Après mon avis assez mitigé concernant Au Poste !, j'avais peur que Dupieux ne tourne en rond, qu'il ait déjà tout dit avec le no reason de Rubber et le scénario hyper-alambiqué de Réalité. Dupieux ne manque pas de bonnes idées, mais dans certains de ses films, j'ai le sentiment qu'il ne parvient pas à aller jusqu'au bout et bouleversant complètement la vision du spectateur (mis à part Rubber et Réalité).
Avec Le Daim, il propose une histoire simple, dans un film un peu moins burlesque qu'à l'accoutumée. Je reprochais justement à Wrong Cops son scénario qui partait dans tous les sens et son manque d'objectifs clairs. Dans Le Daim, Jean Dujardin est un homme dingue de son blouson en daim, et l'objectif est explicitement énoncé dans une scène de dialogue entre le blouson et lui.
En effet, ce blouson 100% daim est filmé comme un personnage, avec un système de champ-contrechamp - ce qui n'est pas sans rappeler Rubber - et le doute est alors permis : soit Jean Dujardin est fou, soit c'est son blouson qui, un peu comme la voiture de Christine, le contrôle et lui dicte ce qu'il doit faire.
Cette dualité est complètement anéantie par la narration de Dupieux, où tout repose sur un chat de Schrödinger : le blouson est et n'est pas conscient, il est dans une superposition d'états, au même titre que les dimensions de Réalité, ou les acteurs-spectateurs de Rubber. Dujardin est filmé comme un fou, son blouson aussi.
La fin pourrait apporter des éléments de réponses, le blouson se trouvant un successeur... Mais si le film parle de solitude et dénonce une société basée sur l'image, on pourrait très bien argumenter que le personnage d'Adèle Haenel subit la même folie solitaire que Dujardin, elle dit d'ailleurs être aussi seule que lui.
Le Daim est brillant derrière ses airs absurdes, et il pose finalement plus de questions que n'apporte de réponses. Comme un eczéma du crâne, il propose une confrontation de possibilités, différentes explications possibles, le tout dans une mise en abyme qui devient une véritable marque de fabrique. Mais il ne faut probablement pas chercher de réponses concrètes : tout n'est probablement que no reasons.