Imaginez une comédie purement franchouillarde qui réunirait deux génies du rire à la cocorico dans le même temps... D'une part le pitre nerveux pétri de mimiques engoncées, alors en pleine apogée de sa gloire en cet an de grâce 1976 : l'inénarrable et légendaire Louis De Funès ; d'autre part le clown à bretelles à la bonhommie de gros panda bien léché, tout juste lancé comme un paquet de lessive dans l'arène du cinéma en cette année charnière pour la clique à Christian Fechner : l'hilarant sympathique et capital Coluche, à peine remis de ses récents adieux au Music Hall et de l'échec cuisant des Vécés fermés par Patrice Leconte un an auparavant...


Prenez maintenant un réalisateur tarte à la crème mais piètre technicien, modeste artisan du slapstick à la mode Woody Allen première période ( Claude Zidi ) et incorporez à sa pâte une sauce aigre-douce façon humour acerbe saupoudrée de cassonade à la poilade à gratouille : pour ce faire prenez le duo comique sus-cité et assaisonnez la tambouille de gags burlesques et typiquement contrastés.


Ensuite dans un grand récipient Tricatel cassez à part une kyrielle d'oeufs et brouillez-les dans un concert peu ragoûtant de blanc, de jaune et de coquille. Battez le tout en neige avec un fouet Guiomar pour un soupçon d'irrévérence et de méchanceté graveleuse, tout en parsemant l'ensemble de persil-persifleur. Laissez reposer la mixture et faites préchauffer au four micro-ondes la composition très fleurie et guillerette du grand maestro Vladimir Cosma pour un concerto gastronomique ad hoc.


Continuez de ménager la chèvre et le chou en faisant la part belle au fameux duo. Laissez Louis De Funès bouillonner à température ambiante au gré de diatribes dans le plus pur esprit voltairien, et régulièrement arrosez-le de crème fouettée subtilement jetée par un Coluche dont la carrière de saltimbanque bat de l'aile ( ou de la cuisse ). Entre-temps prenez un minuteur Raymond Bussières pour accélérer la cadence lors des passages d'escapade automobile, tout en évitant les relais sponsorisés par Tricatel. Dans un bol barattez une noix de beurre des demi-sels Boucaron, Lamotte, j'en passe et des meilleurs...


Utilisez à présent un bon gros rouleau compresseur pour concentrer la pâte Zidi, à la mode Guiomar-Tricatel ( se référer au Guide Duchemin pour plus d'informations quant à la provenance douteuse desdits ingrédients ). Dans un grand four préalablement préchauffé et reconverti en usine chimique aux relents alleniens ( vous rapporter aux passages burlesques de Woody et les Robots mijotés quelques années plut tôt...) placez un plateau-télé sur laquelle se trouvera disposée la pâte Zidi et son persil-persifleur macérant adroitement dans le bon gros jus d'oeufs façon Guiomar. Laissez cuire une centaine de minutes, et bon appétit !


Nota bene : une larme de Gérard Lanvin pour relever le goût, mais très chichement.

stebbins
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le 31 mars 2018

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stebbins

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