Il était une fois Le mariage de Maria Brawn , un film allemand qui se déroule dans l'Allemagne post-nazi de deux heures et visionné un soir après une bonne journée de cours... Rien qui laisse présager un once de transcendance ou une envolée lyrique sur « Senscritique » le lendemain. Ce fut pourtant 2 heures de fascination pour le talent incontestable de Fassbinder.

Nominé au Golden Globe Award pour « le meilleur film étranger » en 1980, Le Mariage de Maria Braun conte le portait d'une femme amoureuse. L'histoire s'inscrit dans les décombres de la fin de la guerre puis dans le reconstruction politique de l'Allemagne. Jeune épouse, elle se construit seul à cause d'un mari absent, c'est alors que commence une ascension sociale fulgurante, elle devient la muse d'un magnat économique de la nouvelle Allemagne. Une intrigue romanesque et mélodramatique qui est marquée par un schéma narratif brillamment complexifié. Cette histoire est au service d'une réalisation remarquable.

Cette savante histoire se compose de plusieurs étages de lectures toutes complémentaires : il y a en effet comme un rez-de-chaussée le passé et la guerre, le première étage peut être vu comme l'illustration du miracle de la reconstruction de l'économie allemande et enfin au niveau supérieur l'intrigue proprement dit : la vie de Maria Braun, Cette dernière est donc un miroir de l'Allemagne post – nazie, de son économie, de sa reconstruction et de sa répercution sur les femmes.

L'histoire recherchée que dresse Fassbinder est au service d'une savante mise en scène. Les notions de répétition liées à la symétrie représentent un caractère principal du cinéma de Fassbinder, il en est également un des grands points forts. La séquence de début rejoint avec éclat la séquence finale, on peut y retrouver le contrat de mariage transformé en contrat testamentaire, la robe de marié est changée en robe blanche et, bien sur, l'explosion de guerre devenue explosion « accidentelle ». La répétition se voit dans les séquences comme celles du restaurant dans la gare et la rencontre entre Maria et Oswald. Dans ses deux séquences, le plan de début de séquence est également celui de fin. Cela découle d'une thématique formelle qui aboutit à une tonalité harmonieuse. Cette notion de symétrie est directement associée à la magistrale gestion de l'espace effectuée par Fassbinder. C'est avec subtilité que le réalisateur allemand dispose l'espace des décors du film, il matérialise avec goût la psychologie de ses personnages à travers leurs déplacements. Les différentes séquences où Maria rend visite à son mari traduisent la lassitude qu'elle ressent au fur et mesure que l'histoire avance. C'est par la simple mais ingénieuse disposition de la caméra que Fassbinder traduit cette état. En effet, séparé de son mari par des barreaux dans les première séquences, elle expose néanmoins une attitude joviale, mais dans les séquences qui suivent, le couple est ensemble dans la même pièce mais la caméra est cette fois ci séparée d'eux par les barreaux, Maria apparaît alors déjà moins heureuse. La gestion de l'espace se trouve aussi dans les déplacements de Maria dans tous les lieux qu'elle fréquente au cours du film. Elle paraît en effet perdue dans la grande maison où elle réside à la fin du film contrairement au logement atypique mais moins superficiel qu'elle possède au début de l'histoire. Il en va de même pour cette logique de la gestion de l'espace dans la séquence où Maria et Bill font l'amour. C'est effectivement séparément que Fassbinder les filme, ils ne sont jamais dans le même plan. Ce découpage entraine une impression d'anormalité qui conduit au sentiment illégitimite de leur relation.

La prestation assiégeante d'Hanna Schygulla, rend le spectateur ébloui par l'évolution du personnage qu'elle incarne. Cette progression repose dans les traits de personnalité qui qualifient Maria, la puissance de son amour, l'ambition en l'avenir et une lgrande ténacité. Maria est une femme à part, ni pure héroïne, ni personnage infâme. Loin des personnages manichéens, Hanna Schugulla interprète son personnage avec un naturel étonnant.

Le Mariage de Maria Braun permet au réalisateur d'incorporer sa vision sceptique sur la société allemande d'après guerre. Rainer Werner Fassbinder développe aussi un univers historique qui sonne juste, la psychologique allemande, le marché noir et , de manière générale, la reconstitution historique marque une réelle vraisemblance. La reconstitution historique, l'intelligente mise en scène permettent donc au film de retranscrire de manière subtile ses différents étages de narration. Récompensé par le prix du Meilleur Film allemand en 1979 pour Rainer Werner Fassbinder, Le mariage de Maria Bran étonne et fascine par sa savante réalisation ainsi que l'interprétation magistrale de Hanna Schygulla.
Fennec91
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le 22 janv. 2011

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