Evidemment ça parlera beaucoup moins à ceux de ma génération, mais il faut bien admettre que pour un film de commande c'est plutôt une réussite. Duvivier s'était jusqu'ici illustré dans des films assez pessimistes ("La belle équipe", "Pépé le moko"), ce qui ne laisse rien présager de bon quand on connait les échecs artistiques que de grands cinéastes de l'époque ont rencontrés quand ils se sont frotté à la comédie : Clouzot avec "Miquette et sa mère", Allégret avec "Mam'zelle Nitouche", Pagliero avec "La rose rouge", Delannoy avec "La route Napoléon"...
Ici Duvivier parviens à se réapproprier cette histoire ingénieuse (inspirée d'une série de nouvelles à succès de Giovannino Guareschi) sur la rivalité entre un curé et un maire communiste dans un petit village Italien à une époque ou l'Italie était dans un climat politique instable.
Les dialogues de René Barjavel sont savoureux dans les moments de dispute entre les deux lurons. Derrière leur hostilité se cache une camaraderie virile et cela amène un tas de situations très amusantes. On a aussi le coup classique de la romance entre un jeune communiste et une jeune catholique, avec pour ange gardienne la vieille ex-institutrice du village nostalgique du temps de la monarchie. En plus de la voix de Jésus on a une narration en voix off ce qui fait très "cinéma de papa". Mais les gags fonctionnent et les différentes intriguent s'entre-alimentent assez bien.
Tout cela est mit en image avec bonhommie par Duvivier qui insuffle à la comédie un peu de son pessimisme par moment.
On ne doute pas des raisons du succès colossale de ce film dans le contexte de l'époque (12 millions d'entrées en France). Voir des communistes et des cathos réac se crêper le chignon tout en étant dans le fond bons copains devait avoir quelque chose de réjouissant à l'époque. Et on le ressent encore aujourd'hui, car cet état d'esprit que le film semble montrer comme typiquement Italien a également quelque chose de très français.
Bien sûr le talent de Fernandel, qui trouve là son rôle le plus iconique, y est pour beaucoup dans la réussite du film. Il est irrésistible dans ce rôle de curé au caractère instable, soumis avec plus ou moins de bonne fois à la parole de Jésus avec qui il converse comme un vieux camarade.
On oubliera pas cette légende du rire de si tôt.