Rires, larmes et pétages de tronche

Il est surprenant de constater que, dès son premier film, Sammo Hung imposait déjà son style, à savoir un mélange énervé de comédie légère et d’ultra-violence osée, au sein duquel la mort s’impose comme une étape nécessaire vers l’accomplissement personnel, puisque c’est elle qui motive l’énergie de la vengeance. Ici l’histoire est d’une simplicité insolente, mais permet au chubby sur ressort de tirer une belle énergie de toute ses chorégraphies, même si, premier essai oblige, on l’a connu bien meilleur par la suite à ce niveau là.


Vraiment, ce qui marque dans ce moine d’acier, et qui force le respect, c’est sa tonalité extrême. Il n’est pas évident d’assumer une telle orientation alors qu’on réalise son premier film ; filmer un viol plein cadre, sans détourner l’objectif une seule seconde, parce que c’est ce moment précis qui justifie le massacre final, est loin d’être anodin. Sammo a réfléchi son histoire, possède déjà un contrôle total des thématiques qui l’intéressent et abuse d’un schéma narratif empruntant aux plus badass des revenge movies qui fonctionne à tous les coups : quand les salopards en prennent plein la tronche, le public jubile. Certes l'homme se cherche un peu dès qu’il s’agit de mettre en valeur sa pratique martiale, mais dans l’ensemble c’est sacrément convaincant, ses idées font mouche, en témoigne le dernier duel à 8 jambes lors duquel les participants s’échangent leurs adversaires respectifs.


Audacieux, c’est certainement le mot qui qualifie le mieux ce premier film d’un cinéaste qui a prouvé, à de multiples reprises par la suite, qu’il était l’homme sur qui pouvaient compter les amateurs de Kung-fu radical. Au début des années 70 quand il façonne cette première pierre de sa filmographie, il n’était certainement pas monnaie courante de voir des actrices dénudées se faire maltraiter par leurs homologues masculins — quelle belle image de la femme vous nous proposez encore maître Sammo ( :p)— dans un film de Kung Fu vendu aussi pour ses inserts comiques, généralement la marque des péloches plus familiales. Et aujourd’hui encore, alors que les démonstrations d’ultra-violence sont sur tous les écrans, Le moine d’acier fait son effet parce que sa violence est totalement inattendue au vu du contexte. Le sentiment de révolte qui en découle est d’autant plus intense, comme l’envie qu’elle génère chez le spectateur de voir se précipiter les événements menant au final qui les libérera enfin de leur frustration.

oso
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le 26 févr. 2016

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