Tout ce que j'aime : du parti pris scénographique, richesse scénaristique, une interprétation nuancée, une construction soignée, le souci du détail, des échos internes. Largement sous-estimé, peut-être pour son classicisme apparent, ou peut-être parce que ce n'est "qu'"un remake, Mr. Ripley mérite d'être considéré très attentivement. L'ensemble très cohérent malgré son hétérogénéité, très lisible malgré sa complexité, relève d'un tour de force ; en particulier, quelques plans (reflets sur le piano, traveling de la scène finale, tournoiement de la caméra saupoudrés çà et là) et quelques scènes (quelques gestes particulièrement spontanés, qui font penser à de l'impro ou encore la scène dans la boîte de jazz) sont tout simplement géniaux, et l'interprétation est super juste (Damon, Blanchett et Law semblent particulièrement dans leur élément). Scénaristiquement, je me suis laissé surprendre par tous les rebondissements ou, le cas échéant, l'absence de rebondissement. Et surtout, j'ai vécu une expérience cinéma à part : les décors, les costumes, le rapport complexe entre les personnages et leur environnement (appartenance et extériorité, amour et répulsion), la composition de l'image, et plus globalement la structure du film nous emmènent dans un univers singulier. Dans une première partie de film soigneusement étudiée, le terrain est préparé pour la deuxième partie de film, avec un souci du détail qui m'a rappelé Retour vers le futur (oui, ça n'a rien à voir, mais ça m'est venu comme ça) et la deuxième partie décolle en adoptant un nouveau rythme, un ton inattendu, comme si un deuxième métrage commençait, sans pour autant perdre ses attaches logiques et stylistiques avec la première moitié. Le film est à l'image du protagoniste : double... c'est trop bon.
Et de toute façon, en dehors de tout ce blabla intellectualisant, j'ai été vraiment embarqué dans l'intrigue, constamment interloqué par les choix et les actions des personnages, je les ai trouvés étranges, juste assez pour m'y intéresser, mais pas au point de les trouver invraisemblables ; et le sentiment vaguement romantique de la première moitié, avec des échos chaleureux de cinéma italien, puis le contraste avec la froideur et le malaise constant de la deuxième partie produit un clair-obscur particulièrement convaincant. Bref, je me suis pas fait chier.