De cris et de larmes

Henri-Georges Cluzot réalise un formidable pamphlet cinématographique contre le conservatisme et le puritanisme des mœurs françaises. Si La Vérité peut, à certains égards, être considérée comme un 12 hommes en colère français, la puissance sociale et politique du message délivré est ici plus puissante encore à mes yeux.

Entremêlant les genres, avec un véritable sens comique dans de nombreux dialogues très subtilement écrits, Cluzot livre un film incroyablement dense, où le spectateur ne sera pas laissé de côté une seule seconde, forçant son attention à chaque scène, chaque dialogue et chaque passage de témoins. Brigitte Bardot est grandiose dans son rôle, d'une profondeur stupéfiante et insoupçonnée. Paul Meurisse, en avocat d'un cynisme sans nom, conduit lui aussi une partition remarquable qui ne laissera personne de marbre. Sur un plan plus formel, la réalisation est particulièrement léchée, le noir et blanc est très épuré, et certains cadres et plans sont parfois stylisés (je pense notamment au regard de Bardot dans le miroir, au début du film).

Théâtre de sentiments déchirants, La Vérité est un film noir monumental, profondément politique et d'une remarque modernité. Si ce n'est pas un 10/10 pour de rares longueurs qu'il livre au cœur d'un propos très dense, c'est d'un immense 9,5 que l'on pourrait le créditer.