Le Bossu de Notre-Dame
6.6
Le Bossu de Notre-Dame

Long-métrage d'animation de Gary Trousdale et Kirk Wise (1996)

L'homme est-il un monstre ou le monstre un homme ?

Noir total, les cloches sonnent crescendo. Les voix harmoniques hérissent ma peau. La puissance dramatique détonne et annonce la couleur...

En l'an de grâce 1462, des gitans foulent le sol de Paris. Frodo, éradiquant tout "mal" sauf celui qui le ronge, obsédé par le contrôle, l'annihilisme du vice et du pêché, persuadé des origines démoniaques de ce peuple qui doit retourner "à l'enfer auquel il appartient", est a la fois juge, bourreau, commandant: il fait exécuter les gitans, sauf le nouveau né d'une courageuse mère qui tenta jusqu'à son dernier souffle de protéger le fruit de sa chair et son sang.

Cela lui aura voulu la mort, mais sur le parvis de la cathédrale, l'archidiacre vient au secours de l'enfant. Frodo , qui allait noyer le petit être, prends conscience du regard divin, qui pourrait lui valoir les flammes de l'enfer; il prends alors sous son aile , mais caché à l'abri de tout, l'enfant de la race qu'il abhorre tant, se persuadant qu'il finira par lui être utile un jour..
(Je fais une petite parenthèse ici pour constater, non sans une grande tristesse, à quel point ce sujet reste d'actualité, avec les immigrés reclus, l'image diabolisé des gitans, et j'en passe...)

20 ans plus tard, Quasimodo déborde l'interdiction ultime de son père adoptif : sortir dehors, à l'occasion de la fête des fous, "poussé" par ses gargouilles (aux nombreuses punchlines que j'aime d'amour), que j'interprète à la fois comme des amis imaginaires soulignant sa solitude extrême, et ses propres dialogues intérieurs. Bien qu'étant préoccupé par la culpabilité face à son père qui l'a logé, nourri et "éduqué" - je dirais plutôt conditionné- sa soif de liberté le pousse à sortir au grand air. Les gitans jamais ne durent derrière les murs, car au delà de sa rousseur et de sa blancheur de peau dû à ses années d'exil dans le sanctuaire créé par Frodo, n'oublions pas que lui aussi en est un...

Nous rencontrons en une séquence Phoebus, Esmeralda et sa merveilleuse chèvre (qui m'a fait mourir de rire plus d'une fois); on y apprends les nobles valeurs de ce dernier, tout en décelant encore une fois , à travers les paroles pleines de mépris d'une mère effrayé par ces gens "différents" et l'attitude de soldats, le racisme ambiant qui pourrit peu à peu la ville de Paris...

J'aimerais souligner à quel point j'ai a la fois détesté et aimé la façon dont le palais de justice à été représenté: un véritable pandemonium ou les morsures du fouet suscitent des cris d'outre tombes, glaçant le sang d'effroi - sauf pour Frollo, qui en redemande et fait clairement comprendre son ambition de purification extrême - comprendre "extermination de race avec une excuse" (encore une fois petite parenthèse, le côté très manichéen , l'opposition Frollo sombre/rusé/cheval noir et Phoebus soleil/noble/cheval blanc est quand même à mon sens le plus gros point faible du film....)

J'ai aimé la représentation du peuple dans ce qu'il à de plus stupide : dépourvu d'empathie et influençable, il célèbre puis maudit Quasimodo selon la personne qui s'élève de la masse. J'ai eue le coeur serrée à chaque fois lors de la scène du piloris; le travail sur l'étalonnage, qui couvre l'écran de rouge, les rires abominables et cruels du peuple sans pitié pour ce qui est laid ou différent (sigh), puis qui repasse au bleu de plus en plus sombre, rappelant l'extrême tristesse et la solitude de celui qui à osé sortir dehors... ce rouge/bleu reviendra plus tard, et j'en reparlerai le moment venu...

J'ai aimé le courage d'Esmeralda qui, contre tout, n'hésite pas à lever le poing pour anéantir la justice - celle même qui veut anéantir son peuple; j'ai aimé sa bonté de coeur, son simple souhait d'aider les miséreux, de "ne plus rester sourd aux mendiants d'amour", en contraste avec tout ces autres personnes issues du peuple qui ne rêve que d'or, de gloire et de reconnaissance.

J'ai ADOREE, j'ai été subjuguée, je suis hypnotisée par le cri du désespoir lyrique de Frodo; rongé par le désir au plus profond de sa chair, il révèle enfin son côté humain. Sa folie de la pureté lui tords les boyaux; l'impie la hante , le torture, dévore son âme , "noircit sa chair de pêché, du désir", celui la même qui le consumme dans les flammes - le feu de l'envie, le feu de la jalousie, le feu de la convoitise - le feu de la folie qui va ravager tout Paris. Le fameux étalonnage rouge/bleu revient, comme si les rôles étaient inversés: en effet, Quasimodo a su trouvé en Esmeralda une amie sincère, tandis qu'elle ne fait que rappeler à Frodo que lui aussi à soif d'amour...
Je suis presque en admiration devant la duplicité de ce dernier, qui elle aussi monte crescendo, à tel point qu'on se demande s'il se ment vraiment abominablement bien à lui même, comme pour éventuellement encore une fois se protéger du regard divin... qui jugerait le juge (jeu de mot pourri, désolé)
J'ai aimé davantage du coup l'ironie de sa chute... le karma a eu 20 ans de retard, mais mieux vaut tard que jamais !

J'ai aimé la cour des miracles pour sa représentation : des bohémiens qui tuent des étrangers sans leur laisser une chance; par la peur et la pression, ils finissent par devenir les monstres que Frodo lui même à créé..

En conclusion, je voudrais revenir sur la "principale" phrase du film , qui est dite au début et à la fin du récit, qui j’espère a su élever la conscience de ceux qui ont regardé le dessin animé, et à laquelle j'espère que tous ont su répondre correctement:

L'homme est-il un monstre ou le monstre un homme ?

(j’espère que vous l'avez chanté aussi !)
Lenoskaa
7
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Créée

le 8 mars 2015

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Lenoskaa

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