Quel titre nul quand même, "Le Chinois". Le titre original, c’est The big brawl (ou Battle creek brawl), qui semble quand même plus vendeur rien que par l’évocation d’une baston… mais non, "Le Chinois", tout simplement.
Ce film de Jackie n’a pas une réputation terrible, mais en même temps il y a d’autres qui ont été de bonnes surprises, et certains mieux notés de sa période Hong-Kongaise que j’ai trouvé infâmes, donc on ne sait jamais…
Ce qui me dérangeait surtout avec cette première incursion de l’acteur dans le cinéma US, c’est que, d’après ce qu’en disait Tony Zhou dans sa superbe vidéo dédiée à Jackie Chan, les américains ne savent pas mettre en scène et monter les combats correctement. Bon, tant pis, j’allais bien voir par moi-même.


Je ne connaissais le film que de nom, et j’ai été surpris par beaucoup d’éléments. Le casting réunit Kristine DeBell (connue, à son grand dam, pour la parodie porno d’Alice au pays des merveilles), Mako, Larry Drake (Darkman) et Lenny Montana (Le parrain) qui joue encore un mafieux.
La BO est signée Lalo Schifrin, le compositeur de Dirty Harry, et justement le thème musical de The big brawl évoque les polars des 70’s, mais avec un peu plus de légèreté.
Et étrangement, le film se situe dans les années 30. Je pensais que l’époque montrerait le héros comme marginalisé en raison de son origine ethnique, mais c’est même l’inverse. Les seuls à faire preuve de racisme sont en fait les criminels, autrement Jerry, le personnage de Jackie, est bien intégré, et a même une copine caucasienne. The big brawl est sorti en 1980, et se montre beaucoup plus antiségrégationniste que bon nombre de films plus récents. Quand on voit le très mauvais Shanghai kid, sorti 20 ans plus tard, on dirait qu’on a fait un énorme bond en arrière.
Il en est de même pour la famille de Jerry, qui a un frère médecin et un père restaurateur, qui voit d’un mauvais œil la pratique des arts martiaux par son fils.
Ce dernier gagne sa vie comme il peut, en faisant usage de ses talents. Il participe notamment à une course de rollers où tous les coups sont permis ; une séquence qui, mine de rien, m’a impressionné.
Aujourd’hui, on filmerait une course comme ça avec des valeurs de plans variées, dont certains au plus près des personnages. Ici, il n’y a que des plans larges, et peu de coupes, mais ça donne à un aspect plus brut et plus réaliste à la séquence, que j’ai trouvé très prenante. On voit les concurrents réellement se donner des coups, se tirer et se pousser, étonnamment presque sans jamais tomber. Les bruitages de coups étouffés font plus crédibles que les sons trop nets dont on a l’habitude, et le brouhaha constant de la foule a un effet immersif.


Tout dans The big brawl est axé autour de l’action, sans que le scénario manque de logique pour autant. Chaque combat a sa place dans l’intrigue : un chef mafieux persécute le père de Jerry qui se frotte une première fois à ses hommes, puis le parrain décide d’en faire son poulain pour un tournoi, mais il a besoin de voir ses compétences lui-même, etc.
Certes on se rend compte que l’histoire ne sert que de prétexte, mais elle tient quand même debout ; même si la fin abrupte ne donne pas de conclusion à certaines sous-intrigues.
Certaines cascades sont très gratuites, comme quand Jerry fait sa gymnastique au sommet d’un pont, comme ça, pour le plaisir, mais c’est impressionnant.
Au moins, on ne peut reprocher le film d’être avare en action. Jackie Chan réalise encore des prouesses, et le seul reproche que j’ai à faire à certains combats, c’est un léger manque de dynamisme qui décrédibilise les attaques, et une trop grande présence des reaction shots qui interrompent l’action.
Dans la dernière demie heure, lors du tournoi de Battle creek, le héros affronte surtout des gros bras, ça change donc des types agiles contre qui il se bat généralement dans ses autres films, et les coups sont donc portés avec moins de vivacité. Mais justement j’apprécie le côté plus pesant et organique de la lutte.
Et il y a dans The big brawl une très bonne alliance entre l’action et l’humour, notamment lors d’une séquence hilarante où Jackie fait mine de ne pas faire exprès de frapper ses adversaires.
L’humour du film en général est plutôt absurde, mais il y a des situations très drôles, qui passent beaucoup mieux pour moi que dans les comédies Hong-Kongaises de Jackie.
La VF ajoute une petite touche comique, sans être ridicule pour autant (déjà, heureusement, aucun des doubleurs n’a pris de faux accent asiatique). Je retiendrai cette réplique, venant de la mère du Parrain : "Peut-être qu’on devrait lui sortir la zézette et la piétiner, il comprendrait".


Une bonne surprise, qui allie comme il faut un talent de Hong-Kong aux règles du cinéma Américain. The big brawl fait partie de ces divertissements comme on n’en fait plus, entre le film de tournoi et la comédie de baston du type de Doux, dur et dingue.

Fry3000
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le 20 mai 2016

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Wykydtron IV

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