Découverte réjouissante du réalisateur Alain Guiraurdie dont L’inconnu du lac est pourtant déjà le quatrième long-métrage. « Thriller homosexuel » pour certains ou « porno gay » pour d’autres, le film est surtout un excellent objet cinématographique, inclassable, juste, intelligent et intemporel.
Servi plus que desservi par la campagne de censure menée à Versailles et Saint-Cloud à l’encontre de l’affiche du film réalisée par Tom de Pékin, le film rencontre pour l’instant un franc succès autant chez les spectateurs que dans la presse et c’est tant mieux, mérité pour un film français qui sort enfin des sentiers labourés du cinéma d’auteur lourdingue. L’inconnu du lac est au contraire la définition inverse de la lourdeur. Filmé dans une lumière naturelle magnifique, la mise en scène est épurée, tout en finesse avec beaucoup de plans fixes et de lents travellings accompagnants les personnages. Aucune musique n’a été rajoutée au montage et seuls les bruits naturels rythment l’histoire. Tout est filmé aussi simplement que le geste de se remettre les bijoux en place.

Comme les personnages du film, le cinéma est ici mis à poil et déshabille les passions humaines. Dans cette sorte de huis-clos à ciel ouvert, celles-ci s’entremêlent : l’amour, le sexe et la mort. Alain Guiraurdie ne nous impose pas une réflexion, mais filme avec volupté ces sentiments intrinsèques de l’être humain. Alors certes y’a de la bite, de la pipe et des scènes de culs assez crues mais elles ne sont en rien gênantes car elles vont dans la continuité de la réfléxion et de l’idée du cinéma que nous propose Guiraurdie. L’idée d’un cinéma qui refuse les artifices pour ne se concentrer que sur l’humain et les rapports complexes qui l’anime, ainsi que les pulsions sexuelles et meurtrières. Pour finir, notons aussi que le film possède certaines scènes très drôles.
L’inconnu du lac est un film puissant et résolument humaniste. Certains journalistes lui trouve des accents Hitchcockiens. Il y a aussi du Pialat, du Bresson et selon le réalisateur lui-même, un petit peu du film Les dents de la mer (1975) de Steven Spielberg. Il y a surement un peu de tout ça si on creuse un peu, mais ce qu’on peut dire c’est que c’est surtout un film d’Alain Guiraurdie, réalisateur rafraichissant en provenance du sud, qui donne envie de se dorer le sexe nous aussi et dont je m’empresserais de voir les précédents longs-métrages.
Moltès
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le 23 juin 2013

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