Un mauvais film pas désagréable à regarder. Mauvais parce que le parti pris du réalisateur consistant à s’emparer du témoignage d’une éphémère épouse de Godard en 1967-68 pour lyncher le réalisateur n’est pas d’une grande élégance. On peut s’interroger sur le message contenu dans « La chinoise », film dont Godard semble mal digérer le mauvais accueil en 1967. Mais pour démontrer que le réalisateur s’est fourvoyé, il aurait fallu essayer de comprendre comment ce maoïsme délirant s’est installé dans les milieux intellectuels que fréquentait celui-ci à l’époque. En lieu et place, Hazanavicius verse au dossier des parties de jambes en l’air et des scènes dans lesquels le maoïste suisse se comporte comme un butor. Quant il se moquait d’OSS 117, il était tordant parce qu’il n’y avait pas de cible désignée (à part René Coty); ici, tenter de refaire du Godard en se moquant de Godard, n’est pas du tout drôle, y compris pour ceux ne vouent pas un culte à l’étoile de la Nouvelle Vague. Pourtant, cela se regarde sans ennui. Peut-être à cause du côté reconstitution historique qui sert de prime de rattrapage à une création incapable de saisir l’air de ce temps. Les décors, les costumes, des voitures d'époque à la pelle, les affiches, tout cela est superbe. La villa de Lazareff sur la côte d’Azur est un must de la déco années 60. Les acteurs sont très bien et les seconds rôles surprenants (Romain Goupil en flic, Mocky en « vieux con »…). Mais ce qui est à retenir et qui sauve le film, c’est l’histoire d’amour de cette pauvre Anne trimballée d’un bout à l’autre du film et qui lui donne ce côté regardable ; une histoire conventionnelle bourgeoise, juste ce que Godard détestait. Mauriac aurait apprécié.