Étonnant de voir comment les deux premiers volets de cette trilogie ont mis la barre si haute. Si George Lucas peut déjà se soulager d’en être arrivé à ce stade de clôture, il y a pourtant des contraintes fatidiques afin d’éviter de boucler les enjeux trop rapidement. L’univers qu’on nous a explosé est dense, mais le film du gallois Richard Marquand pense à revenir sur les pas de ce qui a fait le succès d’autrefois, sans pour autant trahir les codes qu’on a pris le temps d’assimiler. Et nous reconnaissons un peu de schéma de son récent « L'Arme à l'œil », qui complexifie l’affaire d’espionnage à la continuité de la saga. Et en parlant de cela, Lucas et Kasdan nous entraînent dans une dynamique familiale forte, où il sera question de légitimité et de démonstration de Force, celle qui ne repose pas sur la foi, mais la raison. On entre dans l’ultime acte qui relève d’une dernière charge, car la guerre finale est sur le point d’éclater.


Nous avons à faire à une boucle, régie par la destinée, mais est-ce que l’homme peut trancher en sa faveur ? Tout ce qui nous a mené jusqu’ici, c’est une fatalité et ce serait trop aisé d’aboutir à une conclusion aussi tragique. Après une nouvelle ellipse, nous retrouvons nos personnages beaucoup plus mûrs et plus décisifs. Chez Luke, on reconnaît son évolution à travers ses couleurs, plus sombres, afin de contraster avec l’adolescent rebelle et fermier du premier volet. Il se met donc à la hauteur de Dark Vador, afin d’épouser la révélation de l’épisode précédent. Le héros est donc fasciné par ce côté obscur et les influences qu’il entraîne. Le penchant intimiste est toujours d’une précision que l’on ne regrette pas sur un premier acte fort en tension. L’écriture des personnages est toujours aussi soignée, tout en prolongeant les plaisirs, là où on les avait laissés. Cependant, l’aventure est loin d’être terminée et c’est à ce moment que niveau scénaristique et prise de risque, on se perd en peu.


Le contraste avec un nouvel environnement est dépourvu d’hostilité, afin d’apprécier une touche plus humoristique et simplette, à l’image d’une tribu poilue, dont le Wampa n’a rien à s’envier. L’idée derrière cette mignonne machinerie est le merchandising à coup sûr, mais il se révèle trop frontal pour qu’on l’accepte, bien que cela donne plus de crédit à notre C-3PO préféré. C’en est même presque risible, car l’opposant se montre rarement menaçant, comme il l’avait été précédemment. Doit-on y voir une fissure, à la suite d’une montée en puissance de la liberté ? À cogiter. D’un point de vue tactique, le stratège ne pose sans doute pas ses meilleurs atouts pour la survie et cela se sent à un moment donné. Et bien que le rythme ralentisse légèrement dans cette seconde moitié, il faudra également s’attendre à un déchirement dans le groupe de héros, qui visiblement, ne partageront pas le même objectif. Han et Leia babysittent un front hasardeux, la flotte rebelle couvrent un périmètre que l’on a déjà vu dans le Nouvel Espoir et Luke s’isole dans sa tragédie grecque. Le mariage est indigeste, mais une fois que l’on aura tranché en faveur de notre sensibilité, le spectacle sera au rendez-vous. Mais cette division aurait mérité un meilleur traitement, malgré les directions évidentes qu’empruntent les protagonistes, au bout de leur parcours.


« Star Wars : Le Retour du Jedi » signe tout de même un magnifique dénouement, malgré ses défauts, car on peut se permettre d’en dissiper dans de grandes qualités, en pensant aux effets du dernier assaut spatial. L’ambiance résonne comme épique, ce qui nous a bien manqué depuis Yavin 4. Et en jonglant entre le drame d’un Empereur confiance et la flèche dorée qui s’abat sur l’esprit du mal, la saga signe une conclusion avec ingéniosité et avec émotions. Le rapport père-fil et la source de la rédemption, ou encore de l’oubli, est une épreuve sacrificielle qui est tenue à la manière d’un Jabba, trop gourmand pour se pencher sur le plus important, à savoir la quête du destin. Et ainsi naît un mythe en trois épisodes indissociables, qui regorge d’une multitude de niveaux de lecture. Chacun est libre d’interpréter son voyage qu’il emprunte aux côtés des personnages ou de cet univers qui n’a pas encore fini de nous surprendre. Que la Force soit avec vous !

Cinememories
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le 15 déc. 2019

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