Le ruban blanc, c’est un village où chaque personnage trouve sa place et incarne un symbole aussi fort que déroutant. Il arrive dans ce village une succession de drames, d’accidents, inexpliqués.
C’est dans un silence, et au travers de ce noir et blanc qui vient éblouir nos écrans de clarté et de pureté, que se meuvent lentement les personnages.
Il y a ces stéréotypes qu’on brise, comme ce docteur qui, comme son titre nous l’impose quasi instinctivement, nous inspire un respect, une sympathie. Censé être le protecteur du village, qui soigne et accompagne. Sa véritable nature nous éclate au visage, et cette découverte est d’une violence sans pareille. Il n’est qu’un homme qui abuse de sa jeune fille docile et encore naïve de 14 ans à peine. La scène où l'on découvre avec certitude de l'inceste qui se joue, se fait au travers du regard du jeune frère qui n'arrivant pas à dormir, cherche sa soeur. Le petit garçon ne perçoit rien tandis que la vérité se révèle à nous sans ambiguité et il écoute les mensonges de sa grande soeur qu'il croit comme on croit à tout quand on est petits. Cette scène marque aussi le passage contraint de sa grande soeur dans le monde adulte, dans le monde du mensonge, à contourner la vérité. Chose qu'elle n'arrivait pas à faire avant comme le démontre la scène où, lorsque son petit frère lui demande si leur maman est morte et non en voyage, elle ne peut que répondre oui, car elle ne sait pas encore mentir.
Dans cette stratosphère où deux mondes s’opposent, celui des adultes et celui des enfants, le premier croit gouverner de façon stricte et bienfaisante sur le deuxième. Mais la vérité est que les enfants ont leur monde à part, silencieux, vicieux et corrompu par ses mêmes adultes qui croient faire leur bien.
Peu à peu, on découvre ses enfants violents, les aînés principalement, dépourvus de sentiments qui ont perdus leur innocence. Les enfants sont le symbole de notre avenir, et Haneke laisse ainsi présager du pire.
Cependant, les plus jeunes enfants ne sont pas encore atteint, ils conservent leur candeur infantile, et naïve. Cette naïveté touche au sublime dans les scènes où, le plus jeune fils du pasteur vient le voir dans son bureau pour, une première fois garder un oiseau trouvé afin de le soigner, et la seconde fois pour donner à son père un oiseau en échange de celui qui est mort, parce qu’il le trouve « trop malheureux ».
Ce film c’est un méli-mélo de méchanceté sournoise qui se développe en silence, qui grandit car les adultes refusent de la regarder en face car ils n’en sont que ni plus ni moins les initiateurs bien involontaires. Assumer que leurs propres enfants aient pu commettre de tels actes
(car en effet l’instituteur du village accuse à demi-mot les enfants d’être à l’origine des drames du village)
, admettre ceci reviendrait à remettre en question leur éducation et eux-même et cela ils ne le peuvent alors ils se mentent. Alors qu’ils prônent haut et fort la vérité comme symbole de pureté. Leurs idéaux, les fondements de leur vie, de leur éducation se fracassent alors.
Cette théorie n’est jamais confirmée cela dit. On devine pourtant la motivation de ses actes. L’agression du fils du baron symbolise le rejet de la classé aisé, quant au fils handicapé de la sage-femme, il est cette différence inacceptable.
Dans cette terreur ambiante qui s’exécute pourtant dans un silence et un calme déconcertant, demeure l’espoir symbolisé par le jeune instituteur et la jeune nurse qui tombent amoureux et décident de se marier.
Il y a tant de scène à décortiquer, tant de choses à dire de ce film, de ce trésor, de ce bijou.
Il ne se regarde pas, il se lit entre les lignes.