Cela faisait quelques temps que je souhaitais voir un film de Mikhail Kalatozov au vu de la côte dont il dispose auprès des fins connaisseurs de SensCritique. Quelle ne fut pas ma surprise de constater que son dernier film, La Tente rouge, adaptation d'un roman du même nom, possédait un casting fort attractif (Sean Connery, Claudia Cardinale, Peter Finch, Hardy Krüger) et une musique signée Ennio Morricone. Il ne m'en fallut pas plus pour me lancer à la découverte de cette œuvre trop méconnue qui me semblait parfaitement adaptée afin de m'ouvrir au cinéma soviétique (que je connais peu) en douceur. De plus, le fait que La Tente rouge n'était pas encore évalué acheva définitivement de me convaincre. Je ne risquais donc pas d'être influencé par les critiques dithyrambiques qui poursuivent le reste des films du prétendument virtuose cinéaste.

L'histoire se déroule en 1928 et raconte l'échec d'une expédition en Arctique, menée par le Général Umberto Nobile, à bord de son avion l'Italia. Le récit nous est présenté sous forme de flashbacks par le commandant Nobile et évoque le crash de l'Italia, la survie de son équipage et les efforts externes pour tenter de le secourir.
Les "fantômes" des différents protagonistes impliqués apparaissent en mémoire à Nobile afin de revivre avec lui ces évènements. Tout ceci avec pour objectif final de le juger et de déterminer son degré de responsabilité à la suite de ce désastre.

"Les hommes sont jugés par leurs actions et leurs actions par leur réussite". La Tente rouge est une formidable réflexion sur le commandement et la capacité à mener des hommes (leadership). Quelles sont les qualités requises pour commander ? Est-ce la vanité qui a précipité cette tragédie ? Tout ceci aurait-il pu être évité ? Voilà tant de questions abordées et débattues dans et à travers ce film.

Les acteurs sont tous bons et les inconnus soviétiques n'ont pas à souffrir de la comparaison avec les pointures du cinéma international. Et Claudia Cardinale en infirmière est belle comme jamais (ou toujours, je ne sais plus...). Le réalisme est mis au premier plan et le crash est saisissant d'atrocité grâce aux cadrages à l'épaule reflétant à merveille la panique de l'équipage.
La musique d'Ennio Morricone et Aleksandr Zatsepin est impeccable. Parfois froide et en retrait des évènements dramatiques dépeints sobrement sous nos yeux. Parfois vivante et exaltée comme lors de ces fabuleux plans larges nous laissant admirer les grandes étendues glacées de l'Arctique. Car oui, l'un des principaux atouts de ce film c'est qu'il est visuellement somptueux. Leonid Kalashnikov (ça ne s'invente pas) nous gratifie d'une photographie qui tue (!). Les contrastes de couleurs sont saisissants (ah cette tente rouge...) et malgré la froideur givrée apparente, ces terres désolées et éthérées ne nous sembleraient finalement pas si inhospitalières...

Il faut tout de même parler des points noirs : cette œuvre solennelle devient parfois quasi-risible (le chien de Nobile ou encore la romance entre Valeria et Malmgren) et le propos semble un peu trop bien-pensant par moments.

Pour une découverte c'en est une excellente et je vais donc pouvoir continuer mon initiation à Kalatozov et au cinéma soviétique en général.
Dasson
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le 28 juil. 2011

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