Depuis quand n’avez-vous pas été surpris par un film centré sur un procès ? Dans tous les cas, la proposition de Stéphane Demoustier devrait parvenir à vous étonner ! « La fille au bracelet » est aussi sobre que percutant mais surtout, qu’il est malin ce film : du procès d’un crime sordide, on passe subtilement au procès de la jeunesse actuelle mêlé aux incompréhensions des rapports intergénérationnels.
L’avocate Procureur, qui est pourtant d’un âge relativement proche de l’accusée, est en totale opposition de valeurs. Ses questions sont presque toutes axées sur les pratiques sexuelles de la jeune prévenue. La violence des faits est reléguée par le jaillissement des révélations de l’intimité de cette fille de 16 ans, exposée très brutalement. Intimité qui arrive aux oreilles de ses parents. C’est qu’ils doivent en encaisser des uppercuts durant les audiences ! Car ce qui semble normal pour cette génération totalement détachée (en apparence), semble parfaitement cru et avec un manque certain de repères pour les parents, qui croyaient pourtant bien connaître leurs enfants. Ces êtres deviennent autonomes et échappent fatalement à la compréhension des parents qui eux-mêmes étaient en rupture avec les générations d’avant eux…
Un des temps fort du film est la superbe tirade de l’avocate de la défense, pourtant proche de la retraite, qui, avec sa voix travaillée aux gauloises sans filtres, nous expose les mœurs de la jeunesse d’aujourd’hui sans pour autant la juger. Celle qui doit faire le plus d’effort pour passer sur le fossé générationnel est pourtant celle qui comprends le mieux le combat de la bien nommée Lise Bataille ainsi que celui de sa génération.
Ce film invite au dialogue plutôt qu’au jugement, il invite aussi à s’ouvrir à ses enfants et à accepter leurs différences au même titre que l’évolution des mœurs dans notre société. Cela permet aussi aux masques stoïques -qui servent de protection- de pouvoir tomber et de livrer, fugacement, quelques beaux sentiments, preuve que le travail d’éducation n’a pas été vain.