Avertissement : Cette petite chronique contient des informations susceptibles de gâcher le suspense du film autrement dit de vous spoileriser du plaisir que vous pourriez trouver à le visionner.
Plutôt bon public pour les films dits historiques et costumés, je suis donc allé voir le cœur vaillant et bien disposé ce film de Bertrand Tavernier.
Je ne m'étendrai pas longuement sur le contexte des guerres de religions qui offre un écrin de choix à ce film, c'est pas du Gladiator ou du Braveheart mais ça reste noblement illustré par le réalisateur même lors du massacre de la Saint-Barthélemy qui aurait peut-être pu bénéficier d'un traitement moins minimaliste. Mais Il ne s'agit pas dans cette histoire de traiter de guerre et de religion mais d'amour et de trahison en groupes de jeunes de la haute classe dirigeante de la France d'alors et donc d'en haut.
Pour résumer l'intrigue, on suit les pérégrinations du Chevalier De Chabannes, qui était précepteur et guerroyeur d'un noble catholique et qui, après avoir combattu du côté des huguenots, est recueilli déçu, déchu et quasi-pendu par le fils de ce même noble catholique. Après un mariage plutôt bien mal arrangé et un vif retour des pieuses hostilités, son bienfaiteur jeune marié lui dit « Puisque je dois aller guerroyer et que tu ne veux plus, tu surveilleras et éduqueras ma femme en toute amitié en attendant que je ne revienne et que je ne monte à Paname faire la teuf, une fois mon stage de validation des acquis militaires (option boucherie religieuse) terminé ».
Le récit est bien plutôt bien rythmé et pas languissant, Lambert Wilson (Le dalaï-chameau) est sobre et convaincant et Raphaël Personnaz (L'homme-trône) excelle dans son rôle de jeune prince insolent et omnipotent. J'ai également bien aimé mais on peut la détester aussi, la composition sobre et ultra-pincée de Grégoire Leprince-Ringuet (Le fort marri) ainsi que la présence vaporeuse et rayonnante de Mélanie Thierry (La jeune marriée). Je ne dirai pas grand-chose de Gaspard Ulliel (L'électrique amant) qui promène son caractère de cochon et sa balafre vaillamment acquise sans réellement convaincre sur ses talents d'acteur plutôt corréziens que scorceziens.
A part ça, qu'est-ce qui cloche donc sinon dans cette historique peloche ? Tout d'abord, le rôle et le comportement anachronique de Mélanie Thierry, car si on comprend bien la place de choix et le libre arbitre réservé aux femmes à cette époque, on se demande un peu quelle mouche l'a piquée pour se comporter ainsi avec l'aval poli de ses pairs.
Ensuite, avec toutes ces masculines paires à ses trousses, on veut bien qu'on ne soit pas loin du siècle de la retenue et de l'amour courtois mais on si on excuse le précepteur Lambert de ne pas céder à un fol appel de la testostérone sur le tard, on se demande bien ce qui retient le Prince Personnaz à part sa mère ou plutôt Bertrand Tavernier lui-même.
Pour couronner le tout, le moment ou Mélanie fini enfin par céder est réellement si capillo-tracté dans son déroulement qu'on se demande comment Gaspard entre et se sort de cette situation sans perdre un seul de ses longs et beaux cheveux. Même avec l'aide de saint Lambert qui se transforme subitement en un incroyable pseudo-lover éventé, voire en entremetteur audacieux et qui se fait l'instrument d'une trahison plutôt énorme envers son jeune bienfaiteur.
La fin du film, et celle de Lambert Wilson, est aussi cousue de fil blanc (ou plutôt de rouge sang) que son début, Je tue une femme, je sauve une femme, je meurs donc heureux. Elle n'apporte pas beaucoup plus au désenchantement final de Mélanie Thierry et à celui croissant du spectateur, évidemment solidaire dans la contemplation béate d'une solitude hivernale à laquelle celle-ci semble être finalement destinée après avoir non seulement appris à écrire mais aussi à carboniser le cœur et les hormones vivaces des mâles environnants.
On a donc un film très sobrement mis en scène et parfois extrêmement bien joué mais qui passe à côté alors que tous les ingrédients étaient presque réunis pour en faire une belle réussite costumée alors qu'on obtient une pâlichonne bluette endimanchée.