Le principal reproche que l'on puisse faire aux produits fabriqués à la chaine, en usine, c'est leur manque de personnalité. Ils ont tous le même goût, la même saveur artificielle. Rien ne les distingue des innombrables autres produits du même type. Il n'y a aucune prise de risque dans leur conception. Ni bons ni mauvais, en un mot, ils sont insipides.
C'est exactement le cas pour ce film. Pur produit de l'usine à films hollywoodienne, La Couleurs des sentiments (titre français très significatif, qui rabaisse le film au niveau des téléfilms allemands que M6 diffuse les après-midi) n'a strictement aucune personnalité. C'est un film comme on en a déjà vu des centaines, des milliers. Exactement le même déroulement, qui va de "je suis seule contre tous" à "j'ai eu raison avant tout le monde". Exactement le même type d'émotions en conserve, où on essaie de faire pleurer dans les chaumière en montrant une gamine hurler en tapant contre une vitre pour appeler sa nounou (ah ! il faudrait un jour interdire carrément ce genre de scène, c'est juste insupportable de mièvrerie).
Certes, le film possède des qualités. La reconstitution est soignée. Emma Stone, malgré une coiffure absolument horrible, est toujours aussi mignonne. Jessica Chastain en fait des kilotonnes, mais avec le décolleté qu'elle a on lui pardonne tout. Olivia Spencer est irrésistible et mérite pleinement un Oscar (même si on peut dire que le film a été taillé pour cela : c'est un film à Oscars).
Mais le principal point fort, le seul dont je me souvienne 24 heures après avoir vu cette soupe tiède, c'est Sissy Spacek; l'actrice de Carrie n'a ici qu'un second rôle, mais elle est formidable. Elle rayonne, elle illumine tout dans les trop rares scènes où elle apparaît.
M'enfin, se taper une telle bouillasse (de 2h30, en plus) simplement pour quatre ou cinq scènes, ça ne vaut franchement pas le coup.
Bien sûr, il faudrait parler du thème. Je passe sur le courage de faire un film sur l'égalité Blancs-Noirs en 2011... Non, c'est le traitement du sujet qui me gêne. Au lieu de faire un film sur le vivre-ensemble (voir Eastwood avec Invictus, par exemple, malgré tous les défauts du film), The Help se contente d'une inversion malsaine du propos raciste. Le scénario remplace "Les Noirs sont des animaux, les Blancs sont leurs maîtres" par "Les Noirs sont cools, les Blancs sont des monstres". Au lieu de montrer que l'on peut et doit vivre ensemble, il se contente de remplacer une opposition par une autre.
Honnêtement, quitte à voir un film à Oscars, sur le même thème, j'ai largement préféré Miss Daisy et son chauffeur.

SanFelice
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Petits et grands écrans en 2016

Créée

le 10 août 2016

Critique lue 1.5K fois

26 j'aime

SanFelice

Écrit par

Critique lue 1.5K fois

26

D'autres avis sur La Couleur des sentiments

La Couleur des sentiments
Architrave
8

Ceci est un 8,999 que mon cerveau refuse de changer en 9.

Il y a dans ce film quelque chose de... léger, discret. Je ne sais pas comment l'expliquer mais je vais tout de même essayer dans ces prochaines lignes. La mise en scène est parfois sublime, il y a...

le 21 nov. 2011

58 j'aime

5

La Couleur des sentiments
Hypérion
8

Poupées gigognes d'ostracisation

Quelques jours après avoir subi 12 years a slave qui avait réussi le tour de force de me rendre indifférent à la destinée d'un esclave plus de deux heures durant malgré l'intérêt que je porte au...

le 5 mars 2014

46 j'aime

14

La Couleur des sentiments
Herma
4

Critique de La Couleur des sentiments par Herma

J'ai plein de choses à reprocher à La Couleur des sentiments. Premièrement, l'affiche est immonde. Deuxièmement, la bande-annonce est nulle. Troisièmement, c'est un film d'une complaisance abjecte...

le 2 nov. 2011

35 j'aime

5

Du même critique

Starship Troopers
SanFelice
7

La mère de toutes les guerres

Quand on voit ce film de nos jours, après le 11 septembre et après les mensonges justifiant l'intervention en Irak, on se dit que Verhoeven a très bien cerné l'idéologie américaine. L'histoire n'a...

le 8 nov. 2012

256 j'aime

50

Gravity
SanFelice
5

L'ultime front tiède

Au moment de noter Gravity, me voilà bien embêté. Il y a dans ce film de fort bons aspects, mais aussi de forts mauvais. Pour faire simple, autant le début est très beau, autant la fin est ridicule...

le 2 janv. 2014

218 j'aime

20

Chernobyl
SanFelice
9

What is the cost of lies ?

Voilà une série HBO qui est sans doute un des événements de l’année, avec son ambiance apocalyptique, ses flammes, ses milliers de morts, ses enjeux politiques, etc. Mais ici, pas de dragons ni de...

le 4 juin 2019

214 j'aime

32