens se donnaient dans l’Antiquité), ce documentaire de 90 minutes retrace avec force documents le parcours de Cheikh Anta Diop, érudit sénégalais.
Fort en maths, en philo, en chimie, en linguistique et en égyptologie, il a été le premier à avoir traduit les mathématiques en wolof, la langue nationale du Sénégal.
Il a aussi été un opposant à Léopold Sédar Senghor, sous la présidence duquel il a été marginalisé.
Photos de jeunesse et de famille, entretiens avec des proches au Sénégal, en France et aux Etats-Unis, bande-son très inspirée du jazzman américain Randy Weston.
Le réalisateur Ousmane William Mbaye s’est lancé dans un travail sur la mémoire.
Il a signé de nombreux documentaires sur des figures du passé, dont l’avant-dernier, Président Dia, en 2013, traite du parcours de Mamadou Dia, ancien président du Conseil et bras droit de Senghor, accusé de coup d’Etat en 1962 et ...envoyé au bagne.
Avec cette nouvelle œuvre sur une autre figure de l’histoire du Sénégal, il livre un document passionnant et précieux. D’autant que beaucoup se réclament de Cheikh Anta Diop dans le monde noir sans forcément l’avoir lu ni compris".
(texte de Sabine Cessou sur RFI.)



Comme c'est la mode, je copie la plupart du reste de 'mon' texte, chronologie et infos dans les sites suivants:
__celui de L’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN) https://ifan.ucad.sn/index.php/9-uncategorised/262-le-parrain-de-l-ifan )
puis http://www.cheikhantadiop.net/cheikh_anta_diop_biograph.htm
et https://www.rfi.fr/fr/hebdo/20160527-cinema-television-senegal-kemtiyu-documentaire-oeuvre-cheikh-anta-diop-senghor ...



« Je me suis rendu compte que nombre de jeunes Africains le citent mais ne le connaissent pas, explique Ousmane William Mbaye. Cela m’a paru pertinent de revenir sur cet homme qui a brassé tellement de connaissances durant sa vie à un moment où on l’oublie. Faire son portrait m’a semblé nécessaire, pour donner envie à la jeunesse africaine d’aller mieux fouiller son œuvre ».



Une part des « afrocentristes » américains le vénèrent pour avoir rappelé, preuves scientifiques à l’appui, que l’Afrique est le berceau de l’humanité et que la civilisation égyptienne des Pharaons était Nègre. Ils verront sa femme, Louise Marie Diop Maes, une Française (motif de déception chez certains Africains-Américains radicaux), disparue le 4 mars 2016, le dernier jour du mixage du film, revenir sur le passé.
Plus préoccupée par l’œuvre que par la vie personnelle de son époux, elle se souvient (dans le film) de leurs années quarante au Quartier latin, près de la Sorbonne. « Je l’ai rencontré dehors, il m’a demandé un renseignement. On s’est revus par hasard, ce n’est pas plus compliqué que ça ! Finalement, on a décidé de se marier ».


Le film a été réalisé avec le soutien et la complicité des fils de Cheikh Anta Diop qui ont ouvert les archives familiales. D’anciens copains de faculté témoignent avec émotion : « Je n’ai jamais rencontré quelqu’un d’aussi ouvert, d’aussi joyeux, d’aussi fort et d’aussi intelligent », affirme l’ami chimiste Edouard Edelmann (mort depuis le 22/03/20).


« Un esprit extraordinairement rebelle: »
Boubacar Boris Diop, intellectuel sénégalais, rappelle que Cheikh Anta Diop, « un esprit extraordinairement rebelle », a non seulement écrit les mathématiques en wolof, mais aussi inventé l’alphabet du wolof et ceux d’autres langues africaines.



« A l’époque, il s’agissait de parler latin ou grec ! Césaire avait évoqué les élites africaines décérébrées, mais le cerveau de Cheikh Anta Diop est resté intact du premier au dernier jour ! ».



En 1960, il soutient sa thèse à la Sorbonne, avant de rentrer définitivement au Sénégal, tout juste indépendant. Le jury de thèse français mentionne que le contenu de son travail ne doit pas faire l’objet d’un enseignement dans les colonies...


Cheikh Anta Diop va payer le prix de sa droiture intellectuelle, qui l’incite à écharper les « théoriciens de salon du colonialisme, les ethnologues ».
Soutenu par Théodore Monod à l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) à Dakar, il monte son laboratoire de datation au carbone 14, se contente d’un salaire deux fois moins important que celui d’un assistant à la faculté, où il n’est pas invité à enseigner, et s’engage en politique « par devoir, explique sa femme. Son œuvre a posé les fondements d’un futur Etat fédéral d’Afrique noire, en 1960, rappelle-t-elle. C’est un programme, il suffit de le prendre et de l’appliquer ».


Le documentaire retrace le parcours d’un homme intègre, refusant les postes ministériels et la moindre compromission avec le pouvoir, se faisant arrêter à Djourbel dans le berceau du mouridisme (en très gros, mouvement de 'gentils' musulmans en mode bouddhiste...si j'ai bien compris)
Djourbel où il a grandi.
Il a fondé son parti dans la clandestinité en 1976, le Rassemblement national démocratique (RND), poussant Senghor à accepter le pluripartisme et à passer la main en 1981.


Dans le même temps, il est sollicité par Amadou Makhtar Mbow, directeur général de l’Unesco de 1974 à 1987, pour l’écriture de l’Histoire générale de l’Afrique, vaste entreprise lancée en 1964 pour « remédier à l’ignorance généralisée sur le passé de l’Afrique », selon l’agence onusienne. Avant toute chose, il demande la tenue d’un colloque international au Caire, qui se tient du 28 janvier au 3 février 1974, pour confronter ses idées à celles des égyptologues occidentaux, bien obligés de reconnaître la justesse de sa thèse : l’Egypte est africaine.


En donnant un contrepoint critique d’un universitaire français qui estime que Diop a « amené de la race dans la science », le film fait œuvre d’utilité publique. Il comble une lacune et remet d’équerre un pan essentiel de la mémoire du Sénégal.
(merci Sabine Cessou sur RFI)


En 1951, l’Anthropologue prépare sous la direction de Marcel Griaule une thèse de doctorat à l’Université de Paris, dans laquelle il affirme que l’Égypte antique était peuplée d’Africains noirs, et que la langue et la culture égyptiennes se sont ensuite diffusées dans l’Afrique de l’Ouest, qu’il parvient à obtenir en 1960.
Il poursuit dans le même temps une spécialisation en physique nucléaire au laboratoire de chimie nucléaire du Collège de France.
Son interprétation de données d’ordre anthropologique (comme le rôle du matriarcat) et archéologique l’amène à conclure que la culture égyptienne est une culture nègre.
Sur le plan linguistique, il considère en particulier que le wolof, parlé aujourd’hui en Afrique occidentale, est phonétiquement apparenté à la langue égyptienne antique.


Re-migration:
Lorsqu’il obtient son doctorat en 1960, il revient au Sénégal enseigner comme maître de conférences à l’université de Dakar (depuis rebaptisée université Cheikh-Anta-Diop, UCAD).
Il y obtiendra en 1981 le titre de professeur.
Mais dès 1966, il crée au sein de cette université de Dakar le premier laboratoire africain de datation des fossiles archéologiques au radiocarbone, en collaboration avec celui du Commissariat français à l’énergie atomique (CEA) de Gif-sur-Yvette.
Dans les années 1970, Diop participe au comité scientifique international qui dirige, dans le cadre de l’UNESCO, l’élaboration de l’Histoire générale de l’Afrique (HGA), un projet éditorial ambitieux qui comptera huit volumes. Pour la rédaction de cet ouvrage, il participe en 1974 au Colloque international du Caire où il confronte les méthodes et résultats de ses recherches avec ceux des principaux spécialistes mondiaux. À la suite de ce colloque international, Diop rédige un chapitre sur « L’origine des anciens Égyptiens ».


Par ailleurs, dès 1947, Diop s’est engagé politiquement en faveur de l’indépendance des pays africains et de la constitution d’un État fédéral en Afrique.
Jusqu’en 1960, il lutte pour l’indépendance de l’Afrique et du Sénégal et contribue à la politisation de nombreux intellectuels africains en France. Entre 1950 et 1953, il est secrétaire général des étudiants du Rassemblement démocratique africain (RDA)



et dénonce très tôt, à travers un article paru dans La Voix de l’Afrique noire, l’Union française, qui, « quel que soit l’angle sous lequel on l’envisage, apparaît comme défavorable aux intérêts des Africains »



Poursuivant la lutte sur un plan plus culturel, il participe aux différents congrès des artistes et écrivains noirs et, en 1960, il publie ce qui va devenir sa plate-forme politique : Les fondements économiques et culturels d’un futur État fédéral en Afrique noire.
Selon Doué Gnonsoa, Diop sera l’un des principaux instigateurs de la démocratisation du débat politique au Sénégal, où il animera l’opposition institutionnelle au régime de Léopold Sédar Senghor, à travers la création de partis politiques (le FNS en 1961, le RND en 1976), d’un journal d’opposition (Siggi, renommé par la suite Taxaw) et d’un syndicat de paysans.
Sa confrontation, au Sénégal, avec le chantre de la négritude serait l’un des épisodes intellectuels et politiques les plus marquants de l’histoire contemporaine de l’Afrique noire.
Cheikh Anta Diop décède le 7 février 1986, à son domicile de Fann, quartier situé non loin de l’Université de Dakar qui aujourd’hui porte son nom.
Il laisse inachevé un travail, publié aux Éditions Présence Africaine sous le titre 'Nouvelles recherches sur l’égyptien ancien et les langues négro-africaines modernes'.
Le 8 février 2008, le ministre de la Culture du Sénégal Mame Biram Diouf inaugure un mausolée perpétuant la mémoire du chercheur à Caytou, son village natal où il repose.
Il repose, selon sa volonté, auprès de son grand-père (le Grand) Massamba Sassoum Diop, fondateur du village.
Ce mausolée figure sur la liste des sites et monuments classés du Sénégal.


Cheikh Anta Diop épousera en 1953, à Paris, une Française, Louise Marie Maes, diplômée d'Études supérieures en Histoire et Géographie.
Quatre fils naîtront de cette union.


Au lycée, je jouais à Doom:
Lui, "durant ces années passées au lycée, il élabore un alphabet conçu pour transcrire toute langue africaine" et il entreprend également la rédaction d'une histoire du Sénégal.
1946 : Arrivée à Paris au cours de l'année 1946. Il s'inscrit en classe de Mathématiques Supérieures, son but étant de devenir ingénieur en aéronautique. En attente de la rentrée de l'année 1946-1947, il s'inscrit en Faculté des Lettres de la Sorbonne en philosophie.


Il suit, en particulier, l'enseignement de Gaston Bachelard.


A son initiative est créée l'Association des Étudiants Africains de Paris


1947 : Cheikh Anta Diop poursuit, parallèlement à ses études, ses recherches linguistiques sur le wolof et le sérère, langues parlées au Sénégal.
Il entre en relation avec Henri Lhote (le découvreur des fresques du Tassili, au Sahara (je suis à droite) ).


1948 : Il achève sa licence de philosophie et s'inscrit en Faculté des Sciences.
Il publie sa première étude de linguistique, Étude linguistique ouolove – Origine de la langue et de la race valaf, dans la revue "Présence Africaine" créée par l'homme de culture Alioune Diop en 1947, qui fondera la maison d'édition Présence Africaine puis la Société Africaine de Culture (SAC). La même année, Cheikh Anta Diop publie, dans un numéro spécial de la revue "Le Musée Vivant", un article intitulé 'Quand pourra-t-on parler d'une renaissance africaine ?' en partie consacré à la question de l'utilisation et du développement des langues africaines, et dans lequel Cheikh Anta Diop propose pour la première fois de bâtir les humanités africaines à partir de l'Égypte ancienne.


1949 : Il fait inscrire sur les registres de la Sorbonne le sujet de thèse de doctorat ès-Lettres qu'il se propose de traiter, sous la direction du professeur Gaston Bachelard, et qui s'intitule "L'avenir culturel de la pensée africaine".


1950 : Il obtient les deux certificats de chimie : chimie générale et chimie appliquée.
Il prend la décision d'intégrer en juillet 1950 le RDA (Rassemblement Démocratique Africain) alors dirigé par Félix Houphouët-Boigny, tout en rappelant fermement à la direction du RDA son devoir de ne pas faillir à sa mission historique : celle d'une véritable libération du continent africain.


Retour au Sénégal pendant l'hivernage (juillet-août) de l'année 1950. Il donne, à Dakar et Saint-Louis, plusieurs conférences dont la presse se fait l'écho :
— "Un enseignement est-il possible en Afrique dans la langue maternelle ?",
— "Nécessité et possibilité d'un enseignement dans la langue maternelle en Afrique",
— "Les fondements culturels d'une civilisation africaine moderne".
Au cours de ce même séjour, il propose, avec des notables, dans une lettre adressée aux autorités de l'AOF (Afrique Occidentale Française), un plan de reboisement du pays afin de faire face au danger de la sécheresse.


1951 : Inscription sur les registres de la faculté de son sujet de thèse secondaire "Qu'étaient les Égyptiens prédynastiques", sous la direction du professeur Marcel Griaule.
Il devient le secrétaire général de l'Association des Étudiants du RDA (AERDA), à Paris.
Il donne plusieurs conférences :
— "L'origine du wolof et du peuple qui parle cette langue", organisée à Paris au Musée de l'Homme par la Société des Africanistes, dont le secrétaire général est à l'époque Marcel Griaule.
— "Les fondements culturels d'une civilisation africaine moderne", organisée par l'Association des Étudiants africains de Paris,
— "Objectifs d'une politique africaine efficiente", également organisée par l'Association des Étudiants africains de Paris.
Il organise, dans le cadre de l'AERDA, le premier congrès panafricain politique d'étudiants d'après-guerre, du 4 au 8 juillet 1951. La WASU (West African Student Union) participe à ce congrès.


1952 : C'est dans le bulletin mensuel de l'AERDA, "La Voix de l'Afrique noire" de février 1952, dans un article intitulé "Vers une idéologie politique africaine", que Cheikh Anta Diop pose pour la première fois en Afrique francophone, sous leurs multiples aspects, culturels, économiques, sociaux, etc., les principes de l'indépendance nationale et de la constitution d'une fédération d'États démocratiques africains, à l'échelle continentale...


1953 : Dans le bulletin mensuel de l'AERDA, "La Voix de l'Afrique noire" de mai-juin 1953, il publie l'article "La lutte en Afrique noire". Il quitte le secrétariat général de l'AERDA.


1954 : Nations nègres et Culture — De l'antiquité nègre égyptienne aux problèmes culturels de l'Afrique noire d'aujourd'hui paraît aux Éditions Présence Africaine. Ce livre est en fait le texte des thèses principale et secondaire destinées à être soutenues en Sorbonne en vue de l'obtention du doctorat d'État ès Lettres ; mais aucun jury ne put être formé.
A propos de cette œuvre maîtresse de Cheikh Anta Diop,



Aimé Césaire écrit : "… Nations nègres et Culture — [livre] le plus audacieux qu'un Nègre ait jusqu'ici écrit et qui comptera à n'en pas douter dans le réveil de l'Afrique" (Discours sur le Colonialisme, Paris, Présence Africaine, 1955).



1956 : Il se réinscrit en thèse d'État avec comme nouveau sujet principal "Les domaines du matriarcat et du patriarcat dans l'antiquité".


A partir de 1956 il enseigne la physique et la chimie aux lycées Voltaire et Claude Bernard, à Paris en tant que maître-auxiliaire.
Parution dans la revue "Présence Africaine" de l'article Alerte sous les Tropiques, texte qui préfigure son futur livre-programme : Les fondements culturels, techniques et industriels d'un futur État fédéral d'Afrique noire (1960).
Cheikh Anta Diop donne une conférence sur le thème : "Les origines nègres de la civilisation égyptienne", organisée par Présence Africaine, Salle des Sociétés Savantes, à Paris.
Il participe au premier Congrès des Écrivains et Artistes noirs qui se déroule à la Sorbonne, à Paris. Il y apporte la contribution intitulée : Apports et perspectives culturels de l'Afrique qui paraît dans un numéro spécial de la revue "Présence Africaine".
Débat contradictoire avec l'égyptologue français Jean Sainte-Fare Garnot


1957 : Inscription sur les registres de la faculté de son sujet de thèse complémentaire : "Étude comparée des systèmes politiques et sociaux de l'Europe et de l'Afrique, de l'Antiquité à la formation des États modernes".
Il entreprend une spécialisation en physique nucléaire au Laboratoire de chimie nucléaire du Collège de France dirigé par Frédéric Joliot-Curie puis à l'Institut Pierre et Marie Curie, à Paris. Cheikh Anta Diop nourrissait une admiration toute particulière à l'égard du grand physicien français Frédéric Joliot-Curie avec lequel il est entré en contact pour la première fois en 1953.


1959 : à Rome, il participe au second Congrès des Écrivains et Artistes noirs. Il y fait une communication portant sur L'Unité culturelle africaine qui paraît dans un numéro spécial de la revue "Présence Africaine".
"Y a-t-il une unité culturelle de l'Afrique noire ?", est une conférence qu'il donne en clôture des Journées Africaines de Rennes : séminaire organisé par l'Association des Étudiants Africains et l'A.G.E.R. (Association Générale des Étudiants de Rennes) sur le thème : "Les langues vernaculaires en Afrique noire et structures sociales de l'Afrique noire en liaison avec le problème des pays sous-développés", Rennes (France), 1er et 2 juillet 1959.


1960 : Le 9 janvier 1960, il soutient, à la Sorbonne, sa thèse de doctorat d'État en lettres. Elle est publiée aux Éditions Présence Africaine sous les titres : L'Afrique noire précoloniale et L'Unité culturelle de l'Afrique noire. Le préhistorien André Leroi-Gourhan était son directeur de thèse , et son jury était présidé par le professeur André Aymard, alors doyen de la faculté des Lettres. La mention honorable lui a été attribuée. Un reportage sur la soutenance de cette thèse, qui a duré plusieurs heures, a été réalisé par le journaliste Doudou Cissé et diffusé sur les ondes de la Radiodiffusion d'Outre-Mer. On peut aussi se référer à l'article de Bara Diouf (mort à 89 ans en 2016) paru dans "La Vie Africaine", n° 6, Paris, mars-avril 1960.



Sa thèse de doctorat porte la dédicace suivante : "A mon Professeur Gaston Bachelard dont l'enseignement rationaliste a nourri mon esprit".



La même année, sort la première édition du livre Les fondements culturels, techniques et industriels d'un futur État fédéral d'Afrique noire.


Retour définitif au Sénégal en 1960 :



"Je rentre sous peu en Afrique où une lourde tâche nous attend tous. Dans les limites de mes possibilités et de mes moyens, j'espère contribuer efficacement à l'impulsion de la recherche scientifique dans le domaine des sciences humaines et celui des sciences exactes. Quand à l'Afrique noire, elle doit se nourrir des fruits de mes recherches à l'échelle continentale. Il ne s'agit pas de se créer, de toutes pièces, une histoire plus belle que celle des autres, de manière à doper moralement le peuple pendant la période de lutte pour l'indépendance, mais de partir de cette idée évidente que chaque peuple a une histoire." (Cheikh Anta Diop, interview in "La Vie Africaine", n°6, mars-avril 1960, p. 11).



1961 : Cheikh Anta Diop entreprend de créer un laboratoire de datation par le Carbone 14 (radiocarbone) au sein de l'IFAN de Dakar alors dirigé par le professeur Théodore Monod. De nombreux domaines peuvent bénéficier de l'existence d'un tel laboratoire : l'archéologie, la préhistoire, l'histoire, la géologie, la climatologie … Des relations de travail seront établies entre l'IFAN et le CEA français (Commissariat à l'Énergie Atomique)/CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique français) au travers, entre autres, de Jean Le Run, qui avait monté le premier ensemble de datation par le radiocarbone du CNRS à Gif-sur-Yvette, de Jacques Labeyrie, Directeur du CFR (Centre des Faibles Radioactivités) et Georgette Delibrias (Directrice du Laboratoire du Radiocarbone du CFR).


Activité politique : Cheikh Anta Diop crée, au Sénégal, un parti politique (le Bloc des Masses Sénégalaises, BMS) d'opposition au régime en place dirigé par le Président Léopold Sédar Senghor et le Premier ministre Mamadou Dia. Il en est le Secrétaire général.
1962 : Il dirige la construction des locaux du laboratoire de datation.
En raison de son activité politique il est emprisonné de mi-juillet à mi-août 1962 à la prison de la ville de Diourbel. Un non-lieu sera finalement prononcé.
Il réalise en septembre de cette année, avec Jean Le Run, à Gif-sur-Yvette, la première datation de l'homme d'Asselar.
Il achève L'inventaire archéologique du Mali, étude qui lui avait été confiée par Théodore Monod.


1963 : Achèvement de la construction du laboratoire et début de l'équipement des différentes salles du laboratoire. Par une note de service en date du 17 avril 1963, Théodore Monod officialise, au sein du Département d'Archéologie et de Préhistoire de l'IFAN, l'existence du "Laboratoire de Datation par le Radiocarbone" dont le responsable est Cheikh Anta Diop.
Cheikh Anta Diop refuse les postes ministériels qui sont proposés par Léopold Sédar Senghor au BMS. Une telle acceptation aurait signifié un renoncement au programme du BMS.
Dissolution du BMS, en octobre 1963, par le gouvernement sénégalais. Cheikh Anta Diop crée aussitôt un autre parti qui sera à son tour dissous l'année suivante.
1965 : Théodore Monod quitte définitivement l'IFAN.
1966 : L'ensemble transistorisé de comptage de la radioactivité, après avoir été testé au Centre d'Études Nucléaires de Saclay (CEA/CNRS), arrive en juillet au port de Dakar. Cet appareil, destiné à la datation par le Carbone 14, bénéficie des plus récentes technologies de l'époque. Dans le cadre des accords de collaboration technique, il a été fourni et partiellement financé par le CEA. Le laboratoire de datation commence à fonctionner.
Une commission du CEA, présidée par Georgette Delibrias, directrice du Laboratoire de Radiocarbone de Gif-sur-Yvette, se rend au Sénégal pour tester, avec succès, les installations du laboratoire de Dakar.


Cheikh Anta Diop donne à la salle de mesure des dates le nom de Théodore Monod et le nom de Jean Le Run à celle du traitement chimique des échantillons, en témoignage de reconnaissance à l'éminente personnalité scientifique qui a créé et dirigé l'IFAN (jusqu'en 1965) et à l'un des pionniers du "Carbone 14" en France, devenu son ami.
A l'exception de celui de la Rhodésie du Sud, c'est, alors, l'unique laboratoire de Carbone 14 existant en Afrique noire. Les fondations du laboratoire ont été conçues pour supporter un étage supplémentaire car Cheikh Anta Diop avait envisagé dès le début du projet de développer et d'élargir les activités de ce laboratoire qu'il considérait comme le noyau, au sud du Sahara, d'un futur grand centre africain des faibles radioactivités, devant regrouper à terme différentes méthodes de datation.
Les résultats des datations des échantillons archéologiques sont publiés dans le Bulletin de l'IFAN et la revue internationale Radiocarbon.
Il reçoit avec le professeur W.E.B. Du Bois, le prix du 1er Festival des Arts Nègres, récompensant l'écrivain qui a exercé la plus grande influence sur la pensée nègre du XXe siècle.


1967 : Parution de Antériorité des civilisations nègres : mythe ou vérité historique ? (Présence Africaine). Cheikh Anta Diop répond à l'ensemble des critiques qui lui ont été faites depuis la parution de Nations nègres et Culture, en particulier celles exprimées par les africanistes Raymond Mauny, Jean Suret-Canale (mort en 2007) , etc.
Cheikh Anta Diop publie dans le Bulletin de l'IFAN une mise au point intitulée "A propos de la chronologie", car il se trouve dans la nécessité de réagir aux propos tenus par l'africaniste Robert Cornevin dans un article "La chronologie, pierre d'achoppement de l'histoire africaine", publié dans "Magazine Afrique" (n°60, 1966). Il s'agit d'une réponse circonstanciée aux réserves pseudo-scientifiques exprimées par l'auteur à l'égard de la méthode de datation par le Carbone 14. "Il faut noter l'existence d'un climat de médisance et d'hostilité, créé par un certain milieu africaniste, autour du laboratoire de datation de Dakar".
Il est invité, en août à Copenhague, à un colloque sur Humanisme africain - Culture scandinave, un dialogue.
Il participe au Congrès Panafricain de Préhistoire, qui se déroule à Dakar du 2 au 8 décembre 1967, et présente aux congressistes l'installation et la mise en service du Laboratoire du Radiocarbone de l'IFAN.
Du 11 au 20 décembre 1967, à Dakar, il participe au 2ème Congrès international des africanistes, dont il préside la Section VI : "Sciences naturelles et technologie". Il contribue à la rédaction du "Rapport et recommandations sur la recherche scientifique dans le domaine des sciences de la nature et la technologie"


et soumet une "Résolution sur le péril atomique en Afrique".


1970 : Cheikh Anta Diop est sollicité officiellement par René Maheu, directeur général de l'UNESCO, pour devenir membre du Comité scientifique international pour la rédaction de l'Histoire générale de l'Afrique.
Le secrétaire général de ce comité est le Béninois Maurice Glélé.
Il participe au colloque V. I. Lénine et le développement de la science, de la culture et de l'éducation, organisé sous l'égide de l'UNESCO du 6 au 10 avril 1970 à Tampere en Finlande.
1971 : Il est invité à Alger au colloque ayant pour thème, 'l'Unité africaine'.
Au VIIe Congrès Panafricain de Préhistoire et des études du Quaternaire, qui se déroule à Addis-Abeba en Éthiopie, il expose l'ensemble des méthodes mises en œuvre au laboratoire de radiocarbone de Dakar.
1972 : Il donne une conférence publique en décembre 1972 au Campus universitaire de Lubumbashi au Zaïre (province du Shaba) à l'issue de laquelle il est porté en triomphe par les étudiants.
1973 : Le premier livre de Théophile Obenga, L'Afrique dans l'Antiquité — Égypte pharaonique/Afrique noire sort aux Éditions Présence Africaine. Cheikh Anta Diop en a rédigé la préface.
1974 : Parution du livre Physique nucléaire et chronologie absolue. Il s'agit d'un ouvrage de synthèse, décrivant les diverses méthodes de datation d'échantillons archéologiques et géologiques, en particulier celles du radiocarbone mises en œuvre dans le laboratoire de Dakar.
C'est dans le cadre de la rédaction de l'Histoire générale de l'Afrique, qu'à son initiative, se tient au Caire, du 28 janvier au 3 février 1974, un colloque international sur Le peuplement de l'Égypte ancienne et sur le déchiffrement de l'écriture méroïtique, qui réunissait des égyptologues du monde entier, parmi les plus éminents (cf. compte rendu publié par l'UNESCO et dans le volume II de l'Histoire générale de l'Afrique ainsi que dans la revue "Ankh", n°3, juin 1994).
Les débats ont révélé la persistance de désaccords importants sur l'origine anthropologique des anciens Égyptiens :
"La conclusion des experts qui n'admettaient pas la théorie d'un peuplement uniforme de la vallée du Nil des origines jusqu'à l'invasion perse, énoncée par les professeurs Cheikh Anta Diop et Obenga, a été que le peuplement de base de l'Égypte s'était mis en place au Néolithique, en grande partie en provenance du Sahara et qu'il avait uni des hommes venus du nord et du sud du Sahara et différenciés par leur couleur. A cette théorie, les professeurs Diop et Obenga ont opposé la leur, qui soulignait l'unité du peuplement de la vallée par des Noirs et les progrès de ce peuplement du sud au nord."
Par contre dans le domaine linguistique, le professeur Jean Devisse, rapporteur du colloque, écrit qu'"un large accord s'est établi entre les participants". "Les éléments apportés par les professeurs Diop et Obenga ont été considérés comme très constructifs. (…) Plus largement, le professeur Sauneron a souligné l'intérêt de la méthode proposée par le professeur Obenga après le professeur Diop. L'Égypte étant placée au point de convergence d'influences extérieures, il est normal que des emprunts aient été faits à des langues étrangères ; mais il s'agit de quelques centaines de racines sémitiques par rapport à plusieurs milliers de mots. L'égyptien ne peut être isolé de son contexte africain et le sémitique ne rend pas compte de sa naissance ; il est donc légitime de lui trouver des parents ou des cousins en Afrique."
La conclusion générale indique que "La très minutieuse préparation des communications des professeurs Cheikh Anta Diop et Obenga n'a pas eu, malgré les précisions contenues dans le document de travail préparatoire envoyé par l'UNESCO , une contrepartie toujours égale. Il s'en est suivi un véritable déséquilibre dans les discussions". (...)


1975 : Aux USA, le 4 avril 1975, l'association "The African Heritage Studies Association" lui décerne une plaque commémorative pour sa contribution à la préservation et au développement de la vie et du patrimoine des peuples d'origine africaine dans le monde.
Cheikh Anta Diop prononce une conférence sur "Les origines africaines de l'Humanité et de la civilisation", dans le cadre des réunions sur l'Histoire Générale de l'Afrique, qui se sont tenues à Cotonou au Bénin en début septembre 1975 et qui réunissaient plusieurs historiens parmi lesquels Jospeh Ki-Zerbo (mort en 2006), J. Devisse, Mohamed El Fasi, Jacob Festus Ade Adjayi (mort en 2014).
Le 22 novembre 1975, il se rend en Guinée, sur invitation de Sékou Touré, pour assister, à côté des délégations des pays progressistes, à la commémoration de la victoire du peuple de Guinée sur les forces portugaises qui avaient agressé ce pays.
Il participe au 2e Congrès Ordinaire de l'Association des Historiens Africains, Yaoundé (Cameroun), qui se déroule du 16 au 20 décembre 1975.
1976 : C'est l'année de parution de l'ouvrage L'Antiquité africaine par l'image co-édité par les Nouvelles Éditions Africaines et l'IFAN de Dakar.
Il participe au Symposium Afro-Arabe sur la libération et le développement, qui se tient à Khartoum (Soudan) du 7 au 11 janvier 1976.
Un Colloque international sur le thème Afrique noire et Monde méditerranéen dans l'Antiquité, est organisé par le professeur Raoul Lonis de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Dakar, du 19 au 24 janvier 1976, qui rassemble hellénistes, égyptologues et spécialistes de l'Antiquité. Cheikh Anta Diop y donne une conférence dont le titre est "Évolution de l'humanité de la Préhistoire à la fin de l'Antiquité".
Rapporteur de la Conférence régionale sur la coopération technique entre les pays africains, il effectue des missions dans différents pays africains pour le compte de la Commission Économique des Nations Unies pour l'Afrique.
En septembre 1976, il participe au IXe congrès de l'Union Internationale des Sciences Préhistoriques et Protohistoriques (UISPP) qui se tient à Nice, et à l'issue duquel il est élu membre du Bureau de l'UISPP.
Il crée, le 3 février 1976, un nouveau parti politique, le RND (Rassemblement National Démocratique) dont l'organe de presse est Siggi puis Taxaw et dans lequel Cheikh Anta Diop publiera plusieurs articles concernant la politique intérieure sénégalaise, mais aussi la politique internationale, la question de l'énergie à l'échelle du continent africain, celle des déchets toxiques, etc. La loi dite "loi des trois courants" — socialiste, libéral et marxiste-léniniste — est promulguée le 19 mars 1976 et appliquée de manière rétroactive dans le but de rendre illégal le RND. Cette loi impose à l'opposition de se référer explicitement aux trois courants précités qui devaient désormais réglementer la vie politique au Sénégal. Le parti au pouvoir s'attribue l'étiquette socialiste, le Parti Démocratique Sénégalais (PDS) prend l'étiquette de parti libéral. Le RND de Cheikh Anta Diop refuse de se plier à cette exigence et s'engage alors un bras de fer politico-judiciaire entre le gouvernement de Senghor et le RND, qui n'aura de cesse de lutter pour sa reconnaissance, pour la défense des acquis démocratiques et le progrès de la démocratie au Sénégal.
1977 : Parution du livre Parenté génétique de l'égyptien pharaonique et des langues négro-africaines où Cheikh Anta Diop systématise en particulier la comparaison linguistique entre l'égyptien ancien et le wolof, sa langue maternelle.
A l'initiative du RND une pétition demandant le retour à un multipartisme véritable au Sénégal est signée par plusieurs centaines d'intellectuels sénégalais.
1978 : Le 13 mars 1978, le Sénégal perd Cheikh Ahmadou M'Backé. Chef spirituel appartenant à la confrérie musulmane des Mourides.
Une amitié profonde unissait Cheikh Ahmadou M'Backé et Cheikh Anta Diop.
1980 : Il prépare le premier congrès de l'Association des Chercheurs du Monde noir dont il est le président.
Le 25 février, l'Université nationale du Zaïre lui décerne la Médaille d'Or de la recherche scientifique africaine et le Grand Prix du Mérite scientifique africain.
1981 : Il est nommé professeur d'histoire associé à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Dakar. Vingt-sept ans après la parution de Nations nègres et Culture, vingt et un ans après son doctorat d'État, l'Université de Dakar s'ouvre enfin à son enseignement de l'histoire. Il y enseignera en maîtrise, en DEA et dirigera des thèses jusqu'à sa disparition en 1986.


En 1980, l'UNESCO, alors dirigée par Amadou Mahtar M'Bow, décide d'écrire une nouvelle Histoire du développement scientifique et culturel de l'humanité. En 1981, Cheikh Anta Diop figure avec les égyptologues Théophile Obenga, Aboubacry Moussa Lam, Babacar Sall et les historiens Joseph Ki-Zerbo et Iba Der Thiam parmi les spécialistes sollicités. Il fait partie de la commission internationale mise en place pour ce projet dont le premier secrétaire général est l'historien Alioune Traoré. Il est en outre désigné co-directeur du Volume II (Du troisième millénaire au VIIe siècle avant J.-C.).


Du 30 mars au 31 avril 1981, à Athènes, il participe au colloque Racisme, science et pseudo-science, réuni par l'UNESCO en vue de l'examen critique des différentes théories pseudo-scientifiques invoquées pour justifier le racisme et la discrimination raciale.
Sa communication a pour titre "L'unité d'origine de l'espèce humaine".
L'écrivain Tahar Ben Jelloun en rend compte dans le quotidien français Le Monde.
Le généticien Albert Jacquard participait également à ce colloque.
Les Actes de ce colloque ont été publiés par l'UNESCO avec une préface du professeur François Jacob, Prix Nobel de Médecine .
Léopold Sédar Senghor quitte le pouvoir en décembre 1980. Son successeur est le président Abdou Diouf. Celui-ci fait voter par l'Assemblée nationale une loi supprimant la limitation du multipartisme.
Le 7 avril 1981, le Tribunal correctionnel de Dakar met un terme aux poursuites judiciaires engagées par le gouvernement sénégalais contre Cheikh Anta Diop.
Le 18 juin 1981, le RND de Cheikh Anta Diop est enfin reconnu après cinq années d'une lutte sans relâche.
1982 : En avril-mai 1982, à l'initiative des Éditions Sankoré dirigées par le linguiste Pathé Diagne, est organisé à l'Université de Dakar, un symposium sur l'ensemble de son œuvre. Cheikh Anta Diop répond de manière approfondie à l'ensemble du corps universitaire qui a procédé à une analyse critique de ses écrits.
Il prononce à Alger, le 30 novembre 1982, une conférence intitulée "Les apports scientifiques et culturels de l'Afrique à l'humanité".
1983 : Répondant à l'invitation de l'écrivain antillais Daniel Maximin et d'Ernest Pépin, directeur du Centre d'Action Culturelle de la Guadeloupe, il donne plusieurs conférences en Guadeloupe.
Il préside, à l'Université de Dakar, du 7 au 8 juin 1982, le colloque Philosophie et Religion, organisé par la "Revue sénégalaise de philosophie". Sa propre communication s'intitule "Science et Religion. Les crises majeures de la philosophie contemporaine".
A l'issue des élections législatives, Cheikh Anta Diop refuse de siéger à l'Assemblée nationale en raison de l'ampleur des fraudes constatées.
1984 : Le 28 avril 1984, dans le cadre de la Semaine culturelle de l'École Normale Germaine Legoff à Thiès au Sénégal, il présente une communication intitulée : "Làmminu réew mi ak gëstu" (Langues nationales et recherche scientifique), dont la transcription a été réalisée par le linguiste Aziz Diaw et la publication assurée par le linguiste Yéro Sylla, président de l'Association des Chercheurs Sénégalais, dans la revue "Le Chercheur".
Il donne, du 8 au 13 mai 1984 à Niamey au Niger, une série de conférences à l'invitation du Gouvernement nigérien.


1985 : Cheikh Anta Diop est invité à Atlanta aux USA ; il est reçu par le maire d'Atlanta Andrew Young et par l'Association Martin Luther King. Il donne plusieurs conférences et interviews.
Le 4 avril 1985 est proclamé "Dr. Cheikh Anta Diop Day".


Le 7 juin 1985, il donne une conférence portant sur "L'importance de l'ancienne Égypte pour les civilisations africaines", au Centre Georges Pompidou de Beaubourg, à Paris, dans le cadre des "Journées des Cultures Africaines" organisées par l'Association Kaléidoscope et le Service des Affaires Internationales du Ministère de la Culture français.
1986 : Du 6 au 9 janvier 1986, à Yaoundé, il préside le Colloque sur l'Archéologie camerounaise. Il donne, le 8 janvier, dans le Palais des Congrès de la capitale camerounaise, sa dernière conférence : "La Nubie, l'Égypte et l'Afrique noire".


Cheikh Anta DIOP décède le 7 février 1986, à son domicile de Fann, quartier situé non loin de l'Université de Dakar qui aujourd'hui porte son nom. Il laisse inachevé un travail, publié aux Éditions Présence Africaine sous le titre Nouvelles recherches sur l'égyptien ancien et les langues négro-africaines modernes.


L'Égypte est ainsi arbitrairement rattachée à l'Orient et au monde méditerranéen géographiquement, anthropologiquement, culturellement.


Dans son ouvrage Cheikh Anta Diop, Volney et le Sphinx, Théophile Obenga montre en quoi consiste l'originalité et la nouveauté de la problématique historique africaine ouverte et développée par Cheikh Anta Diop :
"En refusant le schéma hégélien de la lecture de l'histoire humaine, Cheikh Anta Diop s'est par conséquent attelé à élaborer, pour la première fois en Afrique noire une intelligibilité capable de rendre compte de l'évolution des peuples noirs africains, dans le temps et dans l'espace [...] Un ordre nouveau est né dans la compréhension du fait culturel et historique africain. Les différents peuples africains sont des peuples "historiques" avec leur État : l'Égypte, la Nubie, Ghana, Mali, Zimbabwe, Kongo, Bénin, etc. leur esprit, leur art, leur science. " (pp. 27-28).


Les thématiques présentes dans l'œuvre de Cheikh Anta Diop peuvent être regroupées en six grandes catégories :
a. L'origine de l'homme et ses migrations. Parmi les questions traitées : l'ancienneté de l'homme en Afrique, le processus de différentiation biologique de l’humanité, le processus de sémitisation, l’émergence des Berbères dans l’histoire, l'identification des grands courants migratoires et la formation des ethnies africaines.
b. La parenté Égypte ancienne/Afrique noire. Elle est étudiée selon les aspects suivants : le peuplement de la vallée du Nil, la genèse de la civilisation égypto-nubienne, la parenté linguistique, la parenté culturelle, les structures socio-politiques, etc.
c. La recherche sur l'évolution des sociétés. Plusieurs développements importants sont consacrés à la genèse des formes anciennes d'organisation sociale rencontrées dans les aires géographiques méridionale (Afrique) et septentrionale (Europe), à la naissance de l'État, à la formation et l'organisation des États africains après le déclin de l'Égypte, à la caractérisation des structures politiques et sociales africaines et européennes avant la période coloniale ainsi qu'à leur évolution respective, aux modes de production, aux conditions socio-historiques et culturelles qui ont présidé à la Renaissance européenne.
d. L'apport de l'Afrique à la civilisation. Cet apport est restitué dans de nombreux domaines : la métallurgie, l'écriture, les sciences (mathématiques, astronomie, médecine, ...), les arts et l'architecture, les lettres, la philosophie, les religions révélées (judaïsme, christianisme, islam), etc.
e. Le développement économique, technique, industriel, scientifique, institutionnel, culturel de l'Afrique. Toutes les questions majeures que pose l'édification d'une Afrique moderne sont abordées : maîtrise des systèmes éducatif, civique et politique avec l'introduction et l'utilisation des langues nationales à tous les niveaux de la vie publique ; l'équipement énergétique du continent ; le développement de la recherche fondamentale ; la représentation des femmes dans les institutions politiques ; la sécurité ; la construction d'un État fédéral démocratique, etc.
La création par Cheikh Anta Diop du laboratoire de datation par le radiocarbone qu'il dirige jusqu'à sa disparition est significative de toute l'importance accordée à "l'enracinement des sciences en Afrique".
f. L'édification d'une civilisation planétaire. L'humanité doit rompre définitivement avec le racisme, les génocides et les différentes formes d’esclavage. La finalité est le triomphe de la civilisation sur la barbarie.
Cheikh Anta Diop appelle de ses vœux l'avènement de l'ère qui verrait toutes les nations du monde se donner la main "pour bâtir la civilisation planétaire au lieu de sombrer dans la barbarie" (Civilisation ou Barbarie, 1981).
L’aboutissement d’un tel projet suppose :
- la dénonciation de la falsification moderne de l'histoire : "La conscience de l'homme moderne ne peut progresser réellement que si elle est résolue à reconnaître explicitement les erreurs d'interprétations scientifiques, même dans le domaine très délicat de l'Histoire, à revenir sur les falsifications, à dénoncer les frustrations de patrimoines. Elle s'illusionne, en voulant asseoir ses constructions morales sur la plus monstrueuse falsification dont l'humanité ait jamais été coupable tout en demandant aux victimes d'oublier pour mieux aller de l'avant" (Cheikh Anta Diop, Antériorité des civilisations nègres – mythe ou vérité historique ?, Paris, Présence Africaine, p. 12).
- la réaffirmation de l'unité biologique de l'espèce humaine fondement d’une nouvelle éducation qui récuse toute inégalité et hiérarchisation raciales :
"... Donc, le problème est de rééduquer notre perception de l'être humain, pour qu'elle se détache de l'apparence raciale et se polarise sur l'humain débarrassé de toutes coordonnées ethniques." (Cheikh Anta Diop, "L'unité d'origine de l'espèce humaine", in Actes du colloque d'Athènes : Racisme science et pseudo-science, Paris, UNESCO, coll. Actuel, 1982, pp. 137-141).


Outre la connaissance du passé réel de l'Afrique et de l'humanité en général, Cheikh Anta Diop assigne quatre buts à ses travaux :
1. La restauration de la conscience historique africaine, c'est-à-dire la conscience d'avoir une histoire. La restauration de cette conscience historique implique que l'égyptologie soit développée en Afrique noire et que la civilisation nubio-égyptienne soit revisitée dans tous les domaines par les Africains eux-mêmes :
“Seul l'enracinement d'une pareille discipline scientifique (l'égyptologie) en Afrique Noire amènera à saisir, un jour, la nouveauté et la richesse de la conscience culturelle que nous voulons susciter, sa qualité, son ampleur, sa puissance créatrice”.

“Dans la mesure où l'Égypte est la mère lointaine de la science et de la culture occidentales, comme cela ressortira de la lecture de ce livre, la plupart des idées que nous baptisons étrangères ne sont souvent que les images, brouillées, renversées, modifiées, perfectionnées, des créations de nos ancêtres : judaïsme, christianisme, islam, dialectique, théorie de l'être, sciences exactes, arithmétique, géométrie, mécanique, astronomie, médecine, littérature (roman, poésie, drame), architecture, arts, etc. [...] Autant la technologie et la science moderne viennent d'Europe, autant dans l'Antiquité, le savoir universel coulait de la vallée du Nil vers le reste du monde, et en particulier vers la Grèce, qui servira de maillon intermédiaire. Par conséquent aucune pensée, n'est, par essence, étrangère à l'Afrique, qui fut la terre de leur enfantement.
C'est donc en toute liberté que les Africains doivent puiser dans l'héritage intellectuel commun de l'humanité, en ne se laissant guider que par les notions d'utilité et d'efficience.”
"L'Africain qui nous a compris est celui-là qui, après la lecture de nos ouvrages, aura senti naître en lui un autre homme, animé d'une conscience historique, un vrai créateur, un Prométhée porteur d'une nouvelle civilisation et parfaitement conscient de ce que la terre entière doit à son génie ancestral dans tous les domaines de la science, de la culture et de la religion." (C. A. Diop, Civilisation ou Barbarie)
2. Le rétablissement de la continuité historique, c'est-à-dire restituer dans l’espace et dans le temps l'évolution des sociétés et États africains, notamment de la préhistoire au XVIème siècle, période la plus méconnue. Cheikh Anta Diop insiste dans ses écrits sur le fait que la recherche socio-historique est loin d'être conçue comme un repli sur soi ou une simple délectation du passé :
“Le rôle de la sociologie africaine est de faire le bilan du passé pour aider l'Afrique à mieux affronter le présent et l'avenir.”
(C. A. Diop, Antériorité des civilisations nègres – Mythe ou vérité historique ?)
“La relativité de nos structures, ainsi mises en évidence, pourrait nous aider à dégager les bases théoriques d’un dépassement de nos sociétés à castes, dépassement qui ne sera irréversible que s’il est fondé sur la connaissance du pourquoi des choses. N’est-ce pas cela, la révolution sociale, ou en tout cas un de ses aspects les plus importants dans nos pays ?
(C. A. Diop, Civilisation ou Barbarie)
L'étude socio-historique des civilisations africaines permet d'identifier les valeurs qui ont fait leur grandeur et les facteurs ayant engendré leur déclin, d'élaborer les stratégies pour le développement du continent.
3. La construction d'une civilisation planétaire. Cheikh Anta Diop entend contribuer “[…] au progrès général de l'humanité et à l'éclosion d'une ère d'entente universelle […] et “Nous aspirons tous au triomphe de la notion d'espèce humaine dans les esprits et dans les consciences,
... de sorte que l'histoire particulière de telle ou telle race s'efface devant celle de l'homme tout court. ...
On n'aura plus alors qu'à décrire, en termes généraux qui ne tiendront plus compte des singularités accidentelles devenues sans intérêt, les étapes significatives de la conquête de la civilisation par l'homme, par l'espèce humaine tout entière. L'âge de la pierre taillée et la conquête du feu, le néolithique et la découverte de l'agriculture, l'âge des métaux, la découverte de l'écriture etc., etc. ne seront plus décrits que comme les instants émouvants des rapports dialectiques de l'homme et de la Nature, la série des “défis” de la Nature sans cesse relevés victorieusement par l'homme”. (C. A. Diop, Antériorité des civilisations nègres – Mythe ou vérité historique ?)


"Le climat, par la création de l'apparence physique des races, a tracé des frontières ethniques qui tombent sous le sens, frappent l'imagination et déterminent les comportements instinctifs qui ont fait tant de mal dans l'histoire. Tous les peuples qui ont disparu dans l'histoire, de l'Antiquité à nos jours, ont été condamnés, non par une quelconque infériorité originelle, mais par leurs apparences physiques, leurs différences culturelles. […] Donc, le problème est de rééduquer notre perception de l'être humain, pour qu'elle se détache de l'apparence raciale et se polarise sur l'humain débarrassé de toutes coordonnées ethniques.”
(C. A. Diop, “L'unité d'origine de l'espèce humaine”, Colloque "Racisme, Science et Pseudo-Science", organisé à Athènes par l'UNESCO en 1982)


L'accès à ce futur souhaité exige par conséquent de rompre avec le racisme. De rompre avec le “mensonge culturel” qui a consisté à nier l'humanité des Nègres, à nier l'histoire de l'Afrique. Ce “mensonge culturel” encore aujourd'hui réside dans la négation de l'appartenance de l'Égypte pharaonique au monde négro-africain ainsi que dans la minimisation du rôle civilisateur de cette Égypte dans l'Antiquité. Il exige de vaincre les obstacles qui empêchent le développement de l'Afrique, menacent sa sécurité et hypothèquent sa survie. Il faut “veiller à ce que l'Afrique ne fasse pas les frais du progrès humain”, “froidement écrasée par la roue de l'histoire”, et donc : “On ne saurait échapper aux nécessités du moment historique auquel on appartient”.
(C. A. Diop, Antériorité des civilisations nègres – Mythe ou vérité historique ?)
Aujourd'hui, ce moment historique est celui de la renaissance africaine.
4. La renaissance africaine. Cheikh Anta Diop avait 25 ans lorsque, étudiant à Paris, en 1948, il définissait le contenu et les conditions de la renaissance africaine dans un article intitulé “Quand pourra –t-on parler d’une renaissance africaine ?”.

Dans cette perspective, l'acheminement vers un État fédéral devient une urgence continentale car un tel ensemble géo-politique serait à même de sécuriser, de structurer et d'optimiser le développement du continent africain : “Il faut faire basculer définitivement l’Afrique Noire sur la pente de son destin fédéral [...] seul un État fédéral continental ou sub-continental offre un espace politique et économique, en sécurité, suffisamment stabilisé pour qu’une formule rationnelle de développement économique de nos pays aux potentialités diverses puisse être mise en œuvre.” ((C. A. Diop, préface du livre de Mahtar Diouf, Intégration économique, perspectives africaines, 1984).
Cheikh Anta Diop termine son ouvrage Les fondements économiques et culturels d'un État fédéral d'Afrique noire par quatorze propositions d'actions concrètes allant du domaine de l'éducation à celui de l'industrialisation. Entre autres, il relève une double nécessité vitale :
- celle de la définition d’une politique de recherche scientifique efficiente : “L’Afrique doit opter pour une politique de développement scientifique et intellectuel et y mettre le prix ; sa vulnérabilité excessive des cinq derniers siècles est la conséquence d’une déficience technique.
L’Afrique peut redevenir un centre d’initiatives et de décisions scientifiques, au lieu de croire qu’elle est condamnée à rester l’appendice, le champ d’expansion économique des pays développés ”.
- celle de la définition d’une doctrine énergétique africaine et d’industrialisation véritable : “Il s’agit de proposer un schéma de développement énergétique continental qui tienne compte à la fois des sources d’énergie renouvelables et non renouvelables, de l’écologie et des progrès techniques des prochaines décennies …
L’Afrique Noire devra trouver une formule de pluralisme énergétique associant harmonieusement les sources d’énergies suivantes : 1. Énergie hydroélectrique (barrages), 2. Énergie solaire, 3. Énergie géothermique, 4. Énergie nucléaire, 5. Les hydrocarbures (pétrole), 6. Énergie thermonucléaire” auxquelles il ajoute le vecteur énergétique hydrogène.


(Chronologie et infos viennent surtout du texte sur le site de L’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN): https://ifan.ucad.sn/index.php/9-uncategorised/262-le-parrain-de-l-ifan )
puis http://www.cheikhantadiop.net/cheikh_anta_diop_biograph.htm
et https://www.rfi.fr/fr/hebdo/20160527-cinema-television-senegal-kemtiyu-documentaire-oeuvre-cheikh-anta-diop-senghor )

PierreAmo
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le 1 juil. 2021

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