Alors que la France se veut dissimuler la condition de vie des jeunes en cités Kechiche avec l'Esquive nous rappelle, même 14 ans après, l'inégalité des conditions et surtout des visions des différentes jeunesses. En effet plus profond qu'un documentaire sur la banlieue cette fiction nous plonge au coeur de la domination que subit la jeunesse des cités. L'image de la femme est ciblée de jugements oppressifs sur son comportement sexuel, soumises comme les hommes au conformisme de ses pairs. Mais de manière plus militante le film souligne avec brio un dilemme qui touche un sujet plus vaste que les oppressions au sein de ces groupes de jeunes : comment changer de comportement quand vous même, êtes traités comme une seule et même personne, une vermine décadente et inculte de banlieue. Ces jeunes sont en effet tous égaux face à l'oppression qui vient "d'en haut", des forces de l'ordre qui traitent ces jeunes moins bien qu'ils ne traitent leurs propres animaux. C'est dans une scène choquante, mais bel et bien représentative du réel, que Kechiche montre la manière dont les jeunes de banlieue sont opprimés à travers les violences symboliques et physiques qu'ils subissent, la moindre considération qu'on a pour ces jeunes qui sont destinés à être moins bien que les autres. Pourtant, et c'est le dernier gros point fort du film, on découvre chez ces jeunes des centres d'intérêts et des pratiques qui coupent net la théorie bourdieusienne selon laquelle les divertissements intellectuels seraient réservés à une élite sociale. On voit dans ce film toute l'importance que peut représenter un classique comme celui de Marivaux pour des jeunes de cités, il s'agit de voir qu'une jeune de banlieue ne cache pas dans son pantalon Le jeu de l'amour et du hasard pour y dissimuler de la drogue mais pour pouvoir le lire, l'apprendre, le jouer et l'apprécier.
On se fichera alors de l'hétérogénéité de la qualité du jeu des acteurs tant la puissance du film n'y réside pas.
Ce film restera une lanterne capable d'éclairer la réalité des comportements et du traitement des jeunes de cité.

JeanLouisVannes
8
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le 4 août 2018

Critique lue 206 fois

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