Pour ceux qui ne connaissent pas le réalisateur Jean Becker, il faut juste savoir que ce vieux de la vieille est vraiment considéré comme l'un des réalisateurs intimistes les plus classes du moment. Vu d'un oeil jeune comme le mien, forcément, ça peut faire sourire les érudits, mais sincèrement je suis sorti de ce film émerveillé, comme toujours avec les films de ce vieil homme au talent de conteur inébranlable. M'enfin, il faut avouer que La Tête en Friche joue la facilité en engageant un Depardieu au mieux de sa forme. Depardieu le conteur, le "naif", le "simplet", loin de ces grandes élucubrations. Le Depardieu qu'on aime en quelque sorte.
L'acteur fait des prouesses sans même s'en rendre compte. Son jeu est superbe, les scènes même les plus simples sont extrêmement touchantes et marquent réellement. Le scénario l'aide aussi grandement tant il est pavé de bons sentiments sans en faire de trop, comme dans la vie elle-même tout du moins. L'histoire de la Tête en Friche nous raconte la vie de Germain, un gros homme sans grande éducation avec sa petite vie pépère de "sympa du village" avec sa jeune amie Annette dont il est éperdument amoureux sans même s'en rendre compte. Un jour, entre deux pensées sur la haine que lui porte sa mère, sur son enfance tumultueuse, sur ses amis en mal-être, il se pose sur un simple banc, juste pour réfléchir et compter ses pigeons. C'est alors que débute une amitié splendide et qui crève absolument l'écran entre Germain et Margueritte (avec deux T), une vieille dame que la faucheuse guette de très près. Margueritte est seule, abandonnée par sa famille, mais elle trouve en Germain une simplicité et une naïveté qui lui donnent envie de partager quelques bouts de sa vie, sous forme de lecture de certains des plus grands monuments de la littérature. Albert Camus pour commencer, puis un peu de Jules Supervielle. Bref, Germain découvre l'écriture, mais ne sait pas lire, découvre l'amitié, mais ne sait pas trop ce que c'est. Découvre aussi une mère par procuration qui va lui ouvrir la voie vers un tout autre monde.
Verdict : C'est naif, pas niais. C'est touchant, pas gnangnan. C'est interprété avec brio et s’il n'y avait pas cette fin un tout petit peu trop rose bonbon par rapport au reste du film, on tenait là sans doute un joli conte moderne. Il ne dure qu'une petite heure et vingt-deux minutes, mais sincèrement, ce laps de temps est une vraie merveille. Mieux encore : l'idée de placer le film dans le passé lui donne un aspect rétro ravissant et un petit aspect d'intemporalité qui fait mouche. Ainsi, on évite tout jugement sur la société moderne, tout cliché. On a juste une très jolie histoire, de très bons acteurs et de petites larmes de bonheur à la fin. Mon dieu, je suis trop une gonzesse..