La Bonne Épouse se met doucement en place, le temps de nous familiariser avec les codes et usages de cette maison aux valeurs autoproclamées irréprochables. Dans une mise en scène légèrement surannée, mais élégante et délicate, Martin Provost s’attache à présenter ses personnages cocasses et bien croqués, en particulier ce trio de femmes bien décidées à faire de vos filles de parfaites femmes au foyer. Ce que la Bonne Epouse dit de la condition féminine dans les années 60, sans être surprenant, est assez édifiant. Il restitue une époque pas si lointaine, en s’amusant autant qu’il le dénonce du peu de liberté dont disposait les femmes, mais sans que de réelles problématiques ne se dégagent vraiment d’un scénario d’abord un peu nonchalant.
Un événement soudain va venir réveiller tout ça et donner un coup fouet au récit. On sent l’urgence gagner les personnages et souffler le vent du changement, la révolution guette. Mais gentiment. Des sujets passionnants émergent alors tous en même temps, sans que Provost ne sache vraiment comment les traiter. La Bonne Épouse est définitivement féministe, mais ne sait pas trop comment le dire. Comédie, drame, film politique, d’auteur, boulevard, La Bonne épouse ne règle jamais son problème de positionnement. C’est à la fois ce qui fait son charme et sa limite. Il aborde de nombreux thèmes mais sans pouvoir les approfondir. Par manque de temps sans doute, trop concentré sur ses triplettes (ce qui est tentant avec des performeuses telles que Binoche, Lvovsky et Moreau), mais au détriment des destins des étudiantes pourtant parcourus par des thématiques fortes comme l’émancipation féminine, évidement, mais aussi les mariages forcés, l’éveil à la sexualité, à toutes les sexualités, avec en fond les événements de mai 68. Chacune d’elle pourrait faire l’objet d’un spin of passionnant sur quel aura été leur parcours après l’institut.
C’est donc à un joyeux bordel, faussement inconséquent, auquel nous invite Provost et ses actrices, enlevé et provocateur. Cet entre-deux constant est peut-être simplement la nature de ce film hybride qui s’achève par un surprenant mais réjouissant happening.

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le 15 mars 2020

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