Les années 90 font désormais partie de l'Histoire, à tel point qu'elles représenteront bientôt l'apanage de la dernière génération en cours. Quoi de plus normal que le Cinéma s'attèle de plus en plus à des sujets de l'époque en question, en bon révélateur artistique des évènements passés, révolus mais pourtant actuels en paradoxe ?
Auteure du joli et réussi Mustang Deniz Gamze Ergüven signe avec Kings un deuxième long métrage prenant comme point de départ la célèbre affaire Rodney King ayant défrayé la chronique entre 1991 et 1992, affaire partant d'une simple altercation entre un groupe de jeunes afro-américains et des policiers suivie d'une bavure pour le moins passée sous silence au cours d'un long procès... Procès débouchant sur une série d'émeutes donnant en grande partie raison au désoeuvré Rodney, devenu le symbole de toute une communauté et de toute une génération.
Si le film colle scrupuleusement à son sujet et qu'il demeure sciemment documenté dans sa construction générale la cinéaste évoque implicitement toute une série d'évènements beaucoup plus proches de nos préoccupations hexagonales, principalement les émeutes franciliennes de l'année 2005 mais surtout l'affaire Théo survenue à Aulnay-sous-Bois en février 2017. Loin de faire un film à thèse ou même une étude théorique sur la question la réalisatrice privilégie un registre intimiste en développant le quotidien d'une famille nombreuse de Los Angeles, jouant la carte du drame simple et anti-spectaculaire... C'est du reste la limite de Kings, film dont la portée reste pour ainsi dire en deçà de son sujet, trop sommaire voire désinvolte à l'égard des évènements précités.
Le film reste pourtant tout à fait digne d'intérêts, mais moins pour ce qu'il raconte que pour ce qu'il amène à étudier en aval de la projection. Moins efficace et aussi plus tiède que Mustang ce bien-nommé Kings reste tout de même un brin décevant, traitant de manière presque anecdotique sa matière première au point d'en diluer sa force initiale. A voir pour se faire un avis.