Un titre de film nul, pour un film très beau

En 2003 j'avais neuf ans, et "Le Monde de Nemo" était le film que mes parents m'ont emmené voir au cinema. J'en ai un très bon souvenir, et en le revoyant aujourd'hui, je l'aime toujours. Malgré quelques défauts et un manque d'imagination qui dénote dans le catalogue du studio, ce film brille par une histoire universelle et touchante, des personnages réussis et bien sur, un résultat visuel superbe.

Marin est un poisson clown comblé : il s'apprête à être papa avec sa femme, Corail, et vient de trouver une nouvelle anémone pour sa famille et lui. Mais tout bascule lorsque un barracuda attaque la famille et la décime, ne laissant comme seuls survivants que lui-même et l'un de ses enfants. En hommage à sa femme, il l'appelle comme elle le souhaitait Nemo, et lui promet de le protéger. Ce traumatisme dans la vie du héros (qui qu'on se le dise n'est pas Nemo mais bien Marin... encore un titre français nul) est la base du récit. Le père devient donc classiquement surprotecteur vis a vis de son fils, tandis que ce dernier grandit et souhaite naturellement acquérir sa petite indépendance. De cette situation naît une incompréhension, et des conflits entre le père et le fils. Lorsque l'enfant s'éloigne du bord pour désobéir à son père et de là lui prouver qu'il peut se débrouiller seul, il se fait enlever par un plongeur. De là commence le voyage de son père pour le retrouver. Si l'evolution de Nemo qui prend confiance en lui loin de son père et apprend à réellement être fier de celui-ci n'est pas indigne d'intérêt, c'est celle de Marin qui a sans doute contribué au succes du film, puisque mettant en scene le voyage autant effectif que mental d'un père pour retrouver son fils, apprendre à le laisser grandir et agir, et apprendre à faire confiance aux autres et en la vie. Ce theme avait toutes les possibilités de toucher le spectateur, mais il loupe de peu son but. Bien sur, cette évolution est plaisante et touche, mais peut-être pas autant qu'elle pouvait idéalement le faire. Il y a donc un léger sentiment de frustration ici, tant je ne peux m'empêcher à ce qu'aurait pu être ce thème de la surprotection parentale et ce qu'il est effectivement. Peut-être le fait de passer de Marin à Nemo brouille la quête, cependant, comme je pense que montrer Nemo était également important, je pense qu'il y avait aussi un leger manque de développement à ce niveau. Mais le récit reste agréable à suivre, même plus que cela. Entre son action, quelques scènes trés réussies, il brasse plusieurs thêmes. La relation entre père et fils évidemment, mais aussi l'écologie, en filigrane et dont le plaidoyer se fait discret mais bien visible, que ce soit à travers l'acte même du dentiste, les decors (la pollution autour de Sydney) ou encore caché derrière l'humour (les poissons de l'aquarrum à moitié fous à force de vivre enfermés). Un autre theme est le handicap. Nemo a une nageoire atrophiée et donc des difficultés pour nager, tandis que Dory a des troubles de la mémoire... malheureusement, ce theme rarement vu en animation passe totalement à la trappe. Dommage... Il ne sera traité finalement que dans "Le monde de Dory" en 2016. De plus, il propose un humour, certes parfois un peu lourd, mais généralement sympathique.

Les personnages sont plutôt réussis. Si Nemo est un petit garçon somme toute assez classique mais attachant, Marin est un personnage très attachant et assez crédible. D'ailleurs à ce sujet je dois souligner la performance de Franck Dubosc qui, pour ce rôle, a réussi à s'effacer derrière le personnage, faisant oublier l'acteur se cachant derrière. Une jolie performance. Quant à Dory, cette femelle de poisson chirurgien est tout simplement irrésistible, déjà parce que ses troubles de la memoire la rendent très drôle, mais aussi, et surtout, parce que cet humour ne la confine pas au simple rôle de faire-valoir. Dory a un réel rôle dans le récit et sait même se montrer touchante. Un personnage genial, donc. Les autres personnages secondaires, antagonistes comme protagonistes, sont dans l'ensemble sympathiques, même si pas attachants. Ils ont surtout un rôle comique (comme les poissons de l'aquarium ou les mouettes) ou de rencontres amicales ou non (la baudroie, Darla, la baleine ou les méduses...) voire les deux (les requins.). Ils sont trop nombreux pour s'y arrêter individuellement.

Mais si "Nemo" a eu le succes qu'on lui connaît, c'est aussi grace à son apparence. Jamais la mer n'avait été aussi belle dans un dessin-animé. Criant de réalisme, les fonds marins sont tout simplement superbes ici, que ce soient les recifs de coraux, les abysses ou le port, le film est magnifique. Plus de dix ans après, le film n'a quasiment pas vieilli, et même pas du tout si on ne considère que les scènes sous-marines (largements majoritaires). Sa bande-son, par contre, est assez discrète et ne marque pas les esprits.

"Le monde de Nemo", si il n'est pas non plus un chef-d'oeuvre selon moi, n'en reste pas moins un beau film, reussi et captivant. Son succes n'est pas difficile à comprendre.