Le film démarre exactement là où s'arrêtait le premier sans prendre la peine de faire la moindre contextualisation ou mise en place pour les nouveaux spectateurs, aussi en ferais-je de même dans ma critique. On est habitué aux films qui s'ouvrent sur une scène dynamique sans explication qui présente un personnage par l'action, mais là c'est particulièrement précipité et les nouveaux arrivants se sentiront exclus comme s'ils étaient arrivés en retard à leur séance. C'est assez symptomatique du rythme du film souvent hâtif. On a par exemple un long numéro musical qui s'achève, on suit alors un autre groupe de personnages et BIM scène d'action immédiate 2s après le changement de point de vue. Laissez nous donc un peu souffler genre 30 secondes au moins, histoire d'encaisser. Ce reproche était parfois fait au 1er film, c'est pire ici.


Après vous avoir balancé mon premier paragraphe dans la face sans préavis, je peux faire comme le film et continuer plus posément. Beaucoup de critiques ont vanté le premier film Lego sur la base de son discours malin sur la pop culture tandis que d'autres se contentaient de signaler que c'était une pub géante et qu'il n'y avait donc pas lieu d'en dire du bien quand on est un cinéphile "éveillé". Pour ma part je trouvais le film vachement drôle, euphorisant et bien fait. Les références étaient suffisamment bien intégrées pour que je les gobe sans me demander si j'avais le droit d'aimer ça ou si je passais pour un mouton. J'appréciais le propos qui s'emboîtait parfaitement avec le support des Lego mais il ne faut pas se voiler la face : je n'intellectualisais pas trop le film et je kiffais sans me demander si c'est trop consumériste ou pas. Parce que le film était cool.


Pour ce second opus le propos est autre et concerne le choc entre les figurines d'un garçon et ceux de sa petite sœur, il n'y a qu'à voir l'affiche pour le deviner. D'ailleurs les scénaristes Phil Lord et Chris Miller ont entendu les remarques sur le syndrome Trinity concernant le personnage de Cool-Tag et ils y répondent avec malice, articulant le film autour d'une certaine vision de la masculinité cool telle qu'elle est trop souvent vendue. Il y a toujours un regard sur la société de consommation qui fait partie intégrante du film mais ce dernier se montre plus ambigu. La critique est délaissée, le message moins acide. Certains pourront alors taper sur le film en le taxant de pur produit commercial, moi je le trouve bienveillant envers les amateurs de culture mainstream et ça fait un peu de bien dans un environnement où il faut être irrévérencieux ou cynique pour paraître intéressant. Cela n'efface pas quelques bons sentiments appuyés et on pourra facilement s'agacer de cette démarche qui excuse certaines dérives, mais il est plaisant de remettre en cause cette tendance à se replier sur ses figures fétiches et de considérer leur réappropriation comme du vol.


Pour le reste, il y a des Duplo et des bas. L'animation en Lego de synthèse est toujours aussi fantastique, un grand bravo pour la reine aux mille visages qui multiplie les métamorphoses en gros pixels rectangulaires. Chacune de ses transformations via les briques de Lego est un ravissement, il y a eu du bon boulot derrière (big up aussi à sa voix française Virginie Emane et Laura Nanou pour les chansons, et à toute la VF par ailleurs ce coup-ci on n'a pas de footballer). Il y a plein de trouvailles rigolotes, comme la représentation d'un gobelet de café que l'on écrase avec son contenu, ou la manière qu'a le film de nous cacher au maximum les déplacements de la figurine Lego Friends, laquelle telle un Playmobil ne peut pas détacher ses jambes. Le film ne se la joue jamais pépère et vise le mouvement constant, mais sans doute trop.


J'ai déjà parlé plus haut de la tendance à aller trop vite, mais il y a bien d'autres soucis qui finissent par lasser. On abuse du ressort comique d'un personnage qui annonce quelque chose avant de se faire immédiatement contredire, de comique de répétition qui s'étire trop ou d'une tentative d'héroïsme qui tombe à plat. Parfois cela ressemble étrangement à une vidéo de youtuber, je pense à la chute brutale d'un entracte dont on peine à trouver le rapport avec le film. Les références sont beaucoup moins inspirées que dans le premier volet et un certain caméo tombe comme un cheveu dans la soupe. Quitte à faire des blagues référentielles alors qu'il y a Gandalf en version post-apo qui tient un panneau "parking interdit", ça aurait été quand même bien plus drôle de lui filer à la place un "sens interdit". Phil Lord et Chris Miller continuent de faire des blagues méta comme dans le premier film Lego, les Jump Street et Spider-Man : Into the Spider-verse, mais elles se contentent ici de dire à l'oral ce qu'un esprit blasé aura remarqué de lui-même, comme "oh non, ils vont nous faire une séquence musicale !". D'ailleurs les chansons sont nombreuses et mettent le paquet sur l'aspect visuel façon Disney, mais elles ne marquent franchement pas. L'une d'elles clame qu'on n'arrivera pas à se la sortir de la tête, mais je n'arrive pas à retrouver l'air donc c'est raté. Certains pourront enfin trouver à redire sur des scènes reprises du premier film, mais elles apportent un changement qui a du sens et permettent de souligner qui est le véritable personnage principal, donc ce défaut n'en est pas un pour moi.


Lego 2 a décidément pas mal de tares, mais sans doute moins qu'on ne lui en attribue. Il est un gros cran en dessous du premier film et se montre très inégal, mais les amateurs peuvent néanmoins foncer. Il leur en mettra plein la vue et aura l'occasion de les amuser. J'ai fait le tri entre ce que j'aimais et ce qui m'agaçait, j'en retiens une séance qui n'appelle pas à un revisionnage mais qui s'est montrée bien agréable.

thetchaff
6
Écrit par

Créée

le 26 févr. 2019

Critique lue 198 fois

1 j'aime

thetchaff

Écrit par

Critique lue 198 fois

1

D'autres avis sur La Grande Aventure LEGO 2

La Grande Aventure LEGO 2
RedArrow
8

Les Lego de la discorde

Est-ce que tout est toujours super génial dans la franchise de films Lego ? Apparemment pas. Fraîchement accueilli par la critique et le public US, "La Grande Aventure Lego 2" traîne la réputation du...

le 20 févr. 2019

23 j'aime

La Grande Aventure LEGO 2
trineor
1

Sous la mitraille des hordes « super méga géniales », l'urgence est à renouer un peu avec la lenteur

Attendez, il va me falloir un instant pour laisser décuver mon cerveau, là... c'est que je viens de bouffer deux heures de dressage cognitif impitoyable où toute tentative d'élaborer en toi un...

le 17 févr. 2019

15 j'aime

11

La Grande Aventure LEGO 2
Lordlyonor
7

La grande Aventure Lego 2 ou quand Mike Mitchell m'apprend à devenir adulte à coup de brique dans la

Après un premier film plus que réussi, j'étais obligé de me pencher sur sur ce deuxième film, et bien qu'il soit moins bon que le premier, il en vaut vraiment le détour Les défauts: - Il ressemble un...

le 24 févr. 2019

14 j'aime

3

Du même critique

Seven Sisters
thetchaff
5

On aurait dû faire un calendrier à 5 jours

Des mini-divulgâcheurs se sont glissés dans cette critique en se faisant passer pour des lignes normales. Mais ils sont petits, les plus tolérants pourront les supporter. Seven Sisters est l'exemple...

le 2 sept. 2017

94 j'aime

9

Matrix Resurrections
thetchaff
6

Méta rixe

Cette critique s'adresse à ceux qui ont vu le film, elle est tellement remplie de spoilers que même Neo ne pourrait pas les esquiver.On nous prévenait : le prochain Matrix ne devrait pas être pris...

le 27 déc. 2021

71 j'aime

3

Zack Snyder's Justice League
thetchaff
6

The Darkseid of the Moon

Vous qui avez suivi peut-être malgré vous le feuilleton du Snyder Cut, vous n'avez sans doute pas besoin que l'on vous rappelle le contexte mais impossible de ne pas en toucher deux mots. Une telle...

le 19 mars 2021

61 j'aime

4