À l'instar de Sofia Coppola et de ses Proies en mai dernier, Michel Hazanavicius venait insuffler un peu d'humour et de légèreté à une sélection canonise bien austère, avec Le Redoutable, biopic ludique et charmeur autour du plus emblématique artiste de la Nouvelle Vague : Jean-Luc Godard.


En ce qui me concerne, il ne faut pas beaucoup me pousser pour écrire du mal de Michel Hazanavicius ou Jean-Luc Godard. De La Classe américaine à OSS 117, en passant par sa petite contribution aux Infidèles, je n'ai jamais véritablement accroché à l'humour du premier, tandis que le second, de Pierrot le Fou à l’ahurissant Adieu au langage, me laisse à chaque fois dans un état d'incompréhension et d'agacement que je ne saurais m'expliquer. C'est donc avec une crainte considérable (à laquelle s'ajoutait ma répulsion pour le genre du biopic) que je me rendais à bord du Redoutable et pourtant, miracle, le film est un bonbon, à la fois acidulé et bourré de charme.


Adapté d'une autobiographie d'Anne Wiazemsky, le long-métrage s'ouvre sur cette phrase magnifique : « J’avais la chance d’admirer l’homme que j’aimais ». Moins une hagiographie qu'une histoire d'amour avec ses hauts et ses bas, ce portrait de Godard nous est en effet présenté à travers le regard de sa compagne de l'époque, interprétée à l'écran par la belle Stacy Martin. Godard romantique, mais pas que, puisqu'il s'agira également de présenter le cinéaste dans toutes ses contractions, à une période charnière de sa vie, lorsqu'il fait l'erreur de mettre de côté (voire de renier) sa carrière au profit de son engagement politique. Godard acerbe, tout en dialogues ciselés et punchlines savoureuses.


Non sans une pointe de mélancolie, Le Retoutable dégage quelque chose de véritablement malicieux dans son écriture comique et sa mise en scène. Comme depuis ses débuts, Hazanavicius se pose en pasticheur, procède par collage de citations visuelles et s'empare ici des expérimentions de la Nouvelle Vague. On rit notamment de bon cœur lorsque le réalisateur s'amuse à briser le quatrième mur (à chaque fois de manière différente et inattendue). Malgré quelques lenteurs, les blagues s’enchaînent avec une fluidité et une finesse que je n'osais espérer (s'il n'y avait qu'un « sketch » à retenir, je choisirais ce plan-séquence hilarant en voiture, réunissant Godard et ses proches dans une folle dispute cinéphile).


Si la prestation cabotine et zozotante de Louis Garrel dans le rôle du maître peine toujours à me convaincre, j'avoue avoir été totalement conquis par le personnage. Serait-il temps que je me réconcilie avec Michel et Jean-Luc ?


https://amaurycine.blogspot.com/2017/09/le-redoutable.html

Amaury-F
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le 9 sept. 2017

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Amaury F.

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