Larmes, larmes, tristesse et caricatures pour un mauvais devoir de mémoire...

Il y a des films, dès qu’ils sortent au cinéma, passent à la télé qu’on est obligé de voir pour faire plaisir à sa moitié. Il faut bien que de temps en temps votre moitié ai l’impression de pouvoir choisir le programme (troll amoureux). Pour moi, la Rafle fait partie de ceux-là. Et chaque fois que je regarde ce film, mes sentiments s’opposent frontalement.
Mais tout d’abord, qu’est ce que la Rafle ? La rafle du Vél’ d’Hiv’ (ou Vélodrome d’Hiver) nous raconte le destin, tragique, de milliers de Juifs arrêtés par la police française, détenus au fameux Vél’ d’Hiv’ avant leur déportation vers le camp de transit de Beaune-la-Rolande avant le camp d’extermination, et de la honte, d’Auschwitz.
Nous sommes en 1942, en plein été, le France est sous occupation allemande, et les Juifs sont affublés de l’horrible étoile jaune. Les familles juives tentent de vivre tranquillement avec les autres habitants du quartier de la Butte Montmartre, entre ceux qui les acceptent comme n’importe qui et ceux qui les rabaissent, les humilient. Dans la nuit du 15 au 16 juillet, des policiers français, suite à un accord entre les nazis et les autorités françaises (Pierre Laval (Jean-Michel Noirey)) arrêtent des milieux de Juifs dans Paris, de façon brutale, sauvage et totalement inhumaine. Ils se retrouvent enfermés au Vélodrome d’Hiver. Parmi eux, la famille de Joseph Weismann (Hugo Leverdez), véritable personnage historique et rare survivant de cette rafle.
Vue les méthodes d’arrestation, il est logique de découvrir les conditions de détention absolument abjectes au Vél’ d’Hiv’. Des milliers de Juifs, entassés, sans eau, sans lit, sans rien et un seul pauvre médecin, le docteur David Sheinbaum (Jean Reno) et une infirmière, Annette Monod (Mélanie Laurent). Cette dernière est ahurie en découvrant ce qui se passe ici.
Au bout de quelques jours, les raflés sont envoyés à Beaune-la-Rolande, dans le Loiret, où leurs conditions se dégradent encore davantage. Des gardiens barbares, une bouffe infecte, la maladie, des sévices corporels et le choc psychologique, et ce malgré l’aide d’Annette, qui a décidé de les suivre. Surtout, ce camp est la dernière étape avant d’être envoyé à Auschwitz. Mais les accords entre Français et Allemands ont du mal à être tenu, les enfants vont devoir rester en France alors que les parents partent pour la Pologne…
Le film est émouvant, c’est un fait indéniable, mais il faut dire que Roselyne Bosch, dont c’est le premier film joue sur la corde sensible. Elle utilise tous les éléments des très, très nombreux films d’Occupation. Des enfants, beaucoup d’enfants avec tout ce qu’il faut de scènes clichés et émouvantes pour toucher le cœur du public (la perte d’un copain, la chute d’un doudou, la séparation parents/enfants dans les cris et les larmes…), des personnages historiques ringardisés au possible en devenant pathétiques, comme Pétain (Roland Copé) ou même Hitler (Udo Schenk) que j’ai rarement vu aussi ridicule, il en deviendrait presque un papy rigolo, ce qui est un comble et une honte quand même !
La réalisatrice n’hésite pas non plus à accentuer des éléments historiques pour rendre les événements de son film encore plus larmoyant, comme la vie des Juifs paraissant si tranquille sous l’occupation avant les accords entre le gouvernement et les nazis ; ou en occultant certains, comme en donnant l’impression que la France ne se résume, à l’époque qu’aux Juifs et aux collabos…
Je passe sur le jeu des acteurs… Si Mélanie Laurent s’en sort malgré sa surenchère un peu pesante par moment, ne parlons pas de Jean Reno ne transmettant pas la moindre émotion et donnant l’impression de juste venir réciter son texte, ou de Gad Elmaleh (Schmuel Weismann) qui a du se perdre sur le plateau de tournage tant sa place n’est pas là, ou voulant tout simplement donner un aspect « coluchienne » à sa carrière, sans le succès qui va avec cependant.
Je suis pour le Devoir de Mémoire, cette période de notre Histoire ne doit jamais etre oubliée, et ce pour toutes les raisons que nous connaissons. De tels événements ne doivent jamais se reproduire, la plus grande honte de l’Humanité ayant eut lieu avec le sort réservé aux Juifs. Mais je trouve que traiter un sujet aussi douloureux aussi emplit d’émotions, de souvenirs de cette façon, en privilégiant l’émotion (pour ne pas dire le pathos) pour faire pleurer et ainsi chercher le succès commercial plutôt qu’un succès de mémoire, ce n’est pas beau, ce n’est pas correct.
Bref, au final le film, et la réalisatrice font leur travail, ils nous tirent les larmes, la honte et l’effroi, mais tout le reste est caricatural. Le sentimentalisme à deux francs six sous ne sert à rien et aucun cas ne permet un devoir de mémoire.

Romain_Bouvet
5
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le 24 mai 2016

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Romain Bouvet

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