Audrey Tautou n'est jamais aussi bonne que lorsqu'elle doit jouer une grande courge idiote et naïve, elle est d'un naturel en faisant cela qu'on se demande si Jeunet l'a simplement laissé vivre ou si c'est bel et bien le (seul ?) rôle de sa vie.
Jeunet est fidèle à lui même: lumière verte/jaune dégueulasse, scénario niais tout plein (oh oui Amélie, fait le bonheur autour de toi), gros plans agressifs et direction d'acteur théâtrale où surjouer est la règle d'or.

Pourtant on a ici le meilleur film de son auteur "tout seul" (sans Marc Caro), il maitrise parfaitement son sujet avec ce film ultra niais, caricatural, outrancier et superficiel. Un film à l'image du cinéma de Jean-Pierre Jeunet donc. Quand le fond et la forme se télescopent ainsi généralement ça fonctionne bien.
C'est con à dire mais ça fonctionne alors même que la vision carte postale de Paris couplée au ton moralisateur omniprésent (le brave arabe vengé de son méchant patron pas beau) ont de quoi faire dégueuler un Bisounours.

Ainsi tout le côté naturellement insupportable de la mise en scène de jeunet se transcende au contact de cette histoire conne comme tout. De tout ceci ressort un film étrangement agréable à suivre.
C'est comme quand Peter Parker se fait mordre par une araignée irradiée: Peter Parker reste toujours un post-ado débile et l'araignée reste un rat de labo à huit pattes mais les deux réunis ça fait Spider-man. Une sorte de miracle où la convergence des forces obscurs donne de la lumière, moins par moins égale plus.

On peut reconnaitre que Jeunet fait preuve d'une certaine inventivité dans sa mise en scène. Ca reste toujours aussi niais, toujours aussi caricatural et toujours aussi peu subtil mais ça a le mérite d'être, dans ce contexte, tout à fait pertinent.
Dans tout ceci on trouve aussi Yann Tiersen qui, s'il ne signe pas là son meilleur travail, s'intègre parfaitement à l'ambiance du film avec ses mélodies efficaces.

S'il ne tient pas vraiment le choc des visions multiples (méfiez-vous, à haute dose on choppe le diabète) ce film se laisse regarder sans problèmes et même avec un certain plaisir.
Sans cesse sur le fil du rasoir ce film qui a tout pour déplaire s'en sort finalement plutôt bien et atteint son but: rendre heureux.
La carrière de Jeunet a prouvée qu'il n'était pas un cinéaste polyvalent. Cependant "Le fabuleux destin d'Amélie Poulain" montre que, lorsqu'il s'agit de mettre en image une histoire bête en en faisant des tonnes, il est vraiment l'homme de la situation.
Jeunet accouche là d'un monument de niaiserie presque fondamentale tant étaler autant de guimauve sans que cela soit complètement indigeste est sans doute la preuve d'un certain type de talent.
Vnr-Herzog
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le 4 juil. 2010

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